Laurent Batlles se trouve face à un choix compliqué. Peut-être même le plus compliqué depuis sa prise de fonction à la tête de l'équipe stéphanoise. Qui choisir entre Matthieu Dreyer et Etienne Green ? Loin d'être simple. Creusons ce débat qui ne cesse d'alimenter les réseaux.
Contexte
Nous connaissons tous la belle histoire d'Etienne Green. Franco-Anglais né à Colchester. On vous épargne la redite mais le jeune portier des Verts n'était pas programmé pour devenir un jour titulaire dans les buts de l'AS Saint-Etienne. Pour autant, suite à un concours de circonstances, Bajic blessé, il saisit l’opportunité à pleine dent au stade des costières de Nîmes où il stoppe notamment un penalty.
Il a livré un très bon match !
Très juste au pied, décisif sur les fois où il a été sollicité : Green est clairement le tube du week-end. Avoir eu ce calme & ce cran pour une 1ère en #L1, Bravo ! Il faut enchainer maintenant👍pic.twitter.com/3R0Jj4HLx0— Green Prospect (@green_prospect) April 5, 2021
Il enchaîne ensuite les bonnes performances. Tout lui sourit. Les poteaux sont sortants à l'époque. Les sorties loin de ses cages sont audacieuses mais passent. La success story est en route. Les dirigeants s'en frottent les mains. L'ombre de Stéphane Ruffier plane toujours au-dessus des Verts. Qui de mieux qu'un jeune nommé Green dans les buts stéphanois ? Sans compter que le jeune homme choisit la sélection anglaise. De quoi assurer un futur jackpot pour le club ?
La saison 2020-2021 se termine. Claude Puel fait le choix de le nommer gardien numéro pour la saison à venir. Le contexte économique est tendu dans le Forez qui attend toujours une vente (imminente ?). Assez rapidement, le vent commence à tourner pour Green. Moins en réussite dans une équipe également plus friable après la perte de Pape Cissé. Les Verts enchaînent les contre-performances et s'enlisent doucement mais sûrement vers les profondeurs du classement.
Claude Puel remercié, Pascal Dupraz souhaite rapidement recruter un gardien qui apporte expérience et de sérénité dans les cages stéphanoises. Le club maintiendra qu'il s'agit d'un choix d'urgence suite à la blessure au coude de Green. Pour autant, il restera sur le banc jusqu'à la fin de la saison malgré des performances plus que discutables de Bernardoni. Là encore, on rassure tout le monde : Etienne Green sera à nouveau le numéro 1 en L1 ou en L2, la place sera pour lui... Protégeons cette belle valeur marchande. Le choix fait l'unanimité chez les supporters à l'époque.
Laurent Batlles débarque alors en juin 2022. Il identifie les forces et les faiblesses de son effectif. Soyons clair, dès le départ, il n'est pas convaincu qu'Etienne Green soit au niveau de ses ambitions. Pour autant, la place lui a été promise. Preuve en est que le staff s'active en coulisses pour trouver un numéro 1 bis... Un casse-tête qui empêche Batlles de convaincre et attirer un gardien d'une certaine stature. Les Verts passent notamment à côté de Gauthier Larsonneur qui veut jouer. Mais il faut conserver la cote de Green et sa success story.
Après un cataclysme face au Havre (0-6), les dirigeants sentent l'urgence arriver et bouclent la signature de Matthieu Dreyer. Expérimenté, coéquipier-modèle et accessible financièrement, il débarque dans la peau de doublure.
La suite, on la connait. Le résultat également. Il y a un problème au poste de gardien de but depuis l'éviction de Stéphane Ruffier. Ni Matthieu Dreyer ni Etienne Green n'arrive pleinement à convaincre.
Qui est le meilleur ?
Le poste de gardien de but est très particulier à analyser. D'autant plus dans le football moderne où les attentes des coachs sont toujours plus importantes. Essayons de balayer les différents aspects de jeu.
Relance au pied
Laurent Batlles souhaite mettre en place un football de possession. Et ceci implique également son gardien. Repartir court de derrière. Etre disponible, serein et précis balle au pied n'est pas une option pour le coach stéphanois. C'est même indispensable. Si les statistiques parlent peu avec une précision de passes similaire : Green (74% ) Dreyer (72%), les lacunes du premier cité sont apparentes à chaque rencontre. Pour l'un comme pour l'autre cette carence a couté des buts à la plus mauvaise défense de Ligue 2 (17 buts en 9 matchs !).
Green montre peu de sérénité balle au pied et a tendance à allonger pour se rassurer. Ce qui n'a pas été sans conséquence. Ce fût notamment le cas à Pau où une erreur de relance amène son expulsion dans la foulée.
Dreyer se montre plus serein mais guère plus convaincant. Ce n'est pas son dernier match qui va nous rassurer où il a commis plusieurs erreurs fatales dans ses relances.
S'il faut choisir, sur cet aspect, avantage Dreyer qui a pour lui la volonté de relancer court avec une plus grande sérénité. Probablement dû à son expérience.
