Passé par l'ASSE entre 2019 et 2022, Denis Bouanga fait aujourd'hui les beaux jours du Los Angeles FC, aux États-Unis. Parti du Forez après la descente en Ligue 2, le Gabonais est revenu sur les derniers moments difficiles de son aventure chez les Verts pour Colinterview. Extraits.
Vert de 2019 à 2022, Denis Bouanga est un personnage central de l'histoire récente de l'ASSE. Arrivé du Nîmes Olympique après s'être révélé en Ligue 1 lors de la saison 2018-2019 (huit buts, trois passes d), le Gabonais a porté le maillot stéphanois à 110 reprises en trois saisons, pour un bilan honorable de 28 réalisations et 16 offrandes. Apprécié du Peuple Vert pour ses qualités offensives mais également pour sa hargne sur la pelouse, Bouanga a pourtant vécu des moments très difficiles à Saint-Étienne. L'attaquant, devenu le meilleur buteur de l'histoire du Los Angeles Galaxy la semaine dernière (94 buts), est revenu sur son passage dans le Forez pour Colinterview.
"J'ai choisi le public en venant à l'ASSE"
Après un début de carrière haché entre Lorient, Strasbourg, Tours et Nîmes, le Gabonais a le choix de son futur club à l'été 2019. Les discussions se portent entre Rennes et Saint-Étienne, mais Bouanga n'hésite pas longtemps. "Ils allaient tous les deux en Europa League. Moi, j'ai choisi le public, je suis parti à Saint-Etienne !", se remémore le joueur, qui a également pu compter sur les conseils avisés d'un partenaire de sélection.
"C'était direct. J'ai joué en Ligue 1, j'ai joué avec Nîmes à Geoffroy-Guichard. Il manquait une tribune quand j'ai joué là-bas, mais ça faisait un bordel..., explique le Gabonais. J'en ai parlé avec Pierre (Emerick Aubameyang) qui m'a dit : "Saint-Étienne, c'est le feu. Tu marques, la foule crie ton nom, elle descend..." Enfin pour moi, ça a été logique, je me suis dit que j'allais faire la même chose que lui."
🏆 @BouangaDenis rafle les titres d'homme du match ! 😎
Première saison en Vert 💚
12 buts ⚽️⚽️⚽️⚽️⚽️⚽️⚽️⚽️⚽️⚽️⚽️⚽️
9 trophées 🏆🏆🏆🏆🏆🏆🏆🏆🏆Et c'est pas fini ! (en tout cas on te le souhaite) pic.twitter.com/UFi9Kxer5V
— AS Saint-Étienne (@ASSEofficiel) March 31, 2020
Et sur le terrain, Bouanga se donne les moyens d'être aimé par les supporters, avec une première saison où il porte les Verts. L'ailier marque 10 buts et donne 3 passes en 26 matches, participant à sauver l'ASSE (16e) d'une descente alors que la saison est stoppée par le Covid à la 28e journée.
L'affaire de la vidéo raciste, un premier coup dur
Pourtant, bien que l'ancien nîmois ait porté les Verts sur cette saison, un premier moment difficile arrive l'année suivante quand il reçoit sur son compte Snapchat une vidéo à caractère raciste à la veille d'un déplacement à Nîmes, où il marque un but (victoire 0-2). Tourné dans le local des Magic Fans, qui excluront de leur groupe les auteurs de cette immonde vidéo, l'instant touche profondément le joueur. "Il y en a quatre, cinq qui m'insultent de "singe", "retourne chez toi", "sale noir"... C'est une minorité mais ça me touche profondément."
