Dimanche, l'ASSE nous a permis de passer l'une de ces sales soirées dont elle a le secret. Après le déluge de 2017 qui vit Oscar Garcia rendre les armes, ce premier Derby de 2021 sera-t-il la goutte de trop ? Celui d'un début de révolution venant des supporters ? D'une remise en question du sportif ? De l'administratif ? De notre organisation à deux têtes ? Et après...? 

Honte aux joueurs, honte au staff, honte aux présidents, honte à ce club que nous aimons tant et qui, par essence, nous fait tant souffrir quand il nous invite à des soirées telles celle proposée dimanche, en prime-time sur la bientôt feu Téléfoot.

J'entends la colère des supporters. Elle gronde depuis bien avant ce dimanche. Je la partage. Toutefois, je regrette qu'à la critique ne s'accompagne que trop rarement les solutions qui vont permettre d'avancer, de progresser, de solutionner...

Les joueurs n'ont pas été bons et n'ont pas respecté le maillot. Non pas qu'il aient dû l'emporter face à un club dont le budget transfert d'un mercato estival représente le notre cumulé depuis une décennie, mais nos stéphanois auraient au moins été bien inspirés de s'imprégner de ce qui fait un Derby : le combat, l'agressivité, le don de soi, l'orgueil, l'abnégation... Au lieu de ça, nous avons assisté à un ballet d'âmes en peine qui ont même eu le don de désarçonner les plus chambreurs de nos voisins, tellement apitoyés par notre sort qu'ils n'ont même pas eu l'envie d'en rajouter quelques louches. 

Claude Puel a construit un groupe qui ne s'est pas montré à la hauteur de l'événement. C'est un reproche que j'ai lu. Il a également fait les mauvais choix tactiques, les mauvais changements, les mauvaises consignes, les mauvais positionnements... Bref, tout était à jeter. Alors qu'aurait-il dû faire ? Car à un moment je veux bien que l'on critique celui à qui l'on colle aujourd'hui la somptueuse statistique de 5 rencontres remportées sur ses 33 derniers matches avec l'ASSE, mais quelles autres solutions existait-il ? Il y a une semaine, il partait en terres alsaciennes avec une équipe amputée de 15 joueurs. Ce week-end, s'il disposait d'une majorité de son effectif mais certains des revenants étaient fatalement à court de forme. Ceci explique en partie que les lyonnais aient notamment usé de renversements dès qu'ils le pouvaient afin de faire courir un bloc dont le manque de fraîcheur physique associé à l'inexpérience des joueurs alignés a permis d'assister à une passe à 10 pour ne pas dire ce que l'on appelle dans les cours d'écoles un "Suisse" ! Que pouvait faire Claude Puel ? Aligner Boudebouz ? Aligner Bouanga ? Aligner Nordin ? Il l'aurait fait nous aurions eu droit à un lynchage tout aussi violent : "Ils sont nuls", "Ce sont des pieds carrés", "Les mecs ne foutent rien sur la pelouse et sont titulaires..." ... Alors quelle est la solution ?

Depuis le début on reproche tout et son contraire à Claude Puel. Beaucoup trop de personnes imaginent qu'il s'est coupé des cadres pour faire des exemples. C'est faux ! Il s'est coupé des cadres qui coûtaient le plus cher pour les forcer à partir. On en pense ce que l'on veut, mais l'idée finale n'était pas de dégager un ancien parce que Puel adore les jeunes ! L'idée finale était de s'alléger des salaires mirobolants accordés à des joueurs qui mettaient en difficulté financière le club et ne justifiaient plus qu'on leur accorde autant au regard de leurs performances sportives. Croyez-vous deux minutes que la passion de Puel soit de s'entourer de paris sportifs comme Krasso, Neyou, Retsos, Sissoko ou Maçon ? Par chance, il a du flair et certains d'entre eux sont performants mais pour la plupart... blessés ! 

Et puis il y a toujours cette tendance à vouloir lancer un jeune quand un ancien est mauvais pour finalement le remplacer par un vieux quand le jeune a montré tout son manque d'expérience. De ce fait, nous avons eu droit à du Aouchiche pour Boudebouz puis du Boudebouz pour Aouchiche. De la mème manière il fallait faire jouer Sow à la place de Kolodziejczak ou encore Bajic à celle de Moulin... Les vieux ont tort lorsqu'ils ne sont pas au niveau et remplacé par la force des choses par des jeunes qui ne peuvent pas être constants et performants 100% du temps... ce que l'on reproche à Puel en le taxant de jeuniste entêté ! Quelle est la solution ?

