L'AS Saint-Etienne traverse à nouveau une triste page de son histoire. Laurent Batlles débarqué en attendant l'arrivée d'Olivier Dall Oglio. Jessy Moulin, ancien portier des Verts, aujourd'hui chroniqueur dans le Sainté Night Club s'est exprimé hier soir. Extraits.

Des circonstances atténuantes pour Laurent Batlles

Jessy Moulin : « Le match de Guingamp, c'est triste de voir partir le coach sur ça. Parce que je pense que ça ne reflète pas non plus la totalité de ce qu’il a pu faire au club. Quand on repense aux 6 derniers mois qu’il y a eu la saison dernière, la série qui avait pu être entamée cette saison, même s’il n’y avait pas un jeu de folie… C’est assez triste de voir partir un coach comme lui, avec de telles valeurs sur un match comme ça. »

Il est arrivé dans un contexte difficile, Laurent. L’année dernière, il arrive alors que c’est un choc pour tout le monde de voir l’ASSE descendre. Une équipe en complète reconstruction, avec des choix qui ont été faits.

C’est difficile de faire tout de suite les bons choix pour les personnes qui dirigent le club. Il faut se rendre que quand un club comme Saint-Étienne descend en Ligue 2, il y a une attente qui est incroyable. Il y a une pression énorme pour les dirigeants pour reconstruire une équipe. Tout le monde veut remonter le plus rapidement possible, c’est évident.

Donc le coach est arrivé dans un contexte ou c’était déjà très dur pour lui, il arrive avec 3 points de retrait, des débuts un peu poussif. Mais on a quand même vu, sur la longueur d’une saison l’année dernière, qu’il était capable de faire jouer son équipe et de prendre des points régulièrement. Il a tout de même fait une super fin de saison. Il ne faut pas oublier qu’il perd trois de ses meilleurs joueurs cet été, et qui n’ont pas été spécialement remplacés.

On espère toujours que les recrues soient au même niveau, mais ça n’a pas été le cas. Il a aussi dû beaucoup bricoler cette année pour jouer. Dès qu’il y avait la moindre blessure, il n’y avait pas la profondeur de banc… C’était dur aussi pour lui. Moi, ça me fait beaucoup de peine de voir partir le coach maintenant. Le club a jugé que c’était le moment. Ça va donner un coup de fouet parce que les joueurs veulent prouver de suite, quand il y a un nouveau coach, ils veulent montrer d’autres choses. Donc j’espère que ça donnera raison aux dirigeants et que ça fera repartir le club. Parce que l’arrivée, ce qui compte, c’est le club.

Laurent Batlles, un coach qui dit les choses

Laurent, je l’ai connu en tant que joueur, coéquipier et je l’ai connu en tant que coach à Troyes. C'était quelqu’un qui arrivait à parler sur terrain. Il criait, il y avait surement moins de bruit à Troyes dans le stade donc il pouvait nous faire comprendre les choses. Mais tu arrivais au vestiaire, à la mi-temps ou à la fin des matchs, c’est un coach qui a toujours dit les choses et qui était capable d’être virulent, de réveiller, de piquer.

Mais ça n’était pas le coach qui le faisait devant les caméras pour dire « voilà, regardez, je fais mon boulot ». Non. Lui, il a des vraies valeurs. Je ne dis pas que les autres n’en ont pas, mais moi, je sais que Laurent a des vraies valeurs humaines. Quand il va nous dire des choses, il va préférer nous les dire entre quatre yeux plutôt que de les dire de façon à ce qu’on voit publiquement qu’il fait son boulot.

Il y a des choses qu’il préfère dire dans le vestiaire pour que ça reste dans le vestiaire. Des fois, on a l’impression qu’il n’a pas la réaction adéquate, mais en tout cas à l’entrainement, à la mi-temps ou à la fin d’un match, c'est un coach qui dit les choses et qui met les formes quand il faut.

Un vestiaire marqué

Des échos que j’ai un peu eu, dans le vestiaire quand il y a eu l’annonce, il y a eu beaucoup de joueurs qui ont été peinés. Il y en a qui ont pleuré de déception parce que c’est quelqu’un d’apprécié. Rares sont les joueurs à qui ç'a fait ni chaud ni froid. Il y en a eu un ou deux, sinon la majorité des joueurs était très déçue.