Une affaire que Bouanga souhaite dans un premier temps ne pas ébruiter, alors que les Verts sont à la peine en championnat (16e, l'ASSE finira 11e). "On gagne et je décide de le dire. Je ne voulais pas en faire tout un plat. Je sais que, voilà, ça... Moi, ça m'a touché de ouf mais je ne voulais pas mêler tout le monde, explique le joueur, qui a eu le soutien des ultras. Mais au final, le chef des Magic Fans m'a envoyé un message, il m'a dit : "On te soutient à 100%. C'est qu'une bande d'individus, si on les retrouve, ils sont morts." Après, comme je l'ai dit, ça m'a touché. Je voulais pas faire abstraction de ça, parce que j'aurais pu dire que je joue pas pour ce club-là, c'est terminé. J'ai pas lâché l'équipe à ce moment-là, puisqu'on avait besoin de points. (...) Mais j'étais chaud bouillant, parce que les trucs comme ça, c'est impardonnable."
Deux cambriolages pendant son passage à l'ASSE
Un moment difficile qui ne sera pas le seul du joueur dans le Forez. En effet, Denis Bouanga fait également état dans cette interview de deux moments où sa maison a été cambriolée. Une fois alors qu'il est absent, une autre fois peu de temps avant que sa femme n'accouche, en août 2020. "J'étais à la maison, je dormais en haut. J'étais à la maison, sauf qu'il y avait la clim qui était assez forte en haut, mais on avait laissé la fenêtre ouverte en bas. J'entends des bruits, je me dis que ça peut pas être mon chat, donc je me mets sur le lit, je m'assois, j'essaye d'écouter parce que ma femme est à ce moment-là aux toilettes. Elle me demande ce que je fais assis, je lui explique je vais aller voir en bas, je reviens. On éteint la clim et on entend sauter, partir et en courant.", énonce le Gabonais.
"Je descends, j'entends une voiture partir à toute vitesse. Donc moi, la première chose que j'ai voulu faire, c'est prendre mes clés de voiture et partir directement les poursuivre. Mais voilà, il s'avère qu'ils ont pris les clés de mes voitures, donc je ne pouvais pas sortir, poursuit le joueur, alors que sa femme doit accoucher le lendemain et que l'épisode choque son premier fils. "C'est compliqué, deuxième cambriolage, je me dis, ça y est, moi, je veux partir."
"Ça m'a fait tellement mal au cœur de voir ma femme, elle accouche juste après. On ramène le bébé dans la maison parce qu'on ne peut pas déménager comme ça du jour au lendemain. Du coup, moi, ça me faisait mal au cœur. Je ne dormais pas trop. Les veilles de match, quand on allait à l'hôtel, j'appelais l'agent de sécurité, il restait devant la maison. Après, tu n'es pas tranquille, tu ne joues pas à l'esprit tranquille."
"Les 6 derniers mois, Pascal Dupraz me remonte le moral, je mets buts sur buts mais ça ne suffit pas"
Finalement, Denis Bouanga prend la décision de rester une saison supplémentaire à l'ASSE. "Ma femme se sentait quand même bien à Saint-Étienne, elle avait ses copines. On a déménagé dans une maison plus sécurisée. Elle ne voulait pas spécialement partir, alors que moi j'avais des envies d'ailleurs. Deux fois cambriolé comme ça, t'es pas à l'abri qu'une troisième fois ils viennent encore." Une troisième saison dans le Forez qui se termine de la pire des manières. Malgré une saison à 9 buts et 6 passes, le Gabonais ne peut empêcher la relégation stéphanoise.
"Les derniers six mois, quand Pascal Dupraz vient, il me fait remonter le moral, il me donne tout ce que j'avais besoin. Je mets buts sur buts. Malheureusement, ça ne suffit pas. On descend sur un barrage, ça m'a fait mal au cœur de descendre, de voir tout le monde sur le terrain. Ça m'a fait tellement mal au cœur, mais d'un autre côté, je voulais pas jouer en Ligue 2 aussi. Au final, je suis amené à partir. Moi, je voulais partir, j'ai pensé à moi sur ce coup-là. J'ai pas oublié ce qu'on m'avait fait aussi, tu vois, les deux cambriolages..."
Une descente restée en travers de la gorge du joueur, alors que l'équipe du moment valait bien mieux. "On était hyper fragile, regrette-t-il. À l'extérieur comme à domicile. Tu avais la pression du public aussi, tu avais trop de problèmes en fait. C'était trop dur. Pourtant, on avait une équipe de fous..."