Les Verts viennent de signer leur cinquième revers de la saison face au Paris FC (0-2). Une défaite qui laisse un goût amer à Laurent Batlles, son staff, ses joueurs, ainsi que tous les amoureux de l'ASSE. Alors que tous les regards se portent sur le rectangle vert, les dirigeants du club restent en retrait et observent la chute lente et irrémédiable de l'AS St-Etienne. Ils sont pourtant les responsables de la politique du club, et donc de ce marasme...
Roland Romeyer et Bernard Caïazzo ont confié la direction opérationnelle du club à Jean-François Soucasse il y a maintenant plus d'un an. Il est arrivé comme directeur général des services dans un premier temps, en janvier 2021 en remplacement de Xavier Thuilot, démissionnaire. "Dans le cadre des pouvoirs élargis qui lui sont conférés et le respect des prérogatives des actionnaires Jean-François Soucasse pilotera la gestion opérationnelle et stratégique du club avec l'appui de ses équipes et en collaboration avec Claude Puel, manager général en charge du projet sportif", détaillait un communiqué de l'AS Saint-Etienne le jeudi 1er juillet 2021.
Un an plus tard, l'ASSE est descendue en Ligue 2 et Soucasse a collaboré avec trois entraîneurs différents (si on met de côté l'intérim de Julien Sablé). Si les joueurs et Laurent Batlles endossent leur part de responsabilité, il serait malhonnête de ne braquer les projecteurs que sur le secteur sportif. Dans une entreprise, quand les résultats ne sont pas à la hauteur, il est logique que l'on se pose la question de savoir si les hommes en charge de la diriger prennent les bonnes décisions et assument leurs responsabilité.
Jean-François Soucasse est arrivé à l'ASSE avec l'ambition d'y occuper un rôle central. C'est aujourd'hui le cas. Il s'est ainsi entouré d'hommes qu'il a choisis afin de mener à bien les missions qui lui ont été confiées. Parmi celles-ci, le maintien des Verts en Ligue 1, l'apaisement des relations avec les supporters ou encore le développement des ressources liées au sponsoring. Bilan en octobre 2022 : aucun objectif n'est atteint, pire, les problèmes s'accentuent.
Des choix de profils à des rôles clés très discutables !
Depuis, l'ASSE est descendue en Ligue 2, les supporters n'ont jamais été aussi éloignés de la direction et les revenus liés au sponsoring n'ont pas décollé. Tout semble cependant lié. La santé sportive du club reste le problème numéro un. Les choix opérés par Jean-François Soucasse dans ce secteur sont aujourd'hui très critiquables, à commencer par les hommes qu'il a choisis pour l'entourer.
Jusqu'alors stadium manager et directeur général adjoint en charge de l'intendance et de la logistique, Samuel Rustem a d'un coup pris plusieurs galons pour se retrouver directeur général adjoint en charge des activités sportives, sans pour autant, en décembre 2021, perdre ses autres prérogatives. Avec très peu d'expérience, surtout dans le domaine sportif, il y a de quoi poser la question de la légitimité de Samuel Rustem à ce poste. Comme si cela n'était pas suffisant, Jean-François Soucasse a validé le principe d'installer Loïc Perrin comme coordinateur sportif de l'ASSE. Là encore, la question de l'inexpérience est posée.
Ce doute, d'autres le partageraient en interne, et notamment au sein du conseil de surveillance au sein duquel certains membres évoquent le bilan catastrophique du trio. Depuis l'arrivée de Jean-François Soucasse, le premier choix fort aura été de limoger Claude Puel. On ne peut pas le lui reprocher puisqu'il devenait urgent d'actionner un levier afin de redonner de l'oxygène au secteur sportif. Le départ de Puel a, mécaniquement, donné du pouvoir à Soucasse qui récupérait les responsabilités jusqu'alors dévolues à l'ancien manager général. La première idée de Soucasse aura donc été de donner la responsabilité du sportif à Samuel Rustem qui, comme évoqué précédemment, n'offre aucune garantie dans ce domaine. Cela interroge.
Des mercatos ratés voire catastrophiques !
