A l’occasion des 90 ans de l’ASSE dont la date de naissance officielle est le 26 juin 1933, nous vous proposons de vous faire découvrir le Onze de chaque décennie des années 1930 aux années 2010 parmi les 764 joueurs stéphanois qui ont, un jour, revêtu le maillot vert.

Evidemment, cet exercice est tout ce qu’il y a de plus subjectif et nous ne prétendons pas détenir « la vérité ». Nous nous contentons juste de présenter « notre vérité ».

Chaque semaine, nous publierons un Onze par décennie. 4e chapitre : la décennie 1970

La décennie 1970 est évidemment marquée par le parcours de l’AS Saint-Etienne en coupe d’Europe des clubs champions en 1975-76 qui a débuté, en fait l’année d’avant, le 6 novembre 1974 et la victoire sur l’Hajduk Split 5-1, qui a valu à Geoffroy-Guichard le surnom de « chaudron ». Sans cet exploit, l’épopée 76 n’auraient certainement pas existé. Honneur, donc, aux onze joueurs qui ont « réveillé » le football français.

GARDIEN

 YVAN CURKOVIC (Né le 15 mars 1944, 383 matches de 1972 à 1980)

Lorsqu’il débarque à Saint-Etienne le 18 juin 1972, le Yougoslave Yvan Curkovic ne sait pas qu’il va marquer l’histoire de l’ASSE. Relais idéal de Robert Herbin qui débutait sa carrière d’entraîneur, il a été un des leaders de cette équipe qui va tutoyer les sommets jusqu’à la finale de coupe d’Europe, le 12 mai 1976. Dur au mal, quasi imbattable sur sa ligne de but, il a haussé le niveau d’exigence de ses équipiers, notamment de sa défense qu’il a su diriger avec fermeté et rigueur pour devenir une des meilleures d’Europe. Il est assurément le plus grand gardien de but de l’histoire de l’AS Saint-Etienne.

Son chef d’œuvre ? la demi-finale retour de la coupe d’Europe des clubs champions le 14 avril 1976 en Hollande contre le PSV Eindhoven où il a été invincible et il a gardé sa cage inviolée par ses nombreux arrêts (0-0).

DEFENSEURS

GERARD JANVION (Né le 21 août 1953, 394 matches, 14 buts de 1972 à 1983)

Lorsqu’il arrive à Saint-Etienne, Gérard Janvion est considéré comme un attaquant avec une belle pointe de vitesse. Toutefois, il ne convainc pas à ce poste et c’est Robert Herbin qui le reconvertit arrière droit, plus spécialement chargé des tâches défensives commandos comme le marquage individuel sur le meilleur attaquant adverse. C’est lui qui s’occupe d’Ivica Surjak au match retour contre l’Hajduk Split, le 6 novembre 1974 (5-1), le point de départ véritable de la formidable épopée européenne de l’ASSE. Son duel contre Oleg Blokhine, le ballon d’or, du Dynamo Kiev est entré dans la légende.

Ses qualités lui ont ouvert les portes de l’équipe de France qu’il a rejoint à 40 reprises en participant aux coupes du monde 1978 et 1982 dont la fameuse demi-finale du Mondial 1982 en Espagne contre la RFA.

 

OSVALDO PIAZZA (Né le 6 avril 1947, 310 matches, 20 buts de 1972 à 1979)

Le défenseur central argentin, Osvaldo Piazza, est le deuxième étranger de cette fameuse équipe. Mais Robert Herbin a eu du mal à lui trouver le rôle qu’il lui conviendrait le mieux. C’est en tant que stoppeur qu’il s’est finalement épanoui aux côtés de Christian Lopez mais ce sont ses chevauchées vers l’avant, cheveux au vent, qui ont fait sa renommée, dont celle de l’inoubliable ouverture du score contre le Dynamo de Kiev au match retour le 17 mars 1976.

Auteur de nombreux buts, il est également resté célèbre pour s’être agenouillé lorsqu’il a reçu son carton jaune de la part de l’arbitre Karoly Palotai (encore lui !) contre Liverpool à Geoffroy-Guichard le 2 mars 1977, le privant du match retour. Son absence a évidemment pesé lourd sur le résultat final.

 

CHRISTIAN LOPEZ (Né le 15 mars 1953, 453 matches, 28 buts de 1971 à 1982)

Christian Lopez a mis du temps avant de se convaincre qu’il pouvait embrasser une carrière de joueur professionnel. Mais il est devenu un des meilleurs libéros français de sa génération. C’est d’ailleurs, à partir de sa complémentarité avec Osvaldo Piazza que l’ASSE a atteint une nouvelle dimension et a entamé sa domination sur le football français.