Leadership
Il est toujours délicat d'évaluer l'impact d'un joueur sur les autres. Pour autant le langage corporel est assez parlant. Etienne Green n'a plus le même sourire. Son visage semble marqué ces derniers temps. Les traits sont durs. Le joueur ne dégage pas une sérénité implacable. Probablement dû à une défense perméable. Mais inversement, il l'a rend guère moins friable. Son attitude ne rassure pas ses partenaires. Tout l'opposé de ce qu'il dégageait à ses débuts où la pression semblait glisser sur lui de manière surprenante. Si ceci semble réducteur, notons tout de même que l'ASSE n'a pas gagné une seule des 5 rencontres quand il a débuté dans les buts.
La comparaison à Matthieu Dreyer est assez saisissante sur ce point-là. Fort d'une grande expérience, l'ex gardien de Lorient ne semble pas du tout subir la pression. A tel point que sa décontraction pourrait être apparentée à une forme de décontraction (trop poussée ?).
Encore une fois, avantage Dreyer.
Sur sa ligne
Nous avons pu l'observer depuis ses débuts. Etienne Green est capable d'arrêts exceptionnels. Fort d'une grande envergure et de réflexes impressionnants, il s'agit du principal point fort du gardien anglais. Il l'a encore prouvé cette saison. On garde tous en mémoire sa parade spectaculaire à QRM sur coup-franc.
Moins académique, son concurrent s'avère relativement efficace sur cet aspect du jeu. Pour autant, il semble nettement moins vif et explosif sur ses appuis.
Avantage Green.
🧤 Un arrêt magistral pour un titre d'𝗵𝗼𝗺𝗺𝗲 𝗱𝘂 𝗺𝗮𝘁𝗰𝗵 !
Après #QRMASSE (2-2), vous avez choisi de récompenser Etienne Green 4⃣2⃣. Il devance les deux buteurs, Jean-Philippe Krasso et Mathieu Cafaro. pic.twitter.com/LDYewsJpSQ
— AS Saint-Étienne (@ASSEofficiel) August 17, 2022
Loin de ses bases
Là encore, la sérénité et l'aspect mental joue. Etienne Green est capable, de par son envergure, d'aller chercher des ballons aériens. Il l'a prouvé à multiples reprises. Pour autant, moins en confiance en ce moment, il est moins régulier de le voir sortir proprement. Il n'est pas rare qu'il percute un coéquipier. Des sorties moins maitrisées.
Du côté de Mathhieu Dreyer, il n'hésite pas à sortir au poing. Des initiatives rassurantes dans une défense qui cherche encore des repères.
Enfin en ce qui concerne les sorties loin de ses bases, Etienne Green se montre bien plus mobile et n'hésite pas à sortir de sa surface. Il est plus rapide que son concurrent. Une faculté qui pourrait s'avérer précieuse dans une équipe qui a la possession et aspire à jouer haut sur le terrain. Pour autant, là encore, son manque de confiance l'amène à moins bien interpréter les trajectoires. Des erreurs aux conséquences lourdes avec déjà plusieurs expulsions à son actif.
Matthieu Dreyer se montre moins mobile. Reste plus proche de sa ligne et ne s'aventure que très rarement à couper les trajectoires du jeu long adverse. Une attitude plus prudente pour l'instant.
Balle au centre.
En conclusion, place à Dreyer ?
Deux options s'offrent à Laurent Batlles aujourd'hui. La première consisterait à renforcer Etienne Green en réaffirmant toute sa confiance en son jeune gardien. Nous l'avons détaillé à plusieurs reprises, l'aspect mental du jeune portier semble clairement atteint. Il semble indispensable de réaffirmer de manière officielle la hiérarchie du début de saison.
Une position que les dirigeants verraient sans doute d'un bon oeil afin d'optimiser les chances de voir sa valeur marchande se maintenir. Une position qui satisferait sans doute une majorité des supporters. A en croire un sondage que nous avons réalisé dernièrement, sur 562 votants, 72% estiment qu'Etienne Green doit retrouver sa place face à Grenoble. Contre seulement 28% pour qui les faveurs s'orientent vers Matthieu Dreyer.
SI on se penche rapidement sur les statistiques on constate qu'après 5 matchs chacun, Etienne Green est le second gardien le moins efficace du championnat avec seulement 50% de tirs stoppés (tirs reçus - buts encaissés / Tirs cadrés reçus). Pendant que sa doublure obtient 68,8% sur le même comparatif, avec le même nombre de tirs reçus.
Les Verts n'ont jamais gagné le moindre match avec Green en tant que titulaire. Aucun clean sheat. Alors que Matthieu Dreyer a déjà gardé sa cage inviolée lors de deux rencontres. Sans parler des deux cartons rouges écopés par Green qui ont eu des conséquences importantes (essentiellement à Pau).
Finalement, si on prend un peu de hauteur sur la situation, on peut dire que Matthieu Dreyer a été plus performant que son concurrent. Et sans être flamboyant. Loin de là. Placer Green sur le banc de touche impliquerait fort probablement de ne plus le revoir cette saison (ou plus) dans les buts stéphanois. La logique purement sportive où le meilleur joue pousserait Laurent Batlles à installer au moins jusqu'au mercato l'ancien lorientais. Une option que nous pensons qu'il prendra. Réponse le 1er octobre...
