Pour le streamer lyonnais Zack Nani, Allan Saint-Maximim s'est livré sur l'ensemble de sa carrière. Il n'élude pas son passage à l'ASSE où il a vécu des années difficiles. La faute à un accueil hostile chez les pros et un ultimatum pour signer avec un agent bien précis. Retranscription.

Allan Saint-Maximin : "Mon arrivée à l'ASSE a été difficile. On m’a mis une étiquette directement. Quand tu es viré de Clairefontaine, forcément, ça ne fait pas une bonne publicité. On m’a collé cette étiquette de bad boy, une étiquette qui ne me correspond pas. J’étais juste dans une situation où je n’ai pas accepté de me faire frapper, c’est tout.

Je n’ai jamais été un enfant qui manquait de respect aux plus anciens. J’ai toujours eu beaucoup d’énergie, je parlais beaucoup, mais je n’avais pas ce côté qu’on essayait de me coller. C’est une image qui m’a suivi quand je suis arrivé à Saint-Étienne, et forcément, les éducateurs avaient beaucoup d’a priori. Il a toujours fallu leur montrer que j’étais quelqu’un de respectueux, très calme, et quelqu’un qui ne se laisse pas faire."

"À l'ASSE, on ne m'a pas facilité la tâche !"

"Comme j’aime bien dire : « Qui veut du respect s’en procure. » C’est une phrase qui m’a beaucoup suivi et qui compte pour moi. Je n’ai aucun mal à respecter tout le monde à partir du moment où on me respecte. Mais à partir du moment où il y a un gros manque de respect… ça a été un début compliqué. Mais quand on apprend à me connaître, on découvre qu’il y a une personne très aimante, qui n’a jamais eu de souci avec personne.

De là, j’ai lié des amitiés très fortes avec les éducateurs de Saint-Étienne. Je suis de la génération 97, Jonathan Bamba était 96. De ma génération, il n’y en a pas beaucoup qui sont sortis, à moins que j’en oublie… On avait quand même une belle génération avec Joris Mendy, Alexandre Assaf… Mais ça a été des débuts compliqués.

L’adaptation a été difficile. Le plus dur, ça a été de quitter ma famille. Je savais que c’était un sacrifice à faire, et je connaissais mes objectifs. Avec ce que j’avais vécu à Clairefontaine, c’était « réussir ou mourir ». Et j’ai tout fait, j’ai mis toutes les chances de mon côté pour réussir le plus vite possible. On ne m’a pas facilité la tâche, pour être honnête. C’est très difficile de faire l’unanimité. Je ne la faisais pas, et ceux qui ne m’aimaient pas m’ont mis beaucoup de bâtons dans les roues."

"Quand tu arrives au premier entraînement et que tu mets une feinte à Ruffier, que tu fais des passements de jambes, c’est mal vu" (Saint-Maximin sur ses débuts en pro à l'ASSE)

"Les premiers entraînements avec les pros ont été difficiles. Surtout que mon style de jeu n’aidait pas. Si j’étais un joueur standard, qui joue simple — contrôle, passe, etc. — l’adaptation aurait été plus facile. Moi, je suis un dribbleur. Mon jeu, c’est la provocation, les feintes, les passements de jambes, les virgules… Quand tu arrives au premier entraînement et que tu mets une feinte à Ruffier, que tu fais des passements de jambes, c’est mal vu.

Mais je ne voulais pas dénaturer mon jeu, et je ne voulais pas devenir quelqu’un que je ne suis pas. C’est ce qui m’a aidé tout au long de ma carrière. Je voulais garder ce côté dribbleur que j’ai en moi, et qui manque un peu dans le football aujourd’hui. Mon étiquette, plus mon jeu provocateur : on m’a pris pour quelqu’un d’arrogant. Alors que non, c’est du football. Je viens pour m’amuser. Quand tu apprends à connaître la personne, tu te rends compte que derrière le dribbleur, il y a un mec très simple.

On ne m’a jamais tout servi sur un plateau. J’ai dû aller chercher tout ce que j’ai eu. J’ai été performant aux entraînements, en sélection… Je suis allé les chercher. Le coach Abdel Bouhazama, c’est un de ceux qui m’ont aidé. Et à force d’enchaîner les grosses performances, j’ai très vite été appelé avec les pros, et j’ai signé mon contrat professionnel."

"Tous les conflits financiers, les pressions : « si tu ne signes pas avec tel agent, tu ne joues pas… » C’est ce qui est venu polluer mes débuts à Saint-Étienne"

"Je n’étais pas trop jeune. Ce qui m’attriste dans le football, c’est qu’il y a ce qui se passe sur le terrain, et il y a ce qui se passe en dehors. Tous les conflits financiers, les pressions : « si tu ne signes pas avec tel agent, tu ne joues pas… » C’est ce qui est venu polluer mes débuts à Saint-Étienne. Je n’ai jamais eu de problème avec aucun coach. Mais à 16 ans, on m’a clairement dit : « Si tu ne signes pas avec cet agent-là, tu ne joues pas. »

J’étais tout seul, il n’y avait pas mes parents. Me faire attraper comme ça et me faire comprendre que c’est du business… Ces personnes-là sont fourbes, et elles auront du mal à assumer toutes ces choses. Moi, j’ai mon caractère et je ne me laisse pas faire. J’ai voulu prouver, malgré leur ultimatum, que j’allais réussir ma carrière sans passer par ce chemin-là. Ça m’a desservi dans ma carrière, mais ça m’a permis de m’affirmer, et d’aller chercher ce que je devais obtenir par mes propres moyens.

Vous imaginez ? Tu commences le foot à 4 ans, avec tous les sacrifices… Et au final, toute ta carrière est entre les mains de mecs que tu viens de rencontrer, qui ne connaissent même pas ton prénom, et qui te mettent des ultimatums comme ça. Je ne les connaissais ni d’Adam ni d’Ève. J’étais loyal envers l’agent qui m’avait suivi jusque-là. Viré de Clairefontaine, signé à Saint-Étienne, et là, quelqu’un qui n’a jamais rien fait pour toi veut prendre ton transfert, ton argent. Pour moi, c’était inconcevable.

Vu que je n’ai pas signé avec cet agent, on m’a mis à la cave. Je ne jouais plus. C’est là que j’ai retrouvé cette flamme, cet amour pour le football, et cette envie de retourner la situation. J’étais en mission pour trouver une porte de sortie. Cette saison en CFA, j’ai marqué, j’ai fait beaucoup de passes décisives. Il y avait aussi l’équipe de France. Ça m’a aidé à me faire repérer, et ça m’a permis de signer à Monaco."