Depuis son entrée fracassante sur le marché français, DAZN peine à s’imposer comme diffuseur principal de la Ligue 1, malgré un contrat à 375 millions d'euros pour retransmettre huit des neuf matchs de chaque journée. À ce jour, la plateforme n’a attiré qu’environ 500 000 abonnés, un chiffre bien en deçà des prévisions de Shay Segev, PDG de DAZN, qui espérait entre un million et 1,5 million d'abonnés six mois après le lancement. La stagnation du nombre d’abonnés témoigne des difficultés d’implantation de la marque, malgré une campagne publicitaire ambitieuse et des réductions de prix.

Cette situation a suscité de nombreuses critiques, y compris celles de l’ancien rugbyman international Hugo Bonneval, qui n’a pas mâché ses mots concernant la politique de DAZN dans l'émission "L'Equipe choc". « Leur approche a été mauvaise, voire catastrophique, » déclare-t-il, déplorant une stratégie mal ajustée aux réalités financières des ménages français. « Mettre un tel prix pour accéder uniquement à la Ligue 1, alors que la situation financière est difficile pour beaucoup de Français, c'est compliqué. » En effet, le coût de l'abonnement a été jugé élevé par de nombreux consommateurs, et même si DAZN a depuis proposé des réductions, certains abonnés qui ont payé le plein tarif initial se sont sentis lésés.

L'énorme flop de DAZN pour OM-PSG !

La rencontre Marseille-PSG, l’une des affiches les plus attendues du championnat, devait marquer un tournant pour DAZN et lui apporter un pic d’abonnements. Cependant, malgré l’ampleur médiatique de cet événement et les promotions offertes, le « Classique » n’a pas généré le succès espéré. « Ce match, annoncé avec beaucoup de publicité et des promotions, n’a pas eu l’effet escompté », rapporte dans L'Equipe, une source proche de DAZN. Alors que le diffuseur misait sur environ 90 000 nouveaux abonnés, l’opération a échoué à attirer cette audience supplémentaire.

Pire encore, le piratage, fléau majeur pour les diffuseurs, a fortement pesé dans la balance. Plus de 150 000 personnes ont suivi le match illégalement via des plateformes comme Telegram, illustrant l’ampleur de ce problème en France. DAZN a tenté de lutter contre ce phénomène, mais ses efforts n'ont visiblement pas suffi pour empêcher la diffusion illégale à grande échelle.

Pour Bonneval, les échecs de DAZN ne se limitent pas aux questions de prix et de piratage : la qualité des programmes est également un sujet de controverse. « Ce qu'ils proposent, ce n'est pas extrêmement qualitatif. Mettre des humoristes au bord du terrain, je trouve ça dramatique », explique-t-il.

Des humoristes remplacent les journalistes sportifs !

Selon lui, la couverture sportive devrait offrir un contenu enrichissant pour les fans de sport, et non une simple distraction. « Quand on aime le sport, on attend des informations, des anecdotes, pas des blagues », insiste-t-il. Bonneval, qui n’est pourtant pas fan de football, souligne l’importance d’un commentaire authentique et beaucoup plus professionnels pour immerger le spectateur dans l’univers du match et lui apporter un point de vue inédit. En revanche, DAZN a préféré intégrer des humoristes en bord de terrain, une approche qui a dérouté de nombreux amateurs de sport, en quête de commentaires d'experts. « Si je veux des blagues, je vais voir un spectacle », ajoute-t-il, exprimant ici le sentiment de frustration partagé par nombre de spectateurs.

Cette série d’obstacles commence à éroder la patience de Len Blavatnik, le milliardaire propriétaire de DAZN. Avec un investissement aussi conséquent dans le football français, les résultats tardent à se manifester, tandis que les pertes liées au piratage fragilisent davantage ce modèle économique. S’il n’atteint pas le cap d’1,5 million d’abonnés au 1ᵉʳ décembre 2025, DAZN pourrait invoquer une clause pour mettre fin au contrat dès la fin de la saison 2025-2026, bien avant son terme initial prévu en 2029. Cette même date de décembre 2025 constitue également une échéance pour la Ligue de Football Professionnel (LFP), qui pourrait choisir de rompre le partenariat si DAZN n’atteint pas le nombre d’abonnés prévu.

DAZN bientôt remplacé par une nouvelle chaîne ?

Dans ce scénario, la LFP serait contrainte de rechercher un nouveau diffuseur, ce qui pourrait s’avérer complexe. Amazon Prime Video, qui diffusait déjà la Ligue 1, avait rapidement atteint 1,7 million d’abonnés lors de sa première année en 2021. Malgré ses difficultés financières, Mediapro avait, de son côté, atteint 600 000 abonnés avec sa chaîne Téléfoot, sans même bénéficier du soutien de Canal+, contrairement à DAZN. Si aucun diffuseur n’accepte de reprendre le contrat, la LFP pourrait être amenée à envisager de lancer sa propre plateforme de diffusion, un projet risqué en termes d’infrastructure et de coûts de gestion, mais qui pourrait lui offrir un contrôle accru sur les revenus de diffusion.

Pour l’heure, DAZN semble pris dans un cercle vicieux : la stratégie de pricing agressif a certes permis d’augmenter l’audience, mais le niveau de piratage élevé et l’accueil mitigé du contenu produit continuent de nuire à ses perspectives. La LFP, quant à elle, pourrait rapidement se retrouver dans une position délicate si les performances de DAZN ne s’améliorent pas. Ce dernier aurait alors représenté un pari coûteux pour le football français, mais potentiellement éphémère.