À l’occasion des 90 ans de l’AS Saint-Etienne, le site Peuple-vert vous propose le portrait des 50 meilleurs joueurs de l’ASSE parmi les 773 qui, depuis 1933, ont un jour porté le maillot vert. De la place 50 à 21, les joueurs classés seront présentés par ordre alphabétique.
GERARD FARISON (412 matches, 7 buts de 1968 à 1980) Meilleur « Ouvrier » de Saint-Etienne
RÉVÉLÉ SUR LE TARD
Gérard Farison est né le 15 mars 1944 à Terrenoire, une commune ouvrière limitrophe de Saint-Etienne. Il connaît donc bien les valeurs de la région qu’il incarne à la perfection. À 17 ans, il intègre l’ASSE dans l’équipe junior avec laquelle il remporte la première coupe Gambardella de l’histoire du club en 1963. Malgré cet exploit, cette génération ne parviendra pas à franchir le cap du professionnalisme chez les Verts sauf l’attaquant Gérard Epalle (13 matches seulement) et ensuite Gérard Farison, ailier gauche devenu arrière gauche par défaut.
Dans l’immédiat, il a du mal à percer, barré par Georges Polny qu’il ne parviendra à déloger que lors de la saison 1971-72. Il a déjà 27 ans. Entretemps, Jean Snella ne lui fait guère confiance et il cumulera un travail d’ouvrier sur métiers à tisser et son activité de footballeur qui reste un loisir jusqu’en 1967, date à laquelle il signe son premier contrat de stagiaire à 23 ans au départ de l’entraîneur mythique qui n’a jamais véritablement cru en lui.
Cette saison-là, il joue son premier match avec les Verts à la 38e et dernière journée du championnat, le 5 juillet 1968 à Lens (3-1). Il ne sera de nouveau titularisé qu’un an plus tard, le 6 août 1969 à Geoffroy-Guichard contre Ajaccio (3-1), une saison qui sera plus prolifique pour lui avec 11 matches à son compteur, celle où l’ASSE remportera son dernier titre de champion de France sous l’ère Batteux.
Suffisant pour signer son premier contrat en 1970 à 26 ans. On notera tout de même que ces apparitions lui permettent de remporter ces deux premiers titres de champion de France en 1968 et 1970.
FARISON, TITULAIRE A 26 ANS
L’heure de Gérard Farison a sonné à partir de la saison 1970-71 où il devient un titulaire à part entière, même si elle coïncide avec la fin de l’hégémonie de l’ASSE qui perd son titre de champion de France qu’elle détenait depuis quatre années d’affilée. Il peut faire valoir ses qualités physiques monstrueuses qu’il met au service d’une défense, certes un peu moins impériales qu’à la fin des années 1960 surtout depuis le départ à Marseille du gardien Georges Carnus et du défenseur central Bernard Bosquier.
L’AS Saint-Etienne a besoin d’entamer un nouveau cycle incarné par la promotion surprise en 1972 d’un tout jeune entraîneur, Robert Herbin, qui était encore joueur des Verts la saison précédente et qui a démarré sa carrière dans le Forez en 1957.
Inspiré par le football total de l’Ajax Amsterdam, vainqueur de trois coupes d’Europe des clubs champions consécutives en 1971, 1972 et 1973, et misant sur la valeur athlétique des joueurs, il va vite s’apercevoir que l’arrière gauche stéphanois a toutes les qualités pour devenir un des meilleurs spécialistes du poste.
Sous sa conduite, il sera l’un des premiers contre-attaquant de l’équipe, capable de répéter les allers-retours à l’infini dans son couloir. Il est ainsi un des premiers défenseurs modernes français avec des performances physiques et athlétiques inconnus jusqu’alors dans l’hexagone.
Il est un des membres essentiels d’une équipe qui remporte trois titres de champions de France à la suite en 1974, 1975 et 1976, agrémentées de trois coupes de France en 1974, 1975 et 1977.
Il n’est pas le plus connu des joueurs de cette génération, lui, le travailleur infatigable, mais il s’avère aussi indispensable que les stars de l’époque représentées par Yvan Curkovic, Osvaldo Piazza, Jean-Michel Larqué ou le jeune Dominique Rocheteau dont les photos ornent les couvertures des magazines spécialisés.
GLASGOW, UNE ABSENCE CRUELLE
Gérard Farison est surtout l’inamovible arrière gauche des exploits en coupe d’Europe en 1974-75 et 1975-76 qui ont fait la légende des Verts. Il est présent face à l’Hajduk Split en 1974 et le mémorable 5-1 qui a lancé l’épopée. Il est, bien sûr, titulaire contre le Dynamo Kiev (0-2 et 3-0) et le match épique à Geoffroy-Guichard qui s’est terminé par des prolongations restées dans toutes les mémoires. Il est, évidemment, le défenseur infranchissable contre le PSV Eindhoven en demi-finale (1-0 et 0-0) qui a ouvert les portes de la finale contre le Bayern Munich, une rencontre qui pourrait être considérée comme son apothéose.
Il est sur un petit nuage, d’autant plus qu’il a honoré le 24 avril 1976, à 32 ans, sa première sélection avec l’équipe de France contre la Pologne (2-0) en compagnie de Jean-Michel Larqué, Christian Synaeghel et Patrick Revelli. Malheureusement, la foudre va lui tomber sur la tête à la suite d’un match de championnat en retard à Geoffroy-Guichard contre Nîmes le 4 mai 1976. L’entraîneur des Gardois, Kader Firoud, n’est pas réputé pour faire dans la dentelle.
Il exhorte ses joueurs, qui n’ont pourtant rien à gagner, bien ancré dans le ventre mou du classement, à mettre le pied, comptant sur le fait que les Stéphanois vont s’économiser pour leur finale qu’ils disputeront une semaine plus tard. C’est mal connaître les Stéphanois qui vont répondre au défi physique, manger les « Crocos » (5-2) mais qui vont perdre deux joueurs sur blessure, Christian Synaeghel et Gérard Farison, découpés par leurs adversaires.
La mort dans l’âme, il est obligé de déclarer forfait pour la finale qui aurait dû être sa consécration au plus haut niveau. Qui sait ce qui aurait pu se produire avec la présence de ses joueurs considérés comme indispensable ? Il est fort à parier qu’on n’aurait jamais entendu parler des poteaux carrés.
Jusqu’en 1980, il ne laissera à personne le plaisir d’animer son couloir gauche, aux côtés des Michel Platini ou Johnny Rep, des stars qui ne se lasseront jamais de le voir défendre et centrer, comme il le fera encore un soir du 7 novembre 1979 pour l’un de ses derniers exploits européens contre le PSV Eindhoven, atomisé 6-0 à Geoffroy-Guichard. Fort de ses 412 matches sous le maillot vert et 7 buts, ce qui en fait le 5ᵉ le plus capé derrière Christian Lopez, Loïc Perrin, Robert Herbin et René Domingo, il représente la quintessence des valeurs stéphanoises dont il est un dernier grand représentants. Normal alors de le retrouver parmi les 50 meilleurs joueurs de l’histoire de l’AS Saint-Etienne.
By Albert Pilia