C’est devenu une habitude à l’AS Saint-Etienne : Jouer sans véritable numéro 9 de métier. Des années que le club du forez peine à combler ce poste ô combien important dans une équipe de football.

On pourrait en sourire mais les difficultés durent depuis si longtemps que ça devient un sujet quelque peu désespérant. Trouver le fameux avant-centre. Le problème est tellement palpable qu’il n’est pas si simple de se remémorer les derniers « 9 » qui ont brillé sous le maillot Vert. Nous nous limiterons volontairement aux 10 dernières saisons afin de faire moins long qu’une chronique de Joss Randall.

Les 3 qui ont fait le job

Chouchou de Geoffroy Guichard, certains vous citeront rapidement Robert Beric. Chacun aura son point de vue sur le joueur mais son passage à Saint-Etienne restera en dents de scie. Débarqué pendant l’été 2015 en provenance du Rapid de Vienne, le slovène a gravement été blessé par le lyonnais Jordan Ferri : Rupture des ligaments croisés le 8 novembre 2015. Le slovène peinera à revenir. Il inscrira tout de même 34 buts en 104 apparitions entre 2015 et 2020. Des statistiques honorables. Mais un profil de renard des surfaces qui colle de moins en moins avec ce que recherche les coachs aujourd’hui : De la puissance, capable de gagner des duels et de prendre la profondeur. Une des raisons pour lesquelles il n’a pas été retenu lors de son départ à Chicago.

On continue de remonter le temps ! Mevlut Erding ? 2 saisons en Vert. De 2013 à 2015 c’est 20 buts en 65 rencontres. Un ratio plutôt intéressant pour l’attaquant turc. Mais là encore le profil ne collait pas précisément avec le dispositif de Christophe Galtier. Plus à l’aise dans une pointe à deux attaquants, le sochalien ne faisait pas l’unanimité. Ce qui ne l’a pas empêché d’être décisif.

Brandao ? Deuxième joueur le plus efficace de ces 10 dernières années avec 23 buts en 67 apparitions, le brésilien a laissé un très bon souvenir du côté de Saint-Etienne. Véritable point d’appui, il maitrisait son rôle de pivot à la perfection. Parfois maladroit, il formait la doublette la plus efficace de la décennie avec son compère Aubam’. 60 buts pour les Verts en L1, dont 30 pour le duo sur la saison 2012-2013. Un binôme parfaitement complémentaire qui a notamment permis à l’AS Saint-Etienne de remporter la Coupe de la Ligue.

Quand les "ailiers" prennent le relai

Dans ce malheur, il est devenu tradition chez les Verts que les autres offensifs se montrent plus décisifs que « l’attaquant de pointe ». Aubameyang, Khazri, Gradel, Bouanga ou encore Hamouma se sont souvent mutés en leaders offensifs. Bien qu’il soit tout à fait envisageable d’évoquer une complémentarité entre les différents profils, à l’image de Brandao qui libérait l’espace pour Aubam’, ne pas avoir un avant-centre qui dépasse les 10 buts en Ligue 1 depuis 9 ans pose tout de même question. (Erding 12 buts saison 2013-2014).

Meilleur buteur des Verts sur les 10 dernières saisons

  • 2011/2012 : Aubameyang– 16 buts
  • 2012/2013 : Aubameyang – 19 buts
  • 2013/2014 : Erding – 12 buts
  • 2014/2015 : Gradel– 17 buts
  • 2015/2016 : Roux: 9 buts
  • 2016/2017 : Hamouma: 7 buts
  • 2017/2018 : Cabella – 8 buts
  • 2018/2019 : Khazri– 13 buts
  • 2019/2020 : Bouanga – 10 buts
  • 2020/2021 : Bouanga & Khazri – 7 buts
  • 2021/2022 : Khazri: 9 buts

Des loupés à la pelle…

Maupay, Ricky, Soderlund, Roux, Diony, Modeste, Ramirez, Crivelli ?

