Qualifiée pour le 8e tour de la Coupe de France, l’ASSE s’apprête à vivre un match historique face à Écotay-Moingt (R3). Avant ce rendez-vous disputé à Geoffroy-Guichard, Éric Cognet, entraîneur du club, s’est confié à Peuple Vert.

« Très sincèrement, il y en a beaucoup qui aimeraient être à ma place. Donc, on va profiter de l’évènement, de cette partie de bonheur qui nous attend. » Entraîneur d’Écotay-Moingt, Éric Cognet ne s’y trompe pas au moment de décrocher son téléphone, mardi 18 novembre, pour évoquer le samedi 29 novembre qui l’attend. Un match historique pour ce petit club de la banlieue de Montbrison comme pour l’ASSE, qui va défier une équipe de Régional 3, le 8e niveau du football français, pour la première fois au 21e siècle.

Une rencontre que les Verts ont accepté de recevoir à Geoffroy-Guichard et un souvenir à vie pour Écotay-Moingt, avec un match diffusé en prime-time sur beIN Sports (20 h 30). Une véritable chance pour Éric Cognet, qui souhaite profiter de ce moment de bonheur qui l’attend.

Éric, quand on est entraîneur d’Écotay-Moingt et qu’on s’apprête à défier l’ASSE, qu’est-ce que ça représente ?

Eh bien c’est simple, puisque techniquement, entre guillemets, ce n’est juste pas possible. On ne peut pas imaginer un jour rencontrer l’ASSE, même avec un peu de chance et même si on a fait un beau parcours. Mais il faut se rendre compte qu’un 8e tour de la Coupe de France, pour un club de Régional 3, en sachant qu’on était en D2 il y a trois ans, ça fait un peu beaucoup dans la tête. Donc très sincèrement, on ne pouvait pas l’imaginer. Et le fait qu’on l’a acquis à la dernière seconde, ça donne un parfum encore plus particulier.

Après, évidemment, on n’est pas du tout préparés à ça mais on va faire en sorte de faire plaisir à tout le monde. Je pense que l’ASSE est dans le même cas et sera très compréhensive pour nous aider. Mais je ne suis pas trop inquiet, parce qu’ils ont autant à gagner que nous.

Être en D2, il y a trois ans et aujourd’hui défier l’ASSE, c’est la récompense d’un club qui travaille bien ou il se passe quelque chose d’irréel cette saison ?

Moi, je suis arrivé il y a trois ans dans un club familial, avec des habitudes de club familial. Donc sincèrement, j’ai essayé de mettre en place des idées, comment dire, un petit peu plus dynamiques. Et quand les gens autour se prennent au jeu, eh bien j’ai envie de dire que le jeu appelle le jeu. Mais attention, on sait d’où on vient, on connaît nos qualités et surtout nos défauts. Et bien évidemment que jouer un tel match, c’est inespéré. Imaginez une telle opposition au rugby, ce serait juste impensable parce qu’on se ferait démonter physiquement. À mon sens, il y a un trop gros écart, mais l’expérience va être bonne à prendre. Parce qu’on ne se rend pas compte de ce que subissent les joueurs professionnels.

Au fur et à mesure que les tours avançaient, vous avez commencé à penser à un tel match ?

Non, non, très sincèrement, ce serait mentir de dire qu’on l’a imaginé. On a pu l’espérer, mais dans notre projet sportif, on visait au mieux le 5e tour. Parce qu’il y a les maillots, et c’est le Graal pour les amateurs. Mais maintenant, on va se créer un souvenir, ou plutôt 10 000, mais c’est aussi lié à une certaine chance au tirage qui nous a offert des équipes disons « accessibles ». Parce que si on était tombés sur des équipes de niveau national, on aurait pas fait long feu (sourire).

Revenons sur ce parcours justement, avec ce 7e tour complètement dingue à Nord Lozère (R2) qui se termine par une qualification aux tirs au but (4-4, 3-4 tab)

Le premier point important, c'est qu'on a été super bien reçus. Et ça valorise à mon sens le football amateur, parce qu'on était dans un milieu rural, avec des gens bien impliqués, bénévoles dans leur club, super accueillants et finalement très tristes parce qu’à 30 secondes de la fin, ce sont eux qui sautaient de joie et qui chantaient « Saint-Étienne, Saint-Étienne ». Et finalement, on égalise avant de gagner aux tirs au but et là, ça devient des larmes, et on était presque tristes pour eux parce que si on avait été dans le même cas, on aurait été démolis.

