Ovationné dans le Forez, la carrière de Yohan Mollo aura été compliqué. L'ancien milieu offensif de l'ASSE s'est longuement exprimé sur la mauvaise passe qu'il traverse dans une longue interview accordée à OVLM.

Yohan Mollo (Ex-ASSE) : "Le foot de haut niveau, oui, il y a du sportif, mais c'est surtout du business. [...] Je vais être honnête : tous les agents que j'ai eus dans ma carrière ont été des escrocs. Il ne faut pas se leurrer, les gars. Sur 100 % des agents, il y en a peut-être 10 % qui sont droits. Le reste, ce sont des escrocs. Quand ils viennent vous voir, pourquoi le font-ils ? Pour l'argent. Ce n'est pas parce que vous êtes beaux, mais parce que vous êtes bons, et parce qu'ils voient une opportunité de gagner de l'argent. Après, tout dépend de leur manière de faire. Soit, ils veulent faire de l'argent proprement, en vous aidant à en gagner aussi, soit ils veulent vous exploiter. Et malheureusement, la majorité cherchent à manger sur votre dos.

Souvent, un agent va vous proposer un agent immobilier, un conseiller financier ou un autre contact. Mais dans tout ce qu'il propose, il prend sa part, même si lui prétend être votre "grand frère" et vouloir votre bien. Je me souviens d'une anecdote, l'agent qui m'a escroqué, Franck Bichon, avec Patrick Blondeau. Une fois, on parlait d'Eboué qui avait tout perdu à cause de sa femme. Je lui dis : "Tu te rends compte, ce mec a tout donné et, du jour au lendemain, on lui a tout pris." Il me regarde et me dit : "Non, mais toi, tout est carré, t’inquiète, il ne t’arrivera jamais rien." À ce moment-là, j’ai eu comme un déclic. Je me suis dit : "Imagine, je passe 12 ans avec quelqu’un, je partage tout avec lui, et un jour, je découvre qu’il m’a trahi."

Le plaisir de partager

Yohan Mollo (Ex-ASSE) : "Je n’ai jamais eu une vie extravagante. J'ai eu un rythme de vie plutôt humble. Je n'ai jamais fait péter des Lambo. J’ai fait des plaisirs simples, surtout pour ma famille. Je partais en vacances avec 20 ou 25 personnes, ça coûtait 60 000 euros, mais c’était pour leur offrir des souvenirs inoubliables. Je suis issu d'HLM. C'était un peu les Tuches quand on partait en vacances. Pour moi, l’argent, c’était ça : donner de la joie à mes proches et se créer des souvenirs de fou ensemble. Je n'ai jamais eu ces envies de faire des cadeaux aux filles, des belles voitures, etc. Je n'ai pas eu ces vices.

Mais à la fin, mes contrats ont augmenté, et avec eux, mon train de vie. Je suis passé de 5 000 euros de dépenses par mois à 40 000 ou 50 000. Et là, les problèmes ont commencé : des cartes bancaires bloquées, des explications floues sur des débits différés. Pourtant, je gagnais 300 000 euros par mois. Je trouvais ça absurde. J'ai commencé à poser de plus en plus de questions. Mais j'étais en Russie, au Canada…, Je ne pouvais pas être sur place. Pour autant, ce n'est pas une seule personne qui m'a escroqué. C'était toute une bande organisée. "

Mollo, une identité usurpée

Yohan Mollo (Ex-ASSE) : "Le pire, c’est que j’ai découvert qu’on avait ouvert des comptes en banque à mon nom sans mon accord. Ce n’étaient même pas mes coordonnées sur les dossiers ! On a fait des prêts, acheté et revendu des biens immobiliers, et je n’étais même pas au courant. Ça s’est passé dans plusieurs banques, avec des notaires, des assurances-vie… Il a fait des attestation d'hébergement comme si je vivais chez lui. Il recevait les chéquiers, les CB…, Chez le notaire, il a acheté 12 biens sans moi et il les revend sans moi ! Il a fait des prêts à la consommation, des crédits immobiliers. Tout ça sans moi. Ils ont fait ça sans procuration. C’était une véritable bande organisée. J’ai remporté un premier procès, mais il y a eu appel. Depuis, ça traîne.

Sur mes comptes en France, il y a eu 6,7 millions d’euros qui ont transité. Mais à l’étranger, il y a encore des comptes que je ne peux pas localiser alors que c'est à mon nom. Le préjudice total est entre 10 et 15 millions d’euros.

C'est comme si j'avais travaillé 13 ans pour rien. C’est une question de justice. J’ai travaillé toute ma vie, je n’ai volé personne. Ce que je demande, c’est ce que je mérite. Être agent de joueur, c’est déjà très lucratif : un agent prend entre 7 et 10 % sur le salaire annuel d’un joueur, sans parler des primes à la signature. Mais certains vont plus loin : ils prennent des commissions avec les notaires, des pourcentages sur des prêts, etc. C’est un système vicieux. J'ai vécu un film."

Une affaire qui a brisé le joueur

Yohan Mollo (Ex-ASSE) : "J'aurais pu sombrer. Je me suis accroché pour ma famille. Je m'en fous de l'argent, c'est une histoire de respect. On m'a violé. Quand on te trahit à ce point, c’est une blessure qui ne part jamais. Aujourd’hui, je fais semblant d’aller bien pour ma famille, je garde la tête haute, mais émotionnellement, c’est dur. On a traversé des choses très compliquées avec mes parents. Je ne peux pas baisser la tête. J'essaie de ne pas véhiculer ma tristesse.

Le pire, c’est de me dire que je n’ai pas pu offrir à mes parents ce qu’ils méritaient. Rouler en Clio ou en Ferrari, je m'en fous. Porter du Channel ou du Puma je m'en fous. La seule chose qui m'attriste, c'est que mon père a 85 ans. On vit encore dans un HLM et il monte cinq étages à pied. J’aurais aimé lui offrir une belle maison, une retraite tranquille. L’argent, c’est juste un moyen d’apporter du bonheur aux autres. Ce qui compte, c’est de valoriser sa famille et ses proches. L’argent ne peut pas acheter l’amour. L'argent, c'est éphémère."