Pour acheter (et donc vendre) un club de football, cela peut prendre des mois, voire des années. L'ASSE est en plein processus de vente et hier soir, Romain Molina (journaliste d'investigation spécialisé dans le football), a livré les dernières information s'agissant de la vente du club stéphanois. L'occasion de rappeler les différentes étapes qui jalonnent la vente d'un club.
Un club, ce n'est pas un kilo de tomates (même si parfois ces dernières volent bas sur le premier nommé lorsque les résultats ne suivent pas !). Ainsi, lorsqu'il s'agit de racheter un club de football, il y a des étapes à respecter. Actuellement, l'ASSE en est à celle de la négociation exclusive avec un potentiel acheteur, à savoir David Blitzer.
"Dans l’actif d’un club de foot figure une équipe composée de joueurs, et ces derniers ne sont pas des salariés "normaux", ils sont tous en CDD, c’est une population un peu atypique", expliquait l’avocate associée du Cabinet Taj, Muriel Féraud-Courtin, dans les colonnes de L'Equipe il y a quelques années.
Il est ainsi très difficile d'évaluer le prix de rachat d'un club de football. "La vraie valeur d’un club, c’est celle qu’un vendeur accepte de récupérer ou celle qu’un acheteur consent réellement prêt à mettre. Quand vous voulez vendre vite, ce n’est jamais là que vous réaliserez la meilleure vente", indique le président de l'Observatoire du football business, Vincent Chaudel.
"Parfois ça capote parce qu'on se rend compte de la véritable situation financière du club !"
Les étapes qui mènent à la vente sont les suivantes :
1- Le club nomme un mandataire : s'agissant de l'ASSE, c'est le cabinet KPMG qui a été mandaté.
2- Une plaquette de présentation précise toutes les caractéristiques du club dans les domaines financiers, sociaux, fiscaux, juridiques... Soit le potentiel acheteur est satisfait de cette présentation, soit il décide lui-même d'entrer dans une phase plus concrete et se positionne auprès de l'acheteur.
3 - Le repreneur potentiel prouve le sérieux et la solvabilité de son approche en fournissant les pièces demandées à KPMG. L'organisme vérifie avant d'ourvir l'accès à la Data Room.
4 - Une data rom est mise en place (elle existe depuis plusieurs mois à l'ASSE et a déjà été consultée par d'autres potentiels repreneurs... «La data room intervient quand on a identifié des acheteurs sérieux, précise Vincent Chaudel. Parce que vous vous mettez à nu, donc vous n’avez pas envie de le faire douze fois. Il faut une volonté réelle et sérieuse de rachat.»
Le vendeur met à disposition les données qu'il souhaite communiquer dans la Data Room.
5 - Place à l'étape de "due diligence" afin d'obtenir davantage de précisions. Le repreneur potentiel creuse les différents éléments. C'est à cette étape que se trouve David Blitzer, ce qui a motivé la venue d'une délégation dans les bureaux de L'Etrat cette semaine.
Romain Molina confirme : "St-Etienne est sans doute le club qui fait le plus parler. Il y a une délégation du groupe Blitzer qui est venue. Ils font le "due diligence" (ndlr : les vérifications nécessaires). Ils sont en train de tout vérifier. Ce que je ne sais pas, c'est jusqu'à quand. Je sais qu'ils sont en négociation exclusive avec Roland Romeyer et Bernard Caïazzo, comme cela avait déjà été le cas avec d'autres fonds qui s'étaient déjà essayé au rachat de St-Etienne. Parfois ça capote parce qu'on se rend compte de la véritable situation financière du club, qu'il y a peut-être quelques cadavres dans les placards, ou alors il y a aussi les propriétaires qui vont subitement réclamer plus d'argent alors qu'un deal avait été trouvé."
Cette étape c'est un peu la même chose que lorsque vous vendez votre voiture. Vous commencez à donner certaines informations comme les factures d'entretien et l'historique de votre véhicule que lorsque vous avez l'impression d'être face à un racheteur sérieux...
Romeyer et Caïazzo attendent une offre rapide !
6 - Il faut ensuite que toutes les parties s'entendent sur un montant, et c'est là que les choses (encore plus) sérieuses commencent...
Romain Molina poursuit : "Ce qui est certain c'est qu'ils se sont déplacés cette semaine. Aucune offre n'a pour l'instant été faite. Les dirigeants de St-Etienne en attendent une assez rapidement. Sera-t-elle acceptée ? Je n'en sais rien ! Quoiqu'il en soit, vu ce qu'il s'est passé ces dernières semaines et selon ce que j'ai pu entendre du côté de St-Etienne, le prix de rachat ne peut pas être très très haut.
Quand tu rachètes l'ASSE, qui est un club mythique et très intéressant à racheter, sa situation financière pose problème. La descente en Ligue 2 n'avait absolument pas été planifiée. Un club comme St-Etienne ne peut pas rester en Ligue 2 très longtemps, du fait notamment de son déficit structurel. Ainsi, tu sais que tu vas devoir remettre, remettre et remettre la main au pot pour combler ce déficit. Quid à ce sujet là ? Il n'y a donc pas encore eu d'offre mais il y a des négociations exclusives... Je ne suis toutefois pas dans le secret des Dieux..."
Les émissaires de Blitzer ont visité les infrastructures du club...
La venue de la délégation à St-Etienne avait notamment comme objectif de découvrir les structures immobilières et mobilières du club. Le Progrès précise que les émissaires de David Blitzer sont arrivés mercredi et ont poursuivi leur visite hier. Ils ont pu notamment découvrir le centre de vie Robert-Herbin, le stade Geoffroy-Guichard et le musée des verts. L'Equipe rajoute qu'ils étaient accompagné d'un représentant du cabinet KPMG.
Une semaine qui aura vu L'Etrat accueillir un autre visiteur moins sympathique puisque le club a été perquisitionné afin de saisir des documents potentiellement compromettant dans une affaire d'agents de joueurs non licenciés... Un timing un peu gênant mais dont il nous a été confirmé que cela n'aura pas d'impact sur le processus de vente en cours.
Une (bonne ?) nouvelle pourrait tomber d'ici la fin du mois. C'est en tout cas la volonté de tous, à commencer par les supporters. Mais comme évoqué précédemment par Romain Molina, nos deux présidents sont parfois imprévisibles et une montée des enchères serait à n'en pas douter pas du goût de David Blitzer qui a la réputation d'être aussi compétent que dur en affaires... L'Equipe précise que la rencontre qui a eu lieu cette semaine entre la délégation de Blitzer et Roland Romeyer ne s'est pas très bien déroulée. Pas de quoi entraver le processus de rachat toutefois. Le quotidien précise qu'en cas de rachat du club, un nouveau directeur général pourrait venir remplacer Jean-François Soucasse... Il s'agirait d'un profil correspondant à Gauthier Ganaye (34 ans) qui possède déjà un long passé dans le football puisqu'il a déjà tenu des rôles à Lens, Barnsley, Nice, Oostende et Nancy. Un profil qui pourrait également correspondre à celui d'Aymeric Magne (39 ans), qui officiait à Disneyland Paris avant que le City Football Group ne le place comme directeur général à Troyes en 2021.