Le procès des onze supporters de l'ASSE, accusés d'avoir introduit, détenu et/ou lancé des fumigènes, d'être entrés sur l'aire de jeu et, pour cinq d'entre eux, d'avoir commis des violences contre des stadiers et policiers, à l'intérieur et aux abords du Chaudron lors de la rencontre ASSE-AJA du 29 mai dernier, s'est tenu hier au tribunal correctionnel de Saint-Etienne. Retour sur les échanges entre les différentes parties. Le délibéré sera rendu le 23 novembre. Jusqu’à huit mois ferme et cinq ans d’interdiction de stade ont été requis.
Ils ont entre 21 et 34 ans et se sont succédé hier à la barre du tribunal correctionnel de St-Etienne devant Stéphanie Perrin, la présidente. Issus principalement des groupes MF91 ou GA92, ils ont tantôt exprimé leurs regrets, leur incompréhension face à leur propre comportement voire leur honte. Ils sont tous des citoyens lambda : pompier, gérant d'entreprise, artisans, commercial...
Il y a ces citoyens d'un côté et les soirs de match, les supporters. Le 29 mai dernier, c'est en jouant leur rôle de supporter que tout a basculé. "Avec le recul, dit-il, je suis allé trop loin. Je pensais arriver à me contrôler, mais il faut que j'arrête d'aller au stade. Il y a sûrement un petit problème quelque part. Peut-être même un gros." explique l'un d'eux. "C'est difficile à expliquer. Ma tête a vrillé" avance l'autre...
Tous expriment leur incompréhension face à leur comportement qui aurait pu entraîner de graves blessures.
Parmi les onze prévenus, le président des MF91
Le président des Magic Fans 91 a comparu. Les propos sont rapportés par Jérémy Marillier pour France Bleu St-Etienne :
Une vidéo est diffusée, montrant le responsable des Magic dans le Kop Nord juste avant les incidents. Un drapeau est déployé près de lui, il se retrouve en dessous. "Pour dissimuler qlq chose, un besoin d'intimité?", demande le Tribunal. "Je ne faisais pas grand chose", dit-il.
"Pourquoi rester si longtemps sous ce drapeau?", demande la présidente au responsable des Magic Fans. "Je ne voulais plus voir la séance de tirs au but et la descente du club", assure-t-il.
Questionné sur un possible changement de tenue juste avant les incidents sous ce drapeau déployé dans le Kop Nord, le responsable des Magic Fans nie s'être changé.
Le Tribunal interroge le responsable des Magic Fans sur le danger des engins pyrotechniques, de leur usage, lui qui dans la vie est pompier. Le prévenu répond que ce qu'il s'est passé au stade ce soir-là "pouvait être dangereux".
Bien qu'il assure ne plus avoir touché personnellement à des fumigènes depuis plusieurs années, le responsable des Magic avoue avoir autorisé son groupe à en entrer dans le stade ce soir-là. Il plaide aussi "l'excès de passion des supporters face à la descente".
"Pas contradictoire de se dire supporter et d'agir de la sorte quand cela ne va pas? Réagissez-vous pareil quand vous êtes déçu dans la vie", demande le Tribunal au responsable des Magic. "Pas grand-chose ne me déplait", dit-il. "Vous avez de la chance", rétorque la Présidente
"Je ne pensais pas que la situation pouvait dégénérer ainsi", ajoute le responsable des Magic Fans.
"Nous n'avions prévu qu'une seule animation ce soir-là, en début de rencontre. Rien d'autre n'était prévu par le groupe", déclare le responsable des Magic Fans.
"En tant que responsable des Magic Fans, prenez-vous une part de responsabilité moral dans ces incidents?", demande le Procureur. "Non, nous ne sommes pas les papas et les responsables de tous les supporters. Le groupe n'a rien à voir avec ces agissements."
Le responsable des Magic Fans retourne s'asseoir.
Plus de 500 000 euros de dégâts
Comme le président des MF91, les dix autres prévenus ont pu expliquer leur comportement ce soir-là. S'il n'y a pas pas eu à déplorer de blessés, les dégâts matériel ont en revanche été nombreux et ont coûté cher.
Le journal Le Progrès liste le coût des dégradations de la soirée qui ont causé pour plus de 500 000 euros de dégâts :
"- 6 000 euros : le matériel urbain dégradé autour du stade, et pour lequel la Ville de Saint-Etienne s’est portée partie civile.
- 80 000 euros : les sièges, les câbles et la moquette brûlés à l’intérieur du stade, pour lesquels Saint-Etienne Métropole s’est portée partie civile.
- Entre 450 000 et 500 000 euros : les panneaux publicitaires lumineux dégradés autour de la pelouse. Les assurances du club ont remboursé le prestataire (Sport 5) mais l’ASSE réclame le dédommagement de la franchise (1 700 euros)."
Les avocats de la défense ont tenu à rappeler qu' "on a déjà connu des faits beaucoup plus graves. Il y a eu des agissements plus graves commis à l’extérieur du stade ce soir-là (N.D.L.R. : des affrontements avec les forces de l’ordre), et aucun de ceux ici présents n’en sont responsables".
Me Laure Salomon explique dans des propos rapportés par Le Progrès "qu’on ne juge qu’une poignée alors qu’il y avait des centaines de personnes qui se sont rendues coupables d’infractions ce soir-là".
Enfin, toujours dans des propos rapportés par le quotidien régional, Me Franck-Olivier Lachaud indique qu' "il n’y a pas de volonté de faire mal. C’était disproportionné, mais ils voulaient faire passer un message, car ils sont extrêmement déçus par les résultats et la gestion de ce club."
L'ASSE tient à marquer la limite entre le club et les supporters
De son côté, l'ASSE s'était constituée partie civile et s'est exprimée via son avocat, Me Olivier Martin.
"Il n’y a ni complicité bienveillante, ni négligence vis-à-vis des supporters." explique-t-il, avant de rajouter que ces hommes "sont des délinquants". Il tient à placer une limite entre les supporters et le club. Les deux ne se confondent pas selon lui. L'ASSE, par cette intervention, a donc tenu à prendre ses distances avec ses supporters afin que se décolle d'elle l'image d'un club qui entretient une relation ambigüe avec ses groupes.
de son côté, le LFP voit en ces évènements des incidents qui ont entraîné pour elle "un préjudice d’image. Le football a besoin de ses supporters mais la violence s’est insérée dans les tribunes, à Saint-Etienne comme à Marseille, Lyon ou Paris, et il faut l’éradiquer".
Le délibéré sera rendu le 23 novembre prochain.