Le recrutement peut-être... Nous avons vendu pour 40 millions d'euros le jeune (et regretté) Fofana, pour 35 millions son compère Saliba, pour 5 millions Honorat et quelques autres... Nous sommes donc riches ! Puel a donc en main une enveloppe d'au-moins 30 millions... Ce serait tout du moins le cas s'il jouait à Football Manager. Toutefois, la vraie vie des vraies transactions montre que les transferts se payent en deux, trois ou parfois quatre échéances. C'est le cas pour tous les derniers gros transferts de l'ASSE. L'argent va donc arriver, certes, mais avec les incertitudes liées à la crise du Covid et du nouvel appel d'offre pour les diffuseurs, peu de clubs vont se lancer dans des dépenses inconsidérées. Morgan Sanson (OM) aurait peut-être été vendu 30 millions il y a un an. Il est aujourd'hui parti de Marseille pour 17 millions... Et encore, nous parlons ici d'un club acheteur anglais ! Claude Puel a bien compris qu'il n'y avait pas un radis à St-Etienne. Qu'on se rassure, il n'y a pas de caisse cachée ou de trésor enfoui. Les derniers gros salaires nous pompent une grosse partie de notre masse salariale et la marge de manoeuvre est quasi nulle sur le marché des transferts. Nous n'avons pas vendu par choix mais par obligation. Combien vaudrait Fofana aujourd'hui dans un club moyen français comme l'ASSE ? 20 millions ? 25 en tirant un peu...? Miser sur Mostafa Mohamed est peut-être l'un des rares coups que peut se permettre l'ASSE. Un international, star dans son pays à moins de 5 millions d'euros ça n'existe quasiment nulle part. L'effort de la part du club est énorme... Mais puisque il y a toujours mieux à faire dans ce contexte, quelle est la solution ?

Puisque nous n'avons pas de moyens, il faut alors que les présidents partent et vite ! Qu'ils démissionnent même ! A-t-on seulement déjà vu un chef d'entreprise démissionner ? Non bien entendu, il vend son entreprise. Derrière les "Direction démission" on comprend toutefois bien le message qui est de croire en une passation de flambeau... Pour qui ? Pour quelle autre désillusion ? Nous savons ce que nous avons mais jamais ce que nous pourrions avoir ! Des américains ? Des chinois ? Parlez-en à Auxerre, Bordeaux, Nice et d'autres. Aujourd'hui le football est une industrie du spectacle qui attire des investisseurs, pas ou peu de passionnés. Nos présidents le sont, certes un peu trop parfois, mais ils aiment notre club et le défendent. Ils ne sont pas éternels toutefois. il n'y a plus de Roger Rocher ou même d'André Laurent en France à part peut-être notre ennemi préféré, Jean-Michel Aulas. Qui va succéder à cette présidence à deux têtes qui n'a jamais vraiment fonctionné ? Qui saura donner les moyens de ses ambitions à un club qui laisse encore entrevoir les fumées de sa gloire passée à laquelle nous nous accrochons comme une éternelle madeleine de Proust... Qui a la solution ?

L'idée n'est pas ici de protéger nos joueurs, nos présidents, le staff ou je ne sais qui. L'idée est de recontextualiser les choses. de ramener les discussions à une réalité. Je veux bien qu'on monte un compte internet dont les ficelles sont tirées par on ne sait qui (les supporters qui alimentent ce compte semblent bien accompagnés et informés si vous voulez mon avis...) afin de dénoncer des dysfonctionnement, mais quelles solutions nous sont proposées ? Quelle alternative ? Gueuler pour gueuler on sait tous faire, et après...? Les présidents partent, Puel part, les vieux partent (ou les jeunes c'est selon le vent)... Et après que fait-on ? Je n'ai pas de solution et reste très humble derrière mon clavier. Parfois, la stabilité est une sage position. Croire au projet dont on sait qu'il devait nous faire vivre des moments douloureux. Nous étions avertis mais nous sommes déçus. C'est normal. Un derby exacerbe les réactions et notamment la colère ou la peine. Croyons toutefois en demain, en de plus beaux jours, en de victorieux derbies, en de victorieuses saisons... La L2 est une réalité que nous touchons du doigt, faisons en sorte qu'elle nous échappe en faisant bloc derrière le club et les joueurs. Viendra ensuite le temps des reproches et des mises au point.

Crédit photo : Icon Sport

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