La présentation des cinquante meilleurs joueurs de l’histoire de l’ASSE continue. Après vous avoir exposé les portraits des joueurs situés de la 21e à la 50e place par ordre alphabétique, nous vous révélons désormais ceux qui sont situés de la 20e à la première place. Cette fois-ci, ils seront publiés dans l’ordre décroissant. Après le 18ᵉ, Georges Carnus, place au 17ᵉ ! Hervé Revelli (402 matches, 214 buts de 1966 à 1971 et de 1973 à 1978), le meilleur buteur de l’Histoire des Verts.

Un transfert à l’ASSE après des négociations compliquées

Hervé Revelli est né le 5 mai 1946 à Verdun dans une famille qui a toujours accordé une large place au football. Ce qui caractérise les Revelli, c’est l’importance du clan dominé par un patriarche écouté et par des Frères qui veillent jalousement sur leurs intérêts. Il y a Roland l’aîné, Alain et Daniel qui a joué à un niveau honnête à Aix-en-Provence au poste d’arrière. Mais celui qui est en train de percer s’appelle Hervé dont les qualités d’avant-centre puissant et généreux sont en train d’attirer de nombreuses convoitises.

Pierre Garonnaire est alerté dès 1964 par un ami marseillais, Louis Dupic, journaliste au quotidien « Le Provençal ». Le recruteur stéphanois vient superviser le jeune joueur à Hyères où il dispute un match avec l’équipe de Gardanne. Derrière Garonnaire, les Frères sont présents car rien ne peut être négocié sans eux. L’avant-centre espoir a démontré un potentiel qui demande à être confirmé dans un environnement plus propice. Il accepte de venir effectuer un stage de huit jours dans le Forez sous la direction de Jean Snella qui décide, devant l’insistance de Garonnaire, de le tester à l’occasion d’une rencontre amicale contre Montélimar. Hervé Revelli joue la seconde mi-temps et marque le seul but de son équipe. Pourtant, il ne convainc pas entièrement l’entraîneur stéphanois. Il faut un second essai quinze jours plus tard contre Lyon pour que le jeune attaquant suscite l’adhésion définitive.

Le plus dur reste à faire : obtenir l’accord de la famille Revelli pour faire signer le prodige à l’ASSE. Les négociations s’engagent mal car d’autres clubs comme Nice, Marseille et surtout le Racing Paris ont déjà fait des propositions en monnaie sonnante et trébuchante. Garonnaire se retrouve autour d’une table, confronté au père, à la mère, Roland, sa femme, Alain, sa femme et Daniel. Ils avertissent que les Parisiens ont l’intention débourser la somme de 30 000 francs et d’offrir 1500 francs par mois à leur jeune frère. Saint-Etienne n’ira pas au-delà de 4 000 francs et 750 francs par mois. Toutefois, si Hervé Revelli fait ses preuves et qu’il obtient une sélection avec l’équipe de France B, il recevra 10 000 francs. S’il est appelé avec les A, ce sera 20 000 francs de plus. Dans un premier temps, c’est un refus catégorique même si chacune des parties accepte de s’accorder un délai de réflexion. Il faut tout le talent de Pierre Garonnaire, au pouvoir de persuasion légendaire, pour que les Revelli acceptent le contrat proposé par l’ASSE (pour la petite histoire, il est d’ailleurs rédigé par la femme de Roland Revelli).

Des débuts mitigés puis réussis pour Revelli

Les débuts d’Hervé Revelli sont mitigés à cause surtout d’un manque de sérieux de sa part qui handicape son apprentissage et sa progression. Roger Rocher, lui-même, ne croyait plus au potentiel de ce joueur. Il parie une voiture à Jean Snella que cet attaquant espoir ne sera pas international dans les deux ans. Les dirigeants stéphanois s’en émeuvent auprès des grands frères Revelli qui lâchent un laconique « on s’en occupe ».