J’ai vu des photos de Gautier Larsonneur, des messages de soutien. Dans un vestiaire, c'est comme ça, ça fait toujours de la peine de voir partir quelqu’un avec qui on partage le quotidien, parce que les joueurs donnent le maximum et savent qu’ils sont aussi fautifs. Puisque s’il n’y a pas de résultats, c'est parce que sur le terrain, on n’est pas aussi bon que ce qu’ont peut-être ou qu’on n’y arrive pas tout simplement.

Et là, c'est le coach qui trinque. Ça fait de la peine, on se sent aussi coupable. D’autant plus quand c’est quelqu’un qui a du respect pour ses joueurs, qui est très sérieux et qui a envie de tout donner pour un club qu’il aime et où il a aussi joué.

Des joueurs qui doivent réagir

Moi, j'ai envie de voir le verre à moitié plein. C’est qu’on voit quand même que la direction essaye de ne pas faire les mêmes erreurs. Ils savent que ce n’est pas un Dupraz qu’il fallait, que ça n’est pas quelqu’un avec une poigne extrême comme Claude Puel. Ils ont cherché quelqu’un qui peut remettre le groupe en confiance, qui est proche des joueurs. On sait qu’Olivier Dall’Oglio c’est quelqu’un qui est apprécié au sein d’un vestiaire. Il est français, il connait le championnat. Il a joué le maintien, il a joué une montée. Il a quand même une certaine expérience, et c’est vrai qu’il ressemble au profil de Laurent Batlles avec plus d’expérience. »

« Il y a des joueurs, pour moi, je pense, qui signent à Sainté sans se dire « putain, ça va être dur quand même ». Ils se disent « ah, c'est bien, c'est Sainté, sur le CV, c'est magnifique, je signe ». Mais il faut savoir que là, le public, eux, ce qu’ils attendent, pour eux, un match de foot, que ce soit Ligue 1, Ligue 2, National, Europa League, à Geoffroy-Guichard, un match de foot, il faut se donner à 200 %. Sinon ça gronde.

Et là, quand ça gronde, c'est plus compliqué. Il faut savoir où on met les pieds aussi quand signe à Sainté. Il faut que les joueurs sachent qu’ils signent à Sainté, ça n’est pas un club qu’ils ont connu avant. Parfois, quand ça commence à gronder, c’est plus difficile de montrer son vrai niveau et d’être le plus à l’aise possible. »

Jouer à Sainté reste particulier

« On voit qu’on a cinq défaites d’affilée, et tu as les Kops qui sont pleins et qui gueulent encore. C’est incroyable. C’est beau, mais ça met la pression. C’est contradictoire. Il y a ceux qui disent « c’était mon rêve toute ma vie de jouer là-dedans, c’est magnifique, je me surpasse grâce à ça » et puis il y a peut-être ceux qui disent : « si je fais mal, je vais être sifflé… ».

« À Saint-Étienne, il faut se donner pour les salariés qui sont là, qui peuvent risquer de partir si le club descend ou si le club ne remonte pas. Il faut être bien conscient que quand on signe à Saint-Étienne, il y a tout ça. Les salariés, on les voit tous les jours. À mon époque, on mangeait avec eux. Si on arrivait le week-end et que c’était chaud, on se disait « oh les gars, il y a telle ou telle dame à la com’ ou la billetterie, peut-être que si on descend, attention, il faut se bouger le cul ».

Il faut aussi que les joueurs prennent leurs responsabilités à un moment donné. On tape souvent sur la direction, sur l’entraineur… Mais au bout d’un moment, on peut passer à travers, c’est normal, mais il ne faut pas se cacher. Si on n’a pas envie ou si on est là pour autre chose que pour mouiller le maillot, il faut mieux partir que de rester là pour dire « je suis à l’AS Saint-Étienne, je prends mon contrat.».   Ce n’est pas respecter le club. Ce n’est pas respecter le maillot. Et ça aussi, ça fait mal à voir parfois. Ça n’est pas toujours cohérent là-dedans, sur certains mecs. »