Quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage... L'expression semble parfaitement adaptée à la cabale menée depuis plusieurs jours et visant Claude Puel. Les méthodes de management perturbent, au mieux, voire dérangent. Dans cette période de crise, certains y trouvant leur intérêt ont décidé de parler à la presse afin de "tuer" Claude Puel, ni plus, ni moins.

"On ne peut pas dire qu’on l’a lâché, car on ne l’a jamais soutenu (ndlr : Claude Puel). Pendant plusieurs jours, on a entendu parler de la fin des privilèges des cadres mais on ne parle pas de situations qui ont été dingues avec les jeunes" explique un joueur stéphanois sous couvert d'anonymat dans un article paru sur RMC. Une déclaration qui interpelle et vient renforcer le discours de l'agent de Stéphane Ruffier qui prétend que "tous les jours, il y a des problèmes. Stéphane a essayé d'éteindre des incendies. Une fois, c'est avec un joueur qui manque de se battre avant le match du PSG, une fois avec le médecin, avec un autre joueur... Tous les jours, il y a des problèmes. Tout le monde le sait, personne ne parle. Pour masquer peut-être les mauvais résultats mais surtout, je pense, le fait que Saint-Etienne joue très mal... Je ne pense pas que Stéphane, gardien de but, soit celui qui fait le jeu ! Je dis stop, il y en a marre pour Stéphane ! ".

Et ce n'est pas fini puisqu'on apprend que le duo Bonnevay-Puel est coupé de son staff, notamment le médical. Et puis il y a ces joueurs qui étaient considérés comme des cadres hier et qui sont écartés des réunions avec le coach comme Romain Hamouma ou encore Yann M'Vila. Il y a aussi ce ton qui est monté, voire un peu plus, alors que Jean-Eudes Aholou se présentait avec un retard de 2 minutes à la causerie de Claude Puel en amont de la rencontre à Paris il y a quelques semaines.

Décontextualisées et mises bout à bout, toutes ces anecdotes ou réactions façonnent une vérité, celle que Claude Puel est le digne successeur de l'empereur Commode réputé pour sa cruauté. Mais à qui profite le crime ? Se pose-t-on seulement cette question ? Car les fuites anonymes dans la presse alimentant des articles écrits à l'encre d'eau de caniveau sont souvent le fruit de la rencontre de salariés déstabilisés dans des clubs en difficulté. L'ASSE correspond à cette situation.

Une fois posé le décors, les réseaux font le reste. Au gré des amitiés des uns pour les autres, des copinages, des services commandés en contrepartie de services rendus, de nombreux médias publient à charge pour déstabiliser le plan de bataille mis en place par Claude Puel et Xavier Thuilot. C'est un constat, seulement un constat. Car nous n'avons rien à gagner à défendre Puel ou Thuilot. En revanche, si la destruction médiatique du coach stéphanois se poursuit, alimentée par les nombreux frustrés de la politique mise en place, il est évident qu'il n'y aura qu'une seule perdante dans cette histoire : l'ASSE. Les supporters ont très justement signifié la problématique aux joueurs la semaine dernière et par des banderoles ce dimanche : si un coach ou des joueurs peuvent quitter le navire, les supporters y sont viscéralement attachés par amour. 

Il est toutefois utile et nécessaire de décortiquer la situation pour identifier les intérêts des uns et des autres à ce que la presse relaye des témoignages assassins vis-à-vis de Claude Puel.

Claude Puel n'a jamais été soutenu ? Mais qui parle ? Qui a intérêt à proclamer cela ? Les jeunes qui jouent ? Les anciens qui ont gardé la confiance du coach ? Les "cadres" qui ont été assis sur le banc des remplaçants ? Ceux qui étaient lovés dans un confort installé par Jean-Louis Gasset et Ghislain Printant ? Chacun se fera son idée...

Si Puel est arrivé, ce n'est pas pour reproduire des méthodes du passé qui ont pu conduire à des dérives comme celle qui laisse penser aujourd'hui à Stéphane Ruffier qu'il est au-dessus du club et à son agent qu'il en est une "légende" ! Rien que ça ! Yvan Curkovic qui a vécu l'épopée 76 ou encore Jérémie Janot qui n'a jamais quitté le navire au plus fort de la tempête apprécieront ! Il n'a pas non plus été recruté pour laisser une partie du pouvoir à son staff. Il est ainsi naturel que Fabrice Grange, entraîneur des gardiens de but, se sente délesté d'un pouvoir décisionnel que Galtier lui avait donné, que l'éphémère Garcia lui avait repris avant que Gasset puis Printant le lui redonne. Il est également logique que le staff médical se crispe au contact d'un coach qui a vite tissé un lien de cause à effet entre le nombre invraisemblable de blessures contractées par les joueurs de l'ASSE et la qualité des hommes en charge du suivi médical. On pourrait ajouter à cette liste Thierry Cotte, dont on sait qu'il figure également sur la liste des hommes visés par une réorganisation de l'encadrement du groupe professionnel.

En définitive, il est difficile de comprendre aujourd'hui comment les dirigeants pourraient reprocher à leur coach et à leur directeur général ce pour quoi ils ont été recrutés. Seul bémol, si le fond n'est pas attaquable, la forme peut prêter à discussion. Comme l'indiquait Daniel Riolo sur RMC lors d'un échange avec notre chroniqueur Joss Randall, fallait-il être aussi frontal, aussi cinglant, aussi rapide ? Encore une fois, la réponse reste ouverte, mais il ne fallait pas attendre autre chose d'un Claude Puel aux principes et valeurs inébranlables, même par temps de tempête. Ainsi, ce "proche du club" qui explique à Mohamed Bouhafsi que "l’ambiance est catastrophique dans le vestiaire mais aussi dans le club, et qu'il a rarement vécu ça" doit s'attendre à de nouveaux chamboulements dans les semaines à venir. Car ce ne sont ni les copinages joueurs-journalistes, ni les pressions d'agents de joueurs, ni même l'interventionnisme de l'un ou l'autre président en faveur d'un salarié qui vont faire infléchir la ligne tracée par le duo Puel-Thuilot. Le château semblait beau à reprendre en mai dernier, mais la mérule attaque parfois insidieusement de belles bâtissent, nécessitant de déconstruire afin de rebâtir le plus beau des édifices...

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