Cyril Linette souhaite prendre la place de Vincent Labrune à la tête de la Ligue de Football Professionnel. L’ancien DG de Canal + était l’invité de l’After Foot ce mercredi soir. L’occasion de dévoiler les contours de son programme pour le football français. Extraits.

Élection à la tête du football français mardi 10 septembre

Cyril Linette (candidat à la LFP) : « Vincent Labrune inscrit dans les statuts l’impossibilité d’avoir face à lui un concurrent. L’histoire est simple, […] globalement, il n’y avait absolument pas d’élection qui était prévue. Je me suis aperçu après m’être battu, après avoir discuté avec les présidents pendant quelques semaines, que j’avais un score quasi identique à celui du président sortant. Et j’ai compris que finalement les dés étaient pipés et que je ne pourrais pas être candidat. Je me suis battu, j’ai appelé la ministre des Sports, que je ne connais pas particulièrement. Je lui ai dit, vous êtes responsable de la démocratie dans le sport, de ses mandats. On a trouvé une solution imparfaite, mais ça me permet d’être candidat. Globalement, les choses étaient fléchées pour qu’il n’y ait pas de discussion possible dans cette élection et que ce soit une reconduction.

Vincent Labrune est un spécialiste. Il crée des crises. Et arrive en sauveur derrière. C’est classique. Il fait ça depuis longtemps et ça ne trompe personne à mon avis. »

Régler les urgences du football français

Cyril Linette (candidat à la LFP) : « Je suis un manager qui a tendance à ouvrir le capot et à voir ce qu’il faut faire. Il y a quelques sujets. Il y a un sujet de crise immédiate pour les clubs. Un problème de trésorerie. Il faut trouver des solutions, faire des économies à la LFP, trouver des solutions de financement pour les clubs. Les prêts, c’est bien pour les aider à passer une crise financière qui est terrible.

Je pense aussi qu’il faut aider DAZN parce qu’aujourd’hui c’est le partenaire. Peut-être le conseiller un peu plus dans sa politique commerciale qui me semble effectivement complètement déphasée. Je pense qu’ils n’ont pas eu le temps. Il faut aussi comprendre, DAZN, ils ont signé les droits 15 jours avant le début du championnat. Techniquement, c’est une prouesse. Ils sont à l’antenne. D’ailleurs, les équipes de LFP Média y sont pour beaucoup. Ils ont travaillé ensemble. Mais il est vrai que ça démarre très moyennement d’un point de vue commercial.

Il faut absolument trouver une solution pour qu’ils aient rapidement des offres plus attractives pour les clients, pour les supporters, les fans, parce que ça va être difficile.

Et puis il faut que BeIN signe son contrat, parce que le contrat entre BeIN Sport et le football français n’est toujours pas signé. Le contrat à 100 millions d’euros dont 22 millions d’euros de sponsoring. Donc il y a quand même des choses d’urgence à régler. C’est du management de crise.

Un système à revoir !

Ensuite, il y aura d’autres sujets. Le souci du foot français, il est structurel. On ne peut pas afficher un milliard de pertes par an hors transfert. 300 millions d’euros de pertes par an après transfert. Et considérer que le modèle va bien. Il repose sur le trading des joueurs et sur les droits TV. Les droits TV, c’est un mouvement mondial, vont globalement tous baisser. Le monde a changé et aujourd’hui, quand on est une ligue de sport, il faut penser à combien les jeunes seront-ils prêts à payer par mois dans 10 ans ? Est-ce qu’ils seront prêts à payer chaque mois ? Et combien ? Aujourd’hui, si on discute avec un jeune, on sait très bien que les prix, c’est 5 euros, 10 euros, 15 euros pour à peu près tout ce qu’il consomme. Ils ne sont pas prêts à payer des montants faramineux.

Le piratage, c’est la conséquence de l’aveuglement des ligues et pas la cause. Ce n’est pas le piratage qui va ruiner les ligues de sport, c’est parce qu’on n’a pas su s’y prendre. C’est un mouvement de bascule mondiale. Les bascules, par définition, ça va très vite. Dans quelques années, on ne pourra plus vendre des droits très chers. Sauf dans des offres groupées façon canal, où il y a tout un tas de contenus. Mais si on est sûr des contenus purement sportifs, il va falloir descendre les prix.

Il faut trouver un moyen pour le football français. Les ligues auront moins d’argent. Le marché des transferts va baisser aussi. Il y aura moins d’argent pour les clubs étrangers aussi, donc le trading des joueurs pour le football français va baisser. Nous sommes déjà en difficulté et  les deux principales sources de revenus vont baisser. Qu’est-ce qu’on fait ? On revoit les charges du football. On donne enfin un vrai rôle à la DNCG, un rôle réel de contrôle. Le football français n’a pas le choix.

Le retour de la Coupe de la Ligue ?

Cyril Linette (candidat à la LFP) : « Le football français doit beaucoup au Qatar et au PSG, qui remplissent les stades. Mais on a quand même un problème avec la surdomination du PSG. Quand on voit les droits TV aujourd’hui par rapport à il y a 12 ans, ça n’a pas créé ce qu’on a imaginé en termes de droits. Il ne s’agit pas de renier les aides du PSG et de l’empêcher de travailler. On ne va pas se raconter d’histoire. Le fait que le championnat soit joué d’avance, est un vrai sujet. Aujourd’hui, on s’intéresse à son club, on ne s’intéresse plus tellement au championnat.

J’ai regretté la disparition de la Coupe de la Ligue pour ça. On a arrété parce qu’il n’y avait pas de diffuseurs, pas d’argent. Puis les clubs européens ne voulaient plus la jouer. Ce que je comprends. C’est encore plus le cas avec le nouveau programme de la Champions League. Mais si les clubs européens ne jouent pas la Coupe de la Ligue, et qu’on remet la Coupe de la Ligue, sans les clubs européens, avec une place en Conférence Ligue au bout. Je pense qu’on donne quand même une possibilité à des clubs intermédiaires de faire des finales, de gagner une coupe, ce qui ne peut plus arriver.

On dit souvent que l’UEFA est un peu une machine à fric, mais quand ils créent la Conférence League, vous avez vu l’Olympiakos ? L’Olympiakos est un club qui n’a absolument plus aucune chance dans la Ligue des Champions aujourd’hui. Elle est très loin. Mais quand ils remportent la Conférence League, il y a 500 000 personnes dans les rues d’Athènes. C’est ça le foot ! »