Arrivé à Saint-Étienne à l'été 2015 et reparti l'été suivant Benoît Assou-Ekotto garde beaucoup d'amertume et de mauvais souvenirs de son passage à l'ASSE. Il ne mâche pas ses mots vis-à-vis de la ville, des supporters, du club et en particulier de Roland Romeyer et Christophe Galtier. Extraits d'une longue interview accordée à Julian Palmieri.
"Tout mais pas Saint-Étienne s'il te plaît"
Benoît Assou-Ekotto (ancien latéral gauche de l'ASSE, 2015-2016) : « J’avais connu Saint-Étienne en venant jouer avec Lens à l’hôtel du golf je crois. J’y était allé quand j’avais 20 ans, et je m’étais dit « putain c’est pas ouf ici quand même » et j’avais retenu ça.
Mon agent m’appelle, il me dit : « Il y a Saint-Étienne et tout ».
Je lui dis « Nan tout mais pas Saint-Étienne s’il te plaît ».
Il m’a dit « Non mais Saint-Étienne ça changé, ils ont un tramway maintenant et tout ça ».
J’ai répondu : « Oui mais non quand même je ne veux pas ».
Mon agent m’a dit : « Il y a la réalité du marché, moi je trouve que c’est facile de travailler avec toi, quand c’est blanc on te dit blanc, quand c’est noir on te dit noir. Moi j’aime travailler comme ça. Mais il y a des clubs qui ne sont pas comme ça. Il y a beaucoup de clubs qui ont l’écho comme quoi c’est difficile de travailler avec toi ».
Moi je lui demande pourquoi, il me dit : « Ben, j’entends ce que tu me dis mais il y a des clubs qui pensent que c’est difficile de travailler avec toi. Moi, Benoît, je t’aime bien, je t’aime beaucoup, t’es comme mon fils, comme mon frère. Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras. J’ai pas envie de t’appeler le 31 août et te dire qu’il y a Vaulx-en-Velin qui te veux, j’ai que ça. »
Il rajoute : « Ben, tu sais très bien que je ne fais pas ça pour gagner de l’argent, je n’attends pas que tu signes à l'ASSE pour gagner de l’argent. Je te le dis pour ton bien. »
Je dis « ok, on va à Saint-Étienne. »
Il dit : « Non mais t’inquiète je vais t’emmener dans the place to be, tu vas kiffer. »
Je lui fais confiance ça faisait 16 ou 17 ans qu’on se connaissait. On arrive, on va à ce fameux hôtel, on est en train de manger, on parle de tout, de rien. Et je dis à mon agent : « Au fait, tu m’as dit que tu allais m’emmener dans the place to be ». Il me dit « bah on y est ». J’en revenais pas. »
Quand Assou-Ekotto souffle face aux supporters de l'ASSE
Sur la transition Londres/Saint-Étienne : « C’était très compliqué. Ne serait-ce pour commander à manger à 15h. Moi j’allais souvent à la gym avec Jessy Moulin. 15h, je veux commander à manger, le gars me dit « non c’est fermé, on ouvre à 19h ». Tu peux pas faire tes courses avant (après ?) 19h30. Moi quand j’étais à Londres, ça fermait à 23h ou ça ouvrait toute la nuit les Tesco. Tu veux faire tes courses à 2h du mat’ tu les fais. Ça c’était très compliqué à mon retour en France.
Puis après les mentalités aussi. Tu sais que là tu es dans une ville, une ville minière, et que si le club ne tourne pas, la population ne tourne pas non plus. Tu es dans une ville, tu as un club pour une ville. À Saint-Étienne, tu fais les courses, tu as des mecs qui te disent « Ce week-end, ce week-end, ce week-end… » pfffff tu as envie de leur expliquer « C’est peut-être ta passion, je le conçois mais ça n’est pas forcément ma passion ». Mais tu sais que ça n’est pas concevable d’expliquer ça à un supporter. Donc Saint-Étienne mais globalement le retour en France est compliqué.
"J'irai pas jusqu'à dire que je jouais à contre-coeur mais..."
J’arrive à Saint-Étienne, ça fait un an que je n’ai pas joué. La prépa, je ne fais pas toute la prépa parce que ça fait un an que je n’ai pas joué. Je joue le premier match de championnat contre Bordeaux, putain que c’était dur. Et puis tu as un réflexe d’attaquer, mais là tu es dans la gérance de fou.
On prend un but à la dernière minute, le gars me bouge parce que je suis cuit cuit cuit. Déjà tu ne prends pas forcément de plaisir dans ta vie stéphanoise. Là, faire 100m c’est beaucoup plus compliqué que si tu es à Londres, dans un stade de folie, avec une équipe de folie. Là je n’irai pas jusqu’à dire que c’était jouer à contre-coeur, mais c’était dur. Le retour en France c’était dur footballistiquement.
Là-bas je devais prolonger et je signe pas. Et c’est là où je ne suis pas surpris parce que je connais ce milieu et je n’ai pas un attachement de folie. Christophe Galtier (coach de l'ASSE à l'époque), à la fin de saison, me dit « tu fais quoi l’année prochaine ». Je lui dis « je ne sais pas, si vous avez envie de parler, je vous écoute, si vous n’avez pas envie, je m’en vais ». L’ambiance était bonne, super ambiance. Il me dit « on a envie de te garder ». Je dis « Ok cool ». Ils commencent à discuter, contrat et tout…
Puis arrivé à un moment je dis à mon agent : « Mais l’entraînement reprend dans une semaine quand même, il serait peut-être temps de finaliser ». Et il me dit : « Ben je vais être honnête avec toi, ça fait 3 jours qu’ils ne me répondent pas ». Je dis « ça pue quand même ». Donc ils appellent, 1 fois, 2 fois, je lui demande le numéro du président Romeyer.
Des insultes à l'égard de Romeyer et Galtier
Je lui envoie un texto en disant en gros « vous êtes des sal*pes. Appelle moi, dis moi « je ne veux pas de toi », je suis cool. Mais pourquoi vous répondez pas au téléphone. » Et le mec m’a répondu tout de suite alors que mon agent essayait de le joindre depuis 3,4 ou 5 jours. Il m’a dit « je suis au courant de rien, on fait une réunion mercredi ». Je lui dis : « très bien, dites à Galtier qu’il soit là ». Il me répondu « Non Christophe ne peut pas être là ». Je lui dis alors « bah on fait une réunion jeudi alors ». Il me répond « Non il ne peut pas ».
Donc on est parti à leur réunion, et le fils adoptif de Galtier, avait un arrière gauche, que je connaissais pas, Cheikh Mbengue, qui était à Rennes. Donc lui a dit à son père, « papa j’ai un arrière gauche » et Galtier a plus donné de nouvelles. Je lui ai envoyé un texto : « tu es la reine des sal*pes, tu prétends avoir un fort caractère et blablabla, tu es une sal*pe, et si tu n’es pas content, on se voit ». Il m’a répondu peut-être 6 mois après en me disant que je devais le remercier. » Mais Galette, c’est pas comme si j’avais 19 ans, et que tu me sortais du centre de formation pour jouer à l'ASSE. »