L'ancien ailier stéphanois s'est livré pour Peule-Vert. Un échange très intéressant avec un joueur qui a connu une situation similaire aux Verts d'aujourd'hui.
Son arrivée remarqué
Mickaël Citony : "J’arrive en janvier en provenance de Rennes. Quand j’arrive, le club était aux portes de la nationale. C’était une situation assez similaire à celle d’aujourd’hui. C’était très critique. On est parti de tout en bas pour remonter tout en haut.
Quand je suis au Stade Rennais, Frédéric Antonetti me contacte. C’est la fin du mercato. Il me dit qu’il serait intéressé pour me récupérer à Saint-Étienne. Il m’explique un petit peu le club. Infrastructures, supporters, ambitions,…
Et il me dit : « Ne fais pas attention au classement car les joueurs qui composent cet effectif ne sont pas des joueurs qui doivent jouer les derniers rôles dans ce championnat. »
Jusqu’à ce moment-là, je pensais que j’allais rester au stade rennais. J’avais refusé plusieurs clubs qui me souhaitaient en prêt. J’avais l’opportunité de pouvoir jouer en Ligue 1. Et là, j’ai cet appel de Frédéric Antonetti. J’étais jeune. J’ai regardé le classement. Dernier en seconde division alors que je jouais en Ligue 1, je commençais à me gratter la tête en me demandant quel était la bonne opération.
La fierté de son père
Mais mon père quand je lui ai dit Saint-Étienne, il a ouvert les yeux. Comme si aujourd’hui je lui disais le PSG sourire). Mon père a connu les années 1976, l’épopée des Verts… et il me dit une phrase : « Je n’ai jamais choisi pour toi, mais en tout cas si tu joues à Saint-Étienne, sache que tu feras un père très heureux. »
Mon père ne m’avait jamais dit ça. Et, au-delà de ça, c’était la première fois qu’un entraîneur m’appellait car il me voulait réellement. Ceci ne m’était jamais arrivé jusque-là. Avant j’étais toujours le petit jeune que les coachs n’appelaient pas. L’appel de Frédéric Antonetti m’a réconforté. Je me suis dit : lui il va me faire jouer. Il me veut. Il ne me parle que de football. Et ça a été mon meilleur choix. Le meilleur choix de ma carrière.
Quand j’arrive dans le vestiaire, il y avait Patrice Carteron, Vincent Hognon, Julien Sablé, Alex, Fred Mendy etc … Je regarde l’effectif et les infrastructures .. Il y a des très bons joueurs. J’arrive en milieu de semaine. Fred Émile m’a aidé comme si j’étais son fils. Hôtel, maison, etc… Un grand merci à lui pour tout ce qu’il a fait pour moi. Encore merci à lui.
3 jours plus tard on joue le samedi en championnat. Frédéric Antonetti me met titulaire directement. On joue au Mans. On fait 2-2 et j’égalise. J’ai commencé à comprendre la ferveur des supporters.
Plusieurs déclics
Ce qui m’a choqué le plus c’est mon deuxième match. On reçoit Metz. On fait 1-1. À la fin du match, on se fait escorter par la police car les supporters avaient pété un câble.
Ils s’en étaient pris à la voiture des joueurs. Notamment celle d’Alex. En fait, ce soir là, c’est bizarre mais j’ai kiffé. Je me suis dit « Là je suis dans un grand club. On ne rigole pas. J’ai une responsabilité ». Les supporters voulaient des résultats. Il y a avait de la pression. Et c’est tout ce que je voulais. C’est bête ce que je dis vu le contexte mais j’ai kiffé la pression. La pression d’un grand public, d’un grand club.
La suite a été magnifique. De 20eme on remonte au ventre mou du championnat. L’année se termine. Je suis en fin de contrat avec Rennes. Je décide de rester à Saint-Etienne.
Fred Antonetti voulait me voir rester. Ce n’était pas simple car la situation du club était compliquée financièrement. Le coach voulait garder le groupe en ajoutant des éléments : Bridonneau, Morestin, Ilunga et Nicolas Marin.
On commence la saison en 442. Puis on perd à la maison contre Troyes. On passe en 433. Et à partir de là on explose tout. Un changement tactique qui change tout. C’était une machine de guerre qu’on avait. On se trouvait les yeux fermés. C’était devenu automatique. On savait où les autres étaient.