Tous n’étaient pas des mauvais joueurs. Plusieurs ont montré des choses intéressantes sous le maillot Vert mais pas suffisamment régulier pour considérer leurs passages comme des réussites.

Les raisons de ces échecs sont diverses. Entre ceux qui n’avaient pas le profil pour jouer dans le système où ils ont été placés (Ricky, Roux, Maupay), les joueurs qui ne se sont pas adaptés (Soderlund, Ramirez, Diony) et les joueurs arrivés à court de forme (Modeste, Crivelli), l’AS Saint-Etienne n’a pas brillé par son recrutement à ce poste si essentiel.

Si le constat est alarmant sur ce poste, il s’explique essentiellement sur une mauvaise gestion des mercatos que nous ne pouvons que constater.

Lois Diony en est l’illustration parfaite. Plus gros transfert de l’histoire du club (environ 8M€). Il n’a jamais réussi à justifier l’investissement consenti sur lui. Les coachs successifs ont essayé de le placer sur l’aile et en pointe. En vain. Un flop qui a suivi Dominique Rocheteau (Coordinateur Sportif) et David Wantier (Responsable Recrutement).

Plus récemment il y a eu Anthony Modeste. Claude Puel voulait absolument l’égyptien de Zamalek Mostafa Mohamed. L’épisode a duré plus d’un mois. Une saga ponctuée par l’intervention du président Roland Romeyer à la Télévision égyptienne. Lunaire. Après s’être heurté à un entourage compliqué et aux exigences toujours moins raisonnables de Zamalek, les Verts ont dû abdiquer. Pressé par le temps, Anthony Modeste débarque en moins de 24 heures le 31 janvier 2021. Une arrivée facilitée par les bonnes relations entretenues avec son agent Etienne Mendy, ancien joueur du club. Modeste n’inscrira pas le moindre but. Au-delà du fait que le profil ne colle pas avec les attentes de Claude Puel qui espéré un avant-centre capable de prendre la profondeur, le joueur de Cologne ne sera titularisé qu’à 3 reprises. Il quittera prématurément le club pour se faire opérer d’une pubalgie le 21 avril dernier. Comme à son habitude, l’ASSE s’en sortira dans la course au maintien grâce à un autre offensif qui n’est pas un 9 de métier : Wahbi Khazri. La pilule passe d’autant plus mal que Modeste a retrouvé toute son efficacité depuis son retour en Allemagne : 15 buts en 25 matchs cette saison…

L’été dernier le peuple vert espérait logiquement l’arrivée d’un buteur pour pallier ce manque devenu chronique. Il aura fallu attendre les dernières heures du mercato pour voir débarquer Juan Ignacio Ramirez. Inconnu des supporters, ses statistiques en Uruguay faisait saliver. L’attente était telle que la grande majorité n’attendait qu’une chose : que Claude Puel l’aligne sur la pelouse. Encore une fois, le profil avait été imposé au coach castrais. Joueur de surface, pas ce que Puel souhaitait. Encore une fois, pas prêt physiquement en arrivant à court de forme suite à une blessure en juillet 2021. Encore une fois, un flop. 6 apparitions, 141 minutes jouées, aucun but inscrit. 4 mois plus tard il quitte le forez pour rentrer au pays.

Arrive alors le mercato hivernal 2022. L’AS Saint-Etienne est lanterne rouge de Ligue 1 avec 12 points au compteur. Les attentes sont immenses vis-à-vis de ce mercato. Un buteur est encore et toujours visé. Un premier nom sort et il fait plutôt l’unanimité : Jean-Philippe Mateta. Le board stéphanois a changé mais l’attaquant est suivi depuis de longs mois. Le profil colle avec les besoins des Verts. Physique, capable de jouer en pivot ou de prendre la profondeur avec une certaine adresse technique. Encore une fois ça n’ira pas au bout. Alors que le joueur est proche de rejoindre les Verts, il est aligné par Patrick Vieira. Auteur d’une prestation de qualité où il marque, le joueur est alors retenu par son club. Crystal Palace lèvera l’option d’achat. Il est régulièrement sur la pelouse en Premier League depuis. Encore une fois, l’ASSE doit recruter dans les derniers jours du mercato après avoir vu son plan A s’évaporer. Enzo Crivelli est prêté avec option d’achat la dernière semaine du mercato. S’il semble coller au profil puissant recherché, encore une fois les Verts recrute un joueur à court de forme. Lorsqu’il est arrivé il restait potentiellement 16 matchs à disputer pour Crivelli. Indisponible depuis, il n’en reste plus que 10…

Malédiction ou manque d'anticipation ?