Jamais avare de ses efforts, toujours bien placé, il ne s’avouait jamais vaincu comme en finale de la coupe de France 1975 où il enlève un but tout fait au Lensois qui s’apprêtait à marquer dans le but vide. Et que dire de son action d’anthologie contre le Dynamo de Kiev, à Geoffroy-Guichard, où il est revenu du diable vauvert pour empêcher, Oleg Blokhine, la star soviétique de marquer alors que tout semblait perdu !

Régulièrement appelé en Equipe de France (40 sélections, 1 but), il a participé aux coupe du monde 1978 et 1982.

 

GERARD FARISON (Né le 15 mars 1944 – Décédé le 8 septembre 2021, 410 matches, 7 buts de 1967 à 1980)

Gérard Farison était un arrière gauche qui ne faisait pas beaucoup de bruit et pourtant il n’a pas eu beaucoup d’équivalents à son poste dans l’histoire de l’ASSE. Devenu professionnel très tardivement à l’âge de 26 ans, il a pu mettre en évidence deux qualités qui ont fait de lui un des premiers arrières latéraux modernes. Sa vitesse et sa résistance lui ont permis d’enchaîner les allers retours sur son aile et s’inscrire pleinement dans le nouveau style que voulait mettre en place Robert Herbin qui lui a accordé une confiance aveugle.

Avec toutes ses années amateurs, il cumule 19 ans de présence chez les Verts qu’il n’a quitté qu’en 1980 au crépuscule de sa carrière. Sa blessure causée par les Nîmois le 5 mai 1976 et qui l’a contraint à déclarer forfait pour la finale à Glasgow a été très préjudiciable pour son club.

Il a porté une fois le maillot bleu de l’équipe de France.

MILIEUX

CHRISTIAN SYNAEGHEL (Né le 28 janvier 1951, 208 matches, 32 buts de 1970 à 1978)

Membre de la « promotion dorée » vainqueure de la coupe Gambardella en 1970, Christian Synaeghel s’est imposé en tant que demi-défensif à l’activité incessante, première rampe de lancement de son équipe. Doté de « trois poumons », il était le merveilleux pendant à la puissance de Dominique Bathenay et il était aussi efficace dans son rôle défensif que dans sa capacité à ouvrir des brèches dans les surfaces adverses. Il ne fallait surtout pas se laisser berner par son aspect chétif qu’il compensait par une condition physique exceptionnelle. Il avait aussi la particularité d’être un joueur capable de déjouer les matches les plus fermés par sa faculté à obtenir des penalties libératoires.

Comme Gérard Farison, il a été blessé lors du match contre Nîmes, une semaine avant la finale de la coupe d’Europe en 1976 et il a été remplacé par Jacques Santini, dont la tête a heurté les fameux poteaux carrés.

DOMINIQUE BATHENAY (Né le 13 février 1954, 211 matches, 33 buts de 1973 à 1978)

Dominique Bathenay s’est révélé le 6 octobre 1973 à Nîmes (1-2). Sa puissance phénoménale, son abattage dans toutes les zones du terrain, sa frappe de mule du gauche légendaire l’ont installé durablement dans l’équipe première. Jouant un peu plus haut que Christian Synaeghel, il ne rechignait pas aux tâches défensives tout en se portant rapidement vers l’avant où ses buts ont débloqué bien des situations notamment en coupe d’Europe contre l’Hajduk Split en 1974 mais aussi contre le Glasgow Rangers le 6 novembre 1975 (2-0).

On ne pourra jamais oublier son frappe d’anthologie contre Liverpool à Anfield Road le 16 mars 1977, qui est restée dans toutes les mémoires.

Il a été sélectionné à 20 reprises avec l’équipe de France avec laquelle il a connu la coupe du monde 1978 en Argentine (2 matches).

JEAN-MICHEL LARQUE (Né le 8 septembre 1947, 399 matches, 100 buts de 1966 à 1977)

Jean-Michel Larqué a débuté à Saint-Etienne avec Jean Snella qui lui a donné sa chance contre Nantes le 26 mars 1966 (0-5). Il s’est affirmé avec Albert Batteux et a récupéré le brassard de capitaine après le départ de Georges Bereta à l’OM, avec Robert Herbin. Il était le stratège, le maître à jouer de cette équipe, capable avec sa technique, d’orienter le jeu et d’offrir des solutions pour ses partenaires d’attaque même quand elles paraissaient ne pas exister.

Ses buts sur coup francs contre le Dynamo Kiev et le PSV Eindhoven en 1976 ont été inoubliables car ils ont une influence considérable pour la qualification en finale de la coupe d’Europe. Sa reprise de volée contre Lens en finale de la coupe de France 1975 (2-0) est encore considéré aujourd’hui comme l’un des plus beaux but de l’histoire de cette compétition.

Il n’a pas eu le même rayonnement avec l’équipe de France malgré ses 15 sélections (2 buts) et il est parti fâché avec Roger Rocher et Robert Herbin en 1977.

