Le football français a de quoi s'inquiéter pour ses futures ressources financières. Alors que la saison 2023/24 s'achève, la prochaine est déjà proche. Aucun diffuseur n'a, pour l'heure, déposé l'offre tant espérée par la LFP. Qui diffusera la Ligue 1 la saison prochaine ? Un problème qui s'accompagne d'une polémique concernant le contrat signé avec CVC, il y a deux saisons... L'After Foot a évoqué le sujet avec Pierre Maes, spécialiste du sujet.

Le patron de la DNCG, M. Jean-Marc Mickeler, a envoyé une lettre aux clubs, dont l'ASSE. Il leur a demandé de rester extrêmement prudents quant aux budgets prévisionnels qu'ils allaient présenter au gendarme financier du football français ces prochaines semaines. La raison est simple : il règne un climat d'incertitude sur les montants des futurs droits TV. Le mot d'ordre ? Prudence absolue pour tout le monde.

Daniel Riolo, journaliste sur RMC, relève toutefois la sérénité des présidents de clubs : "Alors paradoxalement, la majorité des présidents n'est pas inquiète. Ils font tellement confiance les yeux fermés à Vincent Labrune (Président de la LFP)... !  Ils se disent que de toute façon, tout est nickel. Que ça rentrera dans l'ordre. Il faut savoir que les présidents ne sont jamais inquiets parce qu'ils ont l'Orléanais (ndlr : Vincent Labrune est né à Orléans) comme paravent !"

La LFP peut-elle s'attendre à une offre de BeIN Sports sans Canal+ ?

Pierre Maes (spécialiste des droits TV) explique que "si BeIN Sports voulait vraiment les droits, le deal serait déjà signé depuis longtemps. Je pense qu'il y a matière à s'inquiéter. Ce qu'on voit au niveau de BeIN Sports, et ce, dans tous les pays où beIN est présent, c'est que ça fait quatre ans qu'ils serrent la vis, qu'ils font des économies. On le voit également sur les droits de l'Euro.
Voir aujourd'hui BeIN Sports investir massivement dans la Ligue 1 serait contraire à tout ce qu'on voit sur la chaîne depuis 4 ans au niveau mondial.
Comme tout le monde le sait, BeIN ne s’engagera jamais dans un deal avec la Ligue 1 si derrière Canal+ ne le rétribue pas convenablement dans le cadre de ce contrat de distribution. Ce serait assez logique que Canal essaie de garder un ou deux matchs sur son antenne. On les voit difficilement priver les abonnés de Canal de deux belles affiches. BeIN est seul, mais n’est pas décisionnaire, c’est Canal. C'est une grave erreur de s’être mis Canal encore plus à dos quand le marché est contrôlé par un seul acteur : Canal+."

Évoquer Vincent Labrune et les droits TV est l'occasion de parler des auditions qui ont lieu actuellement au Sénat sur la financiarisation du football français. Il semblerait qu'une polémique naisse autour du deal avec CVC. En avril 2022, la LFP acte l’engagement ferme d’investissement par CVC d’un montant total de 1,5 milliard d’euros au capital sa toute nouvelle filiale commerciale. En contrepartie de son investissement dans la filiale commerciale, CVC détiendra une participation de 13,0% à son capital, valorisant l’intégralité du capital de la filiale commerciale à 11,5 milliards d’euros.

"Convaincus qu'il y a un truc pas clair"

Daniel Riolo : "Vous savez que le Sénat, en ce moment, auditionne quelques acteurs importants des droits de télé, des spécialistes, d'anciens présidents. Vincent Labrune est attendu comme une sorte de bouquet final de leurs auditions."
"Devant cette commission sont passés beaucoup de gens : Pierre Rondeau y est allé, Christophe Bouchet, Pierre Maes... Il faut préciser que la commission, emmenée par Michel Savin est hyper pointilleuse. Ils veulent vraiment tirer cette affaire au clair. Et pour tout dire, ils sont convaincus qu'il y a un truc pas clair. Je parle du deal avec CVC. Mais c'est principalement de ça dont on parle, c'est ça qui fait le cœur de l'étude de cette commission.
Tous y sont allés, on n'est pas en train de parler de patrons de bistrots quand on parle de Pierre Maes, de Rondeau, de Bouchet, soit ce sont des économistes, soit ce sont des gens qui connaissent réellement le dossier. Tous ont dit devant la Commission à quel point ils étaient dubitatifs, sceptiques quant à ce deal.

Et c'est aujourd'hui qu'est passé Mickeler. On a eu une chose très étonnante. Mickeler, patron de la DNCG, est arrivé en disant que tout est formidable.
De là à dire, je ne vais pas faire le complotiste, mais de là à dire qu'il est téléguidé, voire radioguidé par Vincent Labrune, le président de la LFP, franchement, c'était tellement gros, Quand j'entends une flopée de spécialistes venir dire qu'il y a un problème, que quand même, il faut s'interroger... Et hop, le patron de la DNCG, il arrive, tout est beau, tout est formidable."