La leçon a dû porter ses fruits puisqu’à partir de la saison 1965-66, Hervé Revelli fait des apparitions de plus en plus probantes au sein de l’effectif professionnel. Il joue 25 matches de championnat et inscrit 12 buts lors de cette première saison parmi l’élite. Sa carrière est lancée. Tout naturellement, il obtient sa première sélection avec l’équipe de France dirigée par le tandem José Arribas, Jean Snella le 28 septembre 1966 contre la Hongrie. Il signe son entrée en marquant le deuxième but de sa formation. La famille Revelli peut alors encaisser les 20 000 francs promis. Roger Rocher, grand seigneur, rajoutera les 10 000 francs qui auraient dû leur revenir s’il avait d’abord été sélectionné avec l’équipe de France B. Jean Snella paradera dans les rues de Saint-Etienne avec une voiture flambant neuve !

L’avant-centre stéphanois s’installe alors durablement parmi les meilleurs canonniers français. Dans une équipe qui truste les titres à partir de 1967, il s’illustre à la pointe de l’attaque où il forme avec Salif Keita l’un des duos les plus efficaces de l’histoire du club. Il est le meilleur buteur du championnat en 1967 avec 31 buts. Il récidive en 1970 avec 28 buts. En 1969, il obtient le titre de meilleur joueur français décerné par la rédaction du magazine France-Football.

Il devient un attaquant complet qui n’a pas d’équivalent sur le sol national. Cependant, il commence à s’ennuyer dans le Forez et en 1971. Il demande à être transféré espérant profiter de son statut pour réaliser une intéressante opération financière. Autant Roger Rocher s’était montré intransigeant avec Roger Carnus et Bernard Bosquier, autant il se montrera d’une étonnante docilité avec son attaquant. Il accepte avec une surprenante facilité son transfert à l’OGC Nice qui mettra le prix pour acquérir l’attaquant international et le défenseur espoir Francis Camerini. On se quitte alors en bon terme, ce qui aura son importance deux ans plus tard.

Un retour en fanfare à l’ASSE

Deux ans plus tard, Robert Herbin a besoin d’un élément d’expérience sur le front de l’attaque de son équipe pour encadrer cette nouvelle génération qui est en train d’éclore. Le retour d’Hervé Revelli, qui a l’avantage de bien connaître la maison, semble être la solution idéale. Il donne son accord verbal à Roger Rocher. Monaco tente la surenchère avec une offre bien plus importante, mais l’attaquant est un homme de parole. Il préfère la respecter malgré le manque à gagner. Pour remercier cette fidélité, le président stéphanois, qui a eu vent de la proposition monégasque, acceptera de s’aligner sur les conditions financières du club de la Principauté.

Hervé Revelli est un guide pour ses jeunes joueurs et notamment son frère, Patrick, avec qui il va constituer un duo très efficace. L’ainé de la fratrie en profite pour franchir la barre des 200 buts inscrits en championnat le 9 février 1975 contre Sochaux. Il participe pleinement à l’épopée de l’ASSE dont il joue la finale contre le Bayern de Munich à Glasgow le 12 mai 1976. Quel dommage qu’il n’est pas converti la formidable occasion suite à la frappe sur la barre transversale de Dominique Bathenay. Sa tête trop molle a atterri dans les gants du gardien allemand, tout heureux de voir le ballon arriver sur lui.

Il ne le sait pas encore, mais cette rencontre constitue son apogée. Les années suivantes seront plus difficiles pour l’avant-centre qui perdra peu à peu la confiance de son entraîneur. Il n’en reste pas moins le meilleur buteur de l’histoire de l’ASSE et un de ses meilleurs avant-centres. Il reste le troisième meilleur buteur du championnat de France avec 216 buts inscrits de 1965 à 1978. Pour toutes ces raisons, il a marqué les supporters stéphanois et sa place dans les vingt meilleurs joueurs du club est plus que méritée.

Par Albert Pilia