La réussite d'un recrutement est tout sauf dû un hasard. Evidemment disposer des moyens financiers facilitent grandement les manœuvres. C'est en ce sens où la vente du club parait aujourd'hui inéluctable. Pour autant ce n'est pas une fatalité en soit. Il est possible de réaliser des coups intéressants même avec des moyens limités. Les raisons des échecs en matière de recrutement sont identifiables. Ils sont encore plus criant pour le poste de buteur qui reste le profil le plus recherché par les clubs (le plus bankable).

L'AS Saint-Etienne anticipe de moins en moins ses mercatos. Là où un club serein prépare dès le mois de février son mercato estival, les Verts ne savent pas où ils seront la saison prochaine. La situation sportive colporte des incertitudes qui ne facilitent pas l'anticipation.

Pour autant, la cellule de recrutement travaille au quotidien et observe un grand nombre de joueurs susceptibles d'apporter une plus-value à l'équipe. Mais quel profil viser ? Difficile à dire quand on ne connait pas l'entraineur qui orchestrera l'équipe la saison prochaine. Là aussi, loin d'être l'idéal pour préparer la saison prochaine.

Nous ne jetterons pas la pierre au nouveau board. Ils sont en poste depuis relativement peu de temps. Un timing complexe pour anticiper le dernier mercato hivernal. Le premier pour Loïc Perrein et Samuel Rustem... Pour autant l'avenir de l'AS Saint-Etienne dépendra de leur capacité à : Anticiper, se structurer, bien viser.

Sans perdre de vu l'objectif principal, rien n'empêche de préparer deux plans pour la saison prochaine afin de ne pas subir les évènements comme trop souvent. Sans changement, l'ASSE finira cette saison ou plus tard par descendre...

 

Top 15 des joueurs les plus efficaces sur les 10 dernières saisons (mini 20 apparitions)

  1. Pierre-Emerick Aubameyang: 41 buts en 97 apparitions = ratio 0.42 but/match
  2. Brandao: 23 buts en 67 apparitions = ratio 0.34 but/match
  3. Wahbi Khazri : 36 buts en 106 apparitions = ratio 0.34 but/match
  4. Robert Béric: 34 buts en 104 apparitions = ratio 0.33 but/match
  5. Mevlut Erding: 21 buts en 65 apparitions = ratio 0.32 but/match
  6. Max-Alain Gradel: 31 buts en 117 apparitions = ratio 0.26 but/match
  7. Denis Bouanga: 24 buts en 97 apparitions = ratio 0.25 but/match
  8. Ricky Van Wolfswinkel: 9 buts en 40 apparitions = ratio 0.23 but/match
  9. Nolan Roux: 16 buts en 77 apparitions = ratio 0.21 but/match
  10. Romain Hamouma: 61 buts en 316 apparitions = ratio 0.19 but/match
  11. Jonathan Bamba: 9 buts en 52 apparitions = ratio 0.15 but/match
  12. Loïs Diony: 9 buts en 65 apparitions = ratio 0.14 but/match
  13. Neal Maupay : 3 buts en 23 apparitions = ratio 0.13 but/match
  14. Arnaud Nordin : 16 buts en 136 apparitions = ratio 0.12 but/match
  15. Yohan Mollo : 9 buts en 78 apparitions = ratio 0.12 but/match
  16. Alexander Soderlund : 6 buts en 52 apparitions = ratio 0.12 but/match