Dans la foulée, Loïc Perrin est nommé coordinateur sportif de l'ASSE. Si l'ancien défenseur, placé sous l'autorité directe de Samuel Rustem, jouit d'une réelle expérience dans le domaine sportif et d'un capital sympathie jamais démenti du côté des supporters, il reste toutefois très inexpérimenté dans de nombreux domaines. Sans le moindre réseau dans le monde des agents et plus largement dans le monde du football, l'ancien consultant de la chaîne Téléfoot semble déjà embarqué dans une mission très délicate, pour ne pas dire impossible. Sa première décision : nommer Pascal Dupraz en lieu et place de Puel fraîchement débarqué. Un recrutement qu'il faut en fait attribuer à Jean-François Soucasse qui l'avait côtoyé au TFC. Un choix qui aurait pu être payant, mais l'embellie de février à laissé place à la médiocrité sportive à laquelle Puel n'avait pas trouvé de réponse. Elle a également laissé place à l'égocentrisme de Dupraz, incapable de se remettre en question et, mais cela n'a surpris personne, extrêmement limité lorsqu'il a s'agit de traiter le problème par des choix tactiques, reléguant son rôle de "papa des joueurs" et de "meneur d'homme" au second plan. Un choix perdant pour la paire Perrin-Soucasse, et ce ne sera pas le dernier.
Le mercato hivernal, en janvier 2022, a eu la particularité de n'attirer que des joueurs qui n'ont absolument apporté aucune plus-value à l'équipe, soit parce que les rares bons joueurs recrutés étaient blessés, soit parce qu'ils étaient tout simplement d'un niveau indigne pour évoluer en Ligue 1. Ce mercato catastrophique est en premier lieu de la responsabilité de Loïc Perrin, mais par le fil hiérarchique de celle de Samuel Rustem, son supérieur et enfin de Jean-François Soucasse qui a choisi ces deux hommes.
Le mercato estival a donné lieu à des satisfactions quant à certains profils attirés, mais surtout parce que l'ASSE a pu dégraisser massivement un effectif traumatisé par la descente. Pour cela, Loïc Perrin a bénéficié d'un coup de pouce de David Wantier qui a permis de trouver quelques portes de sortie à certains stéphanois. En revanche, le coordinateur sportif de l'ASSE a échoué dans de nombreux dossiers, incapable qu'il a été de recruter un gardien de but pourtant fortement réclamé par Laurent Batlles. Incapable de recruter les latéraux tant espérés, ces fameux pistons qui constituent à ce jour la clé de voûte du système de Batlles. Incapable de se positionner sur Sissoko que Sochaux (qui caracole en haut du classement de L2) a chipé aux Verts, laissant ces derniers sans attaquant sur leur banc de touche (!). S'agissant du gardien de but, le pari a été de valoriser Etienne Green pour en faire un joueur capable de rapporter un joli chèque au club. La belle histoire de Green à l'ASSE vire aujourd'hui au cauchemar. La question de son niveau sportif est clairement posée. On le sait désormais, chaque minute qu'il passe sur les pelouses de Ligue 2 le discrédite et détériore ses statistiques, rendant une vente lucrative impossible à ce jour. Laurent Batlles avait pourtant fait de ce poste une priorité.
Le spectre des sanctions et la difficile relation avec les supporters !
Les erreurs dans le domaine sportif ne s'arrêtent pas là. La dernière permet aujourd'hui à Noah Raveyre, gardien extrêmement prometteur de l'ASSE qui aurait pu intégrer le groupe professionnel l'an prochain, de se laisser courtiser par des clubs européens dont le Milan AC ou Chelsea. Une situation incompréhensible alors que l'ASSE cherche à valoriser ses actifs, même s'il ne faut pas écarter le fait que le joueur et son conseil aient également à assumer une part de responsabilité dans cet échec. Comment l'un des plus prometteurs espoirs du club peut-il partir sans que l'ASSE n'ait été en capacité de se positionner à temps ? Qui a mené les discussions ? Loïc Perrin ? Samuel Rustem ? Jean-François Soucasse ? Les trois à la fois ? Peut-être pas Rustem qui admettait lui-même que son rôle restait limité, surtout dans le processus du recrutement. Rustem s'occupe ainsi de "l'humain" comme il l'expliquait en septembre dans les colonnes du Progrès : L'humain ? C’est mon domaine. Je vérifie différentes choses, on se renseigne. Le curseur est poussé au maximum. Est-ce que le joueur a rencontré des problèmes de moralité ? A-t-il fait l’objet d’un scandale ? On regarde si le joueur est structuré familialement, s’il peut vriller, ce qui représente bien sûr un risque. On passe des coups de téléphone. On échange aussi en direct avec le joueur. C’est très important. Si je me suis rendu à Budapest avec Loïc (Perrin) lors du match de Qarabag contre Ferencvaros, ce n’est pas pour savoir si Wadji était droitier ou gaucher. Je voulais le rencontrer pour voir s’il tenait la route… Je n’ai pas la prétention de pouvoir juger quelqu’un. Je suis juste là par rapport à l’humain. Au fil du temps, on a pu acquérir pas mal de notions de management. Même si on n’est jamais à l’abri de rien, on est capable de déterminer si la personne rentre ou pas dans les critères que l’on a définis au niveau du projet de l’ASSE." Le responsable du sportif à l'ASSE s'occupe ainsi de savoir si un joueur est ASSE-compatible en termes de personnalité, de moralité...