ATTAQUANTS

DOMINIQUE ROCHETEAU (Né le 14 janvier 1955, 196 matches, 56 buts de 1972 à 1980)

Arrivé à l’ASSE en 1972, Dominique Rocheteau explose aux yeux du public de Geoffroy-Guichard le 30 juillet 1975 lors d’un match amical contre les Anglais de Leeds, les derniers finalistes de la coupe d’Europe des clubs champions, où il marque deux buts (4-1). Dès le 19 août suivant, il était appelé pour le match amical de l’Equipe de France contre le Real Madrid. Rapidement, il est surnommé « L’Ange Vert » et la Rocheteaumania bat son plein à partir du match retour de la coupe d’Europe contre le Glasgow Rangers le 6 novembre 1975 (2-1) où il crève l’écran.

Ses dribbles déroutant et virevoltants enthousiasment la France entière. Malheureusement, blessé, il ne joue que sept minutes contre le Bayern Munich en finale de la coupe d’Europe en 1976.

Il est un des piliers de l’équipe de France avec 49 sélections (15 buts) et trois coupes du monde à son actif (1978, 1982 et 1986).

HERVE REVELLI (Né le 5 mai 1946, 402 matches, 213 buts de 1964 à 1971 et de 1973 à 1978)

L’avant-centre, Hervé Revelli a connu deux périodes à l’ASSE. La première dans les années 1960 où il devient un attaquant très efficace qui ratait rarement sa cible. Pourtant, barré par Salif Keita, il s’engage avec l’OGC Nice en 1971 où il joue pendant deux saisons. Mais en 1973, son profil manque à l’ASSE et il accepte de revenir dans le Forez pour apporter sa science du but à une équipe talentueuse qui en profitera pour conquérir avec lui ses premiers trophées sous l’ère Robert Herbin. Il a marqué un doublé lors de la fameuse finale de coupe de France 1970 contre Nantes (5-0) et il s’est retrouvé à point nommé pour ouvrir le score contre le Dynamo de Kiev en 1976. Il est le meilleur buteur de l’histoire du club avec 213 buts inscrits toutes compétitions confondues.

Il a connu 30 sélections avec l’équipe de France pour 15 buts mais dans une période où elle était dans le creux de la vague.

PATRICK REVELLI (Né le 22 juin 1951, 299 matches, 88 buts de 1969 à 1978)

Patrick Revelli est le frère d’Hervé avec lequel il va constituer la fratrie la plus célèbre de l’ASSE. Il est, lui aussi, issue de la « promotion dorée » sur laquelle va s’appuyer Robert Herbin pour mettre en œuvre ses idées. Sa polyvalence sur tout le front de l’attaque, son esprit de combat, sa haine du renoncement en ont fait un équipier idéal et lui ont valu le surnom « le gaulois ». Une action, à elle seule, résume toutes ses qualités, celle du débordement contre le Dynamo Kiev en prolongations, où il va s’arracher pour centrer en direction de Dominique lui permettant d’inscrire le 3e but, celui de la qualification.

S’imposer à Saint-Etienne n’a pourtant pas été une mince affaire pour lui car il a été parfois pris à parti par le public et par la presse qui n’ont pas su voir toute l’importance que ce joueur pouvait avoir sur le terrain.

ENTRAINEUR

ROBERT HERBIN (Né le 30 mars 1939 – Décédé le 27 avril 2020, 637 matches dirigés de 1972 à 1983 et de 1987 à 1990)

Robert Herbin a été formaté par des entraîneurs illustres qui l’ont précédé à l’AS Saint-Etienne. Il a été influencé par Jean Snella et Albert Batteux qui ont marqué sa manière de diriger une équipe. Par contre, lorsqu’il a été nommé coach en 1972, il a apporté une dimension supplémentaire aux enseignements qu’il a reçu de ses mentors : l’importance de la condition physique

S’inspirant de ce qui se faisait de mieux en Europe à l’époque et notamment le football total de l’Ajax Amsterdam, il l’a transposé à l’ASSE. Dans les années 1960, les Verts dominaient le football français mais ils étaient impuissants en coupe d’Europe à part des exploits sans lendemain. Herbin a compris que ses joueurs devaient acquérir un résistance physique qui n’était pas la priorité de ses prédécesseurs. Grâce à cette nouvelle orientation et des idées tactiques, qui ont confiné parfois au génie, comme contre le PSV Eindhoven en 1979, il a réveillé le football français.

Cerise sur le gâteau, alors entraîneur, il a joué le dernier match de la saison 1975 avec son équipe contre Troyes (5-1).

Curkovic – Janvion, Piazza, Lopez, Farison – Synaeghel, Bathenay, Larqué – Rocheteau, H. Revelli, P. Revelli

Entraîneur : Robert Herbin

Par Albert Pilia