Savoir que l’ASSE se présentait au tour suivant, ça a donné un surplus de motivation à vos joueurs ?

Je dirais que c’est plutôt l’inverse. C'est-à-dire qu’on a passé 25 minutes très difficiles après la pause où on a été complètement pris par l’émotion parce qu’on menait 2-3 à la mi-temps et qu’ils venaient de manquer un penalty. Donc la première chose dans les vestiaires, c’était de calmer tout le monde, redescendre d’un étage. Mais on est ressortis le trouillomètre à zéro, avec beaucoup de maladresses que nos adversaires ont exploitées pour mener 4-3 à l’heure de jeu. Heureusement, comme nous, ils ont sûrement eu un moment où ils ont relâché la pression, ce qui nous a permis de redevenir dangereux.

Et puis sont arrivées ces trente dernières secondes du temps additionnel, avec cette égalisation sur corner salvatrice. Derrière, les penaltys, où on rate notre deuxième tentative, avec un stade qui s’enflamme à nouveau. Mais on est restés bien concentrés, et leurs deux tireurs suivants, sûrement sous la pression, ont raté, ce qui nous a permis de l’emporter sur ce 5e et dernier tir. Et là, c’est de la folie, tout le monde qui court dans tous les sens, qui s’effondre par terre. Franchement, j’ai 62 ans, beaucoup d’expérience dans le football, mais vivre cela à cet âge-là, c’est juste phénoménal. On a vécu un vrai match d’amateurs, avec des maladresses, de problématiques… Mais finalement, c’est ça le football !

Et arrive maintenant Geoffroy-Guichard. Qu’est-ce que cela représente ?

Personnellement, en quelques mots, j’ai connu ce stade parce que j’ai joué à l’ASSE à un certain niveau en étant jeune. Et on a souvent été ramasseurs de balle, on a vécu l’ambiance du Chaudron, certainement comme beaucoup de parents de mes joueurs. Donc, on connaît cette liesse. Après, évidemment, être au coeur de l’action, ça va être très différent. Il y a beaucoup de joueurs de chez nous qui n’ont même pas évolué au niveau régional auparavant. Donc je vous laisse imaginer le saut sur la lune qu’ils s’apprêtent à faire. Ils vont être complètement abasourdis par le public, le stade, l’environnement, ça, c'est sûr. Et on aura beau leur dire, les préparer, ça restera évidemment trop fort.

Mais d’ailleurs, on n’y va pas pour ça, parce que l’esprit foot devient presque obsolète au vu de l’écart entre les deux équipes. Il faut se rendre compte, en 48 heures, du nombre de messages et de sollicitations qu’on a reçu. Du nombre de personnes qui nous ont dit qu’ils voulaient nous soutenir avec les Verts, parce que l’ASSE reste évidemment l’élément moteur, puisque sans eux, on serait passés inaperçu. Mais les petits papys des villages, ils viennent tous les dimanches au stade pour vivre ce genre de moments un peu différents. On vient se faire plaisir au contact des autres, et je pense que c’est ce qui va se passer.

Quel regard portez-vous sur le début de saison de l’ASSE ? Le technicien que vous êtes arrive à y voir quelques failles à exploiter ?

Alors moi, je suis technicien, donc tout technicien envisage toute solution possible ou imaginable. Après, c’est le fait de les réaliser. Pour connaître un petit peu le niveau national, parce que j’ai été à Feurs, on est déjà sur une autre dimension. Alors, imaginez le niveau Ligue 2… Quand ils vont faire une accélération, ils vont nous mettre trois mètres. Donc tout ça, il va falloir l’anticiper, préparer les garçons.

Mais bon, je pense que les joueurs vont arriver à se discipliner, parce que la réalité d’en face va nous obliger à faire le maximum. Eh puis bon, je ne vais pas dire que je réserve une tactique particulière à notre coach norvégien, parce que je ne connais pas la Norvège, mais je vais tenter de lui réserver une surprise. Mais je ne me fais pas d’illusions, il faut rester les pieds sur terre et profiter de ce moment qui sera très beau à vivre.

Crédit photo : asse.fr.