On l'aura compris, le sportif reste la pierre angulaire du club. Les résultats de l'équipe dirigée par Laurent Batlles sont à ce jour dangereusement insuffisants. Le spectre du National plane au-dessus de la tête des Verts. Outre le sportif, la relation avec les supporters est des plus dégradée. Le double discours tenu par Jean-François Soucasse auprès des groupes Ultras et de la LFP ne passe pas et ne leurre personne. Après avoir demandé à Rustem de nommer un stadium manager il y a un an, en l'occurrence l'inexpérimenté Florian Merle, Jean-François Soucasse a contre-pédalé au vu des problèmes rencontrés dans les tribunes, et notamment après les évènements d'ASSE-Auxerre. Ainsi, Florian Merle a laissé sa place à Cyril Ferrier, ancien gendarme qui officiait comme policier municipal à Saint-Just-Saint-Rambert et dont le contrat a débuté le 1er octobre dernier. C'est donc lui qui a dû gérer la fameuse "affaire des tambours" il y a quinze jours. Un joli baptême du feu. La fermeté de la préfète de la Loire a un peu plus entamé la relation entre les supporters et les autorités. Là encore, le rôle du club, et notamment de Samuel Rustem qui est le responsable direct de Cyril Ferrier, est ambigu et flou. De quoi provoquer de futurs débordements ? Nous n'en sommes pas là, toutefois, la crainte existe et ce sont encore, au-delà des huis-clos annoncés, trois points de retrait au classement qui planement au-dessus du club... Assurément une sanction qui, si elle tombait, placerait les Verts dans une siutation sportive extrêmement délicate.
Le conseil de surveillance observe et tire des conclusions...
De l'aveu de certains en interne, le club est dans un état de délabrement comme rarement il l'a été. Tout du moins pas depuis les années D2 de la fin des années 90 et début des années 2000. La réflexion de changer les choses existe. Ira-t-elle au bout ? Dans un contexte de vente du club, rien n'est moins sûr. Le sportif apporte déjà son lot d'instabilité et il n'est pas certain que les secousses provoquées par le rectangle vert doivent se propager jusque dans les bureaux des dirigeants. Pourtant, il y a un conseil de surveillance avec des personnes "influentes" et des conseillers qui observent et tirent des conclusions de ce qui est mené depuis plusieurs mois dans le club, que ce soit sur le plan sportif ou financier. Outre le sportif, certains se demandent aujourd'hui pourquoi Arnaud Jaouen (directeur général en charge des revenus), qui n’avait pas atteint ses objectifs commerciaux (difficilement atteignables - on parle de 10 millions d'euros - il faut l'avouer !), est de retour au club... La situation professionnelle de son épouse est un premier élément de réponse. D'autres se demandent pourquoi l'ASSE a précipité la refonte du logo du club alors que d'autres dossiers semblaient prioritaires.
L'ASSE, avec un budget de 35 millions d'euros en Ligue 2, devrait logiquement se retrouver dans la première partie du classement. Elle est aujourd'hui classée 19ème à 4 points du premier non reléguable. Le club semble vivre une lente mais certaine descente aux enfers. Les échecs d'hier n'appellent pas automatiquement ceux de demain, toutefois, comment ne pas se poser des questions au regard notamment du bilan de Soucasse au TFC qui chutait en L2 sous sa direction... Ne reste qu'à souhaiter que les Verts renouent avec le succès malgré ce constat peu réjouissant. on le sait, quand le sportif va tout va, tout du moins en apparence, et les Verts ont grandement besoin qu'un coin de ciel bleu finissent par déchirer la chape nuageuse qui recouvre l'ASSE depuis près de 3 ans...