Jamais très loin de l’actualité des Verts, la vente de l’AS Saint-Etienne resurgit ces dernières heures. Énième écran de fumée ou nouvelle étape dans la vente du club ?

La vente de l’ASSE pourrait faire l’objet d’une série Netflix. Essayons de résumer sans nous attarder sur les détails qui ont jalonné les cinq dernières années.

Saison 1 – Peak 6

En mai 2018, l’ASSE annonce être entré en négociations exclusives avec PEAK6 Investments L.P en vue de la vente de l’Association Sportive de Saint-Etienne.

Extraits du Communiqué de l’ASSE, le 15 mai 2018 :

« PEAK6 est un investisseur global faisant preuve de passion dans ses investissements. PEAK6 possède une grande expertise dans le monde du sport et du football européen en particulier, étant actionnaire minoritaire de l’AS Roma en Serie A en Italie, de l’AFC Bournemouth en Premier League en Angleterre et également actionnaire majoritaire du club de Dundalk FC en Irlande. PEAK6 envisage de nommer Jérôme de Bontin comme Président du Club. M. de Bontin, né à Paris, a été précédemment Administrateur et Président de l’AS Monaco et Directeur Général des New York Red Bulls.

Bernard Caïazzo et Roland Romeyer commentent : « Après avoir reçu différentes options et repreneurs potentiels, nous sommes ravis d’entrer en négociations exclusives avec PEAK6. Nous avons été convaincus par leur grande connaissance du monde du sport, leur expérience du monde des affaires et leur rayonnement international, combinés à leur passion pour le football. Cette nouvelle étape permettra de pérenniser l’excellence sportive du Club sans renier ses valeurs. La présence d’un club français avec un actionnariat américain en finale de l’UEFA Europa League est un signe qui démontre l’efficacité du modèle U.S. dans le football européen. »

La réalisation de l’opération reste soumise à la consultation du comité d’entreprise et à la finalisation de la documentation juridique. »

Une finalisation qui n’aura finalement jamais eu lieu. Selon les informations du Progrès de l’époque, la sommes promises auraient été réduites au fil des discussions. Amenant les deux actionnaires à se retirer de la table.

C’est aujourd’hui un secret de polichinelle mais l’arrivée de Médiapro et du milliard pour les droits TV n’auraient pas poussé les dirigeants stéphanois à accélérer les discussions à l’époque.

Saison 2 – La folie Pauly

Après l’échec Peak6, l’ASSE continue de vivre en Ligue 1. Plusieurs prêts ont été contractés par les actionnaires afin d’afficher de belles ambitions sous Jean-Louis Gasset. Les Verts termineront à une belle quatrième place. La dernière saison où le Peuple Vert aura pu réver.

Depuis, JLG a laissé la place à son adjoint Ghislain Printant avant de se faire remplacer par Claude Puel. Le séisme médiapro accentue la nécessité d’opérer à un vaste plan de diminution des dépenses. S’appuyer sur les jeunes du centre de formation, tout en réduisant la masse salariale du vestiaire stéphanois. Le début de la descente aux enfers.

Il faut attendre 2021 pour voir ressurgir la vente de l’ASSE. Jacques Pauly se manifeste en organisant une conférence de presse lunaire. Accompagné de Philippe Miozzo, DG de l’entité X3 France, et Laurent Roussey, les déclarations sont plus qu’étonnantes :

« On aura les moyens. Qui peut reprendre le club aujourd’hui ? Un déficit de 35 millions d’euros est évoqué. Nous on connaît tout, et on veut ce club. » Jacques Pauly assure disposer de 400 millions d’euros qui se seraient volatilisés. 

Dans la foulée, le club réagit et « déplore des tentatives de déstabilisation qui se succèdent au moment précis où le club est confronté à des enjeux économiques et sportifs majeurs ».

 Saison 3 – KPMG en mission impossible ?

La situation sportive empire de mois en mois. Les Verts sont à la peine en Ligue 1 et joue régulièrement le maintien. De quoi motiver des actionnaires à relancer leur projet de vente.

Le 13 avril 2021, ils adressent une lettre ouverte au Progrès. Extraits.

« Depuis 18 mois, nous écrivons un nouveau chapitre de notre politique sportive sous la direction de Claude Puel qui a décidé d’accorder sa pleine confiance à nos jeunes et de miser sur eux pour intégrer l’équipe professionnelle. Nous pouvons en observer les premiers effets. Ainsi, l’ASSE est le club des cinq grands championnats européens ayant fait jouer le plus grand nombre de joueurs de moins de 21 ans depuis le début de cette saison. Ce premier résultat constitue un encouragement à poursuivre nos efforts en termes de formation des jeunes, qui reste l’ADN du club.[…]

Il est inéluctable que le football moderne réclame des moyens financiers de plus en plus importants, comme chacun peut le constater en France, avec l’arrivée constante d’actionnaires étrangers à Monaco, Lille, Marseille, Paris, Lyon ou Nice. L’ASSE présente à ce jour un modèle original avec un actionnariat à taille humaine. Il est le seul grand club français à ne pas appartenir à une puissance financière d’envergure internationale. C’est sa force et, aussi, quelque part, sa faiblesse. C’est pourquoi nous devons préparer l’avenir.

Ainsi, afin d’assurer la continuité et le développement de notre club, nous avons confié à une banque d’affaires réputée la mission de sélectionner le meilleur investisseur. Nous veillerons à ce que ce nouvel actionnaire dispose des moyens adéquats pour faire grandir le club, garantir l’emploi et perpétuer son identité. Nous serons vigilants à ce que le passage de témoin puisse s’effectuer dans la confidentialité et la sérénité. »

KPMG est mandaté à ce moment-là. Nous sommes en avril 2021.