Une famille pour aller chercher le Graal
Je te parle même pas du groupe. On était une famille. On était que des mecs qui n’avaient pas eu l’opportunité de s’imposer en Ligue 1 et qui se retrouvaient dans un grand club mythique. C’est juste ce qu’on voulait. C’était un kiffe total. C’était vraiment une famille. Même avec le staff. C’était incroyable. Sur cette saison, on a tout explosé.
J’ai vu deux fois Geoffroy Guichard dans des états où on ne s’entendait pas entre joueurs. Contre Sochaux en Coupe et contre Châteauroux avec le but de Bridonneau. Je t’en parle, j’ai encore la chair de poule. On était sur le toit du monde. Inoubliable. Il faut l’avoir vécu pour le comprendre. Ça restera gravé à vie.
À Sainté j’ai tout connu. On m’appellerait Stomy Bugsy. Après c’est comme tout, je performais sur le terrain.
Quand on est champion, je me suis fait sifflé pendant un mois à domicile. Lors d’une soirée nocturne, je me suis pris la tête avec un supporter insistant envers moi et mes proches. C’est parti un peu loin. Pas loin d'en arriver aux mains. J’ai appris plus tard qu’il s’agissait d’un membre important des MF91. Du coup on m’a sifflé pendant une petite période.
Jusqu’au jour où je marque à domicile contre Créteil. Et là c’est fini. Tout était redevenu comme avant.
C’est simple. Il faut être prêt pour jouer à Saint-Etienne. C’est des supporters prêt à mourrir pour leur club. Ils sont exigeants. Exigeant car derrière il y a un public. J’ai fait toute la France en L2 avec des stades remplis car je jouais à Saint Étienne.
C’est super compliqué. C'est quitte ou double. Aujourd’hui on est dans la merde mais moi j’y crois. Tout ce que je te dis me fait penser à la situation que j’ai vécu. J’espère que ça arrivera.
Jouer à Saint-Etienne demande d'avoir du caractère
Les joueurs actuels je ne les connais pas personnellement. Mais je sais qu’ils ont pris un Gaëtan Charbonnier. Il connaît le championnat. Il sort de L1 et vient à Saint-Etienne. La pression ne lui fera pas peur à ce mec là.
Peut-être que tous les joueurs n’étaient pas adaptés. J’en sais rien. Mais en tout cas, la position qu’ils ont aujourd’hui je connais. Il faut des joueurs de caractère. Qui savent qu’ils vont peut-être se faire insulter, qu'ils arrivent à encaisser et digérer la pression. C’est vraiment compliqué. Si tu marques ne t’inquiètes pas, ils seront derrière toi.
Pour s'en sortir je pense que déjà il faut y croire et ne rien lâcher. Il reste beaucoup de matchs. Après quand tu as ça, il faut de l’envie. Les qualités ils les ont. S’ils ont plus envie que les autres, il ne manquera pas grand chose. Il ne manque qu’un déclic. Une fois que la mayonnaise va prendre je pense et j’espère qu’ils seront inaretables.
Son après-carrière
Mon après-carrière ? J’ai passé mes diplômes d’entraîneur. J’ai coaché des jeunes près de chez moi. Le niveau n’était pas suffisant pour moi (district). J’ai monté une boîte de transport de luxe. J’ai effectué une autre tentative. Cette fois avec des seniors. J’avais l’équipe réserve. Mais là encore je n’ai pas pu évoluer. A partir de là, j’ai un peu laissé entre parenthèses le football.
J’aimerais bien entraîner à nouveau. J’ai baigné dans le foot toute ma vie. Après c’est compliqué d’avoir des opportunités. C’est beaucoup de réseau. Je ne suis plus trop dans le milieu.
Pour finir, je demanderais de la patience pour Lolo Batlles et Loïc Perrin. Je pense que ce qu’ils sont en train de faire va finir par payer. Je connais ces deux personnes. Ils bossent et ça finira par payer.
Pour les supporters, j’ai compris une phrase qu’on m’avait dit quand j’étais à Saint-Etienne : "Sainté, tu t’aperçois de l’endroit où tu étais lorsque tu pars." Je n’y croyais pas. Aujourd’hui j’ai 42 ans et je sais que Saint-Etienne est un club à part, avec des supporters à part. Des supporters qui sont prêts à tout pour leurs joueurs. Juste pour ça je les remercie. Qu’ils continuent à faire vibrer Geoffroy Guichard comme ils le font depuis tant d’années.
Maintenant c'est Saint-Etienne à vie"
Merci à Mickaël pour sa disponibilité !