À l’occasion des 90 ans de l’AS Saint-Etienne, le site Peuple-vert vous propose le portrait des 50 meilleurs joueurs de l’ASSE parmi les 772 qui, depuis 1933, ont un jour porté le maillot Vert. Place à Patrick Battiston.
De la place 50 à 21, les joueurs classés seront présentés par ordre alphabétique.
PATRICK BATTISTON
(136 matches, 9 buts de 1980 à 1983)
Le héros malheureux de Séville
UN INTERNATIONAL A SAINT-ETIENNE
Malgré les arrivées de Michel Platini et de Johnny Rep, l’été précédent, l’AS Saint-Etienne n’a pas réussi à remporter le championnat de France 1979-80. Elle a terminé à la 3ᵉ place derrière le FC Nantes (champion) et le FC Sochaux, son dauphin.
Plus grave, elle a pris 50 buts en D1 cette saison. Une première depuis que Robert Herbin dirige cette équipe. En étant aussi perméable, elle ne peut prétendre lutter pour le titre. La défense stéphanoise est vieillissante avec un gardien, Ivan Curkovic, qui a dépassé les 36 ans, et dont les prestations ne font plus autant l’unanimité. Il a d’ailleurs rendu son brassard de capitaine, récupéré après le départ de Jean-Michel Larqué.
De plus, Gérard Farison, l’inamovible arrière gauche de la grande épopée, s’est engagé, à 35 ans, pour une dernière pige à Fréjus et il faut donc le remplacer.
Les dirigeants jettent leur dévolu sur un jeune défenseur de 23 ans, Patrick Battiston mais qui est loin d’être un inconnu. Il joue au FC Metz et il est international français depuis 1977 avec 14 sélections et une coupe du monde disputé en 1978 (un match contre l’Argentine).
L’équipe messine se bat pour son maintien chaque année, et il aimerait bien évoluer à un niveau supérieur. Il ne pouvait, dès lors, qu’accepter la proposition de l’ASSE, qui reste le club phare des années 1970 même si son dernier trophée de champion de France remonte à quatre ans.
Dès sa première saison chez les Verts, Patrick Battiston va s’imposer comme un élément indiscutable de la défense stéphanoise. Il débute le 24 juillet 1980 à Bordeaux par une défaite cuisante (0-3) laissant présager une nouvelle saison frustrante.
Néanmoins, au fil des matchs, il va faire étalage de tout son talent, étant dur au marquage, très difficile à prendre de vitesse et très propre dans ses interventions. Il ne recevra aucun carton jaune dans toute sa carrière à l’ASSE !
En plus, il peut se muer en redoutable contre-attaquant grâce à une technique au-dessus de la moyenne pour un défenseur. Il est l’auteur de quatre buts dès sa première année dans le Forez (9 en tout en Vert), ouvrant son compteur dès le 29 août 1980 à Geoffroy-Guichard contre Lille à la 10ᵉ minute (3-1).
Il est considéré comme l’un des meilleurs arrières français, sinon européen, et il prend une part essentielle dans le dixième titre de champion de France de l’ASSE obtenu en 1981.
Il fait naturellement partie du groupe de Michel Hidalgo qui s’envole en Espagne pour la coupe du monde 1982 en compagnie de Jean Castaneda, Gérard Janvion, Jean-François Larios, Christian Lopez et Michel Platini (son meilleur ami dans le football, ils se connaissent depuis les JO de 1976).
L’ATTENTAT DE SEVILLE
Cette coupe du monde restera un souvenir impérissable pour Patrick Battiston. Il est passé par toutes les émotions.
Titulaire pour le premier match contre l’Angleterre (1-3), il est victime d’une insolation dans la fournaise du stade San Mames à Bilbao. Il fait son retour contre l’Autriche (1-0) et surtout pour son troisième match, il devient le héros malheureux de la demi-finale contre la RFA à Séville le 8 juillet 1982.
Il entre à la 50e minute à la place de Bernard Genghini, à un poste inhabituel de milieu de terrain, le sélectionneur Michel Hidalgo n’ayant plus de solution de rechange.
Sept minutes plus tard, lancé en profondeur, il se présente seul devant le gardien Harald Schumacher, qui le percute violemment. Complètement KO, ayant laissé deux dents sur la pelouse espagnole, il est évacué sur une civière, inconscient, accompagné par son ami Platini qui lui tient la main. La suite appartient à la légende et restera pour les supporters français présents et ceux devant leur téléviseur avec les commentaires de Thierry Roland et Jean-Michel Larqué, une plaie à jamais cicatrisée.
Cette agression a fait grand bruit, car elle n’a pas été sanctionnée par l’arbitre, Monsieur Corver, incroyablement indulgent sur cette action.
Même en RFA, elle a indigné les Allemands. Le gardien est insulté dans la rue, voire comparé à un nazi pour avoir « fait honte à la nation germanique ». Schumacher est donc contraint de demander des excuses à Battiston qui, grand seigneur, s’empresse de les accepter.
Elles ont lieu de manière officielle lors d’une rencontre organisée, une semaine plus tard, par le quotidien local, Le Républicain lorrain, qui réunit les deux joueurs.
La poignée de main est captée par de nombreuses caméras de télévision. Le public a-t-il pour autant accepté les explications de l’Allemand ? Rien n’est moins sûr, car le goal, qui officie à Cologne, a longtemps été sifflé dans son pays lors de ses prestations à l’extérieur de sa ville.
La fin à l'ASSE
Patrick Battiston retrouve le chemin des terrains en septembre 1982 dans une équipe stéphanoise dont il est devenu le capitaine au départ de Christian Lopez.
Toutefois, l'ASSE entame sa chute avec l’histoire de l’affaire de la caisse noire dans laquelle il est impliqué. Les Verts, qui ont vu leur entraîneur Robert Herbin, licencié en janvier 1983, terminent à une décevante 14ᵉ place.
Il est temps alors pour le talentueux défenseur de changer d’air, devenu malsain. Il s’engage avec les Girondins de Bordeaux dirigés par Aimé Jacquet. Il remporte trois nouveaux titres de champion de France (1984, 1985, 1987) et une coupe de France (1986).
Entretemps, il fait partie de l’équipe de France championne d’Europe en 1984 et il est de nouveau demi-finaliste de la coupe du monde 1986, titulaire lors du match France-Brésil (1-1, 4-3 tab) considéré comme l’un des plus beaux de l’histoire de la compétition.
Indéniablement, Patrick Battiston, membre de l’équipe vainqueur du 10e titre de champion de France, mérite de figurer parmi les 50 meilleurs joueurs de l’ASSE.
By Albert Pilia