Saison 4 – Markarian non grata

Plusieurs rumeurs apparaissent dans les semaines qui suivent. Parmi elle, l’intérêt d’Olivier Markarian. La volonté d’acquérir l’ASSE s’avère concrète. L’Equipe avance même un dossier précis.

« Âgé de 50 ans, ce Franco-Arménien de Valence (Drôme) et dont le père a été président du club local, a le coeur vert depuis toujours. Abonné au Kop nord pendant une décennie, il est devenu partenaire de l’ASSE il y a dix-sept ans. Sponsor maillot, plus gros mécène de l’association Coeur-Vert, il est le cadet des douze membres du conseil de surveillance, depuis 2018.

Surtout, il dispose de la surface financière requise pour racheter le club. PDG de Markal, une société spécialisée dans la vente de produits bios et dont la valeur est estimée à 80 M€, il a passé ces quatre derniers mois à monter un tour de table régional. Cela lui a permis de récolter entre 30 et 40 M€. Il a également démarché les établissements bancaires jusqu’au Luxembourg. Ses démarches se seraient avérées fructueuses. Séduite par son projet, l’une des plus puissantes sociétés financières du Grand-duché aurait accepté de l’accompagner. »

Pour autant, les relations difficiles entretenues avec Bernard Caïazzo n’auraient pas facilité l’opération. « Caïazzo, secondé par sa compagne Nina Monderine-Carneiro, ne veut pas de son projet stéphanois. »

Saison 5 – Le mirage du prince cambodgien

Le prince héritier du Cambodge, Norodom Ravichak, annonce avoir déposé une offre pour l’acquisition de l’ASSE :

 » Grâce à mes divers réseaux d’affaires, j’ai pu rencontrer des personnalités du monde du football et, de fil en aiguille, prendre connaissance du projet de vente de l’ASSE il y a quelques mois.

Mon but, aujourd’hui, est de prendre soin de Saint-Étienne et de tous ceux qui œuvrent pour que ce club retrouve la place qui est la sienne dans le football français et européen.

J’amène avec moi des partenaires solides que je présenterai le moment venu.

Je ne viens pas pour réaliser une opération financière. Je souhaite m’investir à long terme et prendre soin de l’ASSE. Si nous nous entendons, j’apporterai des moyens suffisants pour réaliser ces ambitions et permettre à Saint-Étienne de retrouver sa splendeur. »

Alors qu’il annonçait avoir présenté 100 millions d’euros, les actionnaires de l’ASSE contestent et accusent Norodom Ravichak : Il «  a fourni un document de garantie financière émanant d’une grande banque internationale qui se révèle être un faux »

Saison 6 – L’espoir américain

Déjà propriétaire de Crystal Palace et d’autres clubs, l’Américain David Blitzer s’intéresse à l’AS Saint-Étienne. Selon l’Equipe, il souhaitait s’associer à John Harris pour racheter les parts des deux actionnaires. Prêt à éponger la dette et investir sur le marché des transferts, de nombreux stéphanois sont rapidement séduits. Il faut dire que le bilan sportif est déplorable.

Les Verts viennent d’être relégués en L2. Le Peuple Vert est en attente d’espoirs. La dimension internationale de l’Américain pourrait en apporter enfin. En vain.

Une délégation américaine se présente le 15 juin 2022 à l’Etrat. Les négociations débutent. 15 jours plus tard, l’ASSE indique n’avoir reçu aucune offre.

Si une nouvelle piste rattache cette fois l’ASSE au canadien John Cheyka, celle-ci ne prendra finalement pas une grande épaisseur.

Saison 7 – Cette fois, c’est la bonne ?

Faute de vente, l’AS Saint-Etienne oscille entre bonnes et moins bonnes périodes au niveau sportif. Mais les Verts restent en Ligue 2. Laurent Batlles bataille avec son groupe pour obtenir la montée en Ligue 1.

Pendant ce temps, Roland Romeyer ne cache pas sa lassitude et son envie de vendre. Pour autant, les mois passent, la vente se fait toujours attendre. L’Equipe publie un article le 15 novembre. Bernard Lions l’assure, cette fois, les dirigeants stéphanois souhaitent vraiment vendre. Quid des cinq dernières années d’annonces à répétition dans ce cas ?

Deux projets sont évoqués. Un premier « Panthère Noire » emmené par Paulo Tavares. Un second, plus discret, voire énigmatique, projet étranger déniché par KPMG dont le mandat se termine le 31 décembre 2023.

Quelques jours plus tard, le Progrès surenchéri en évoquant deux projets, outre « Panthère Noire ».

 » Deux dossiers « qui tiennent la route », l’un français, l’autre étranger, seraient cette fois en haut de la pile selon l’entourage des deux propriétaires.

L’un, selon ces mêmes sources, pourrait faire rentrer l’ASSE dans « les tops clubs de Ligue 1 à l’instar de l’OM ou de Nice »

De quoi faire sourire. Pour l’heure, les concurrents de l’ASSE sont Laval, Angers ou Auxerre. La lassitude, voire l’éxaspération quant à cette saga a saisi l’ensemble des suiveurs stéphanois.

Hasard du calendrier ou non, les dirigeants passaient devant la DNCG ce mardi 21 novembre. Un rendez-vous traditionnel afin de montrer patte blanche aux gendarmes financiers du football français.

Feu Vert pour l’ASSE…  La suite au prochain épisode. Le dernier ? On va rester prudent, ça reste à prouver.