Laurent Batlles saison 1 à l’ASSE : réussite ou déception ?

La fin de saison approche, il est temps de faire un premier bilan sur un homme important du club : Laurent Batlles. On le dit songeur quant à son avenir. Ne voulant pas revivre une saison comme celle-ci, il se murmure qu’il va être plus exigeant sur la compétitivité de son équipe. Voyons ensemble ce qu’il a réussi durant cet exercice et ce qu’il peut améliorer dans son coaching.

Des vrais points positifs dans son travail

Commençons par le véritable chantier qui était promis à Laurent Batlles à son arrivée : construire un groupe. Véritable champ de ruine début juin, l’ASSE a régénéré son effectif : 17 départs et 12 arrivées au Mercato d’été.

Si la première partie de saison a été compliquée, le groupe n’a jamais semblé lâcher son entraîneur. L’ajout des recrues hivernales aura permis à Batlles de compléter son effectif en talent et en leadership. Les atermoiements de la direction du club n’aident pas un entraîneur à trouver de la sérénité pour la faire rejaillir sur son groupe. Le coach stéphanois a mis du temps, mais il a réussi à construire un groupe soudé et déterminé pour aller chercher un maintien mal embarqué au mois de décembre.

Un maintien par le jeu

Le maintien, Laurent Batlles a toujours voulu aller le chercher par le jeu et uniquement le jeu. Bon nombre de ses collègues mettent l’accent sur l’état d’esprit et le courage qu’il faut avoir pour se sortir de ces situations. Depuis son arrivée au club, le coach stéphanois a toujours mis en avant sa philosophie tournée vers l’offensive. Les chiffres parlent d’eux-mêmes :

• Deuxième meilleure attaque du championnat (55 buts marqués, 1,57 but/match).
• Équipe qui frappe le plus par match : 503 tirs depuis le début de la saison, 14,37 tirs/match.
• Troisième équipe à avoir le plus de possession : 55,6% par match.
• Première équipe au expected goal (buts attendus) : 1,88 XG/match.

Plus que les chiffres, l’impression visuelle est criante : les phases offensives sont clairement travaillées et maîtrisées par Laurent Batlles et ses hommes. Contre Laval, l’ASSE n’a pas effectué son meilleur match, mais elle a produit par séquence de très beaux mouvements collectifs.

Un système qui valorise ses hommes forts

L’entraîneur stéphanois a su trouver un système pour mettre dans les meilleures conditions ces deux principaux atouts offensif : Krasso et Nkounkou. L’attaquant ivoirien (Troisième meilleur buteur du championnat et meilleur passeur) et le piston stéphanois (quatrième passeur de ligue 2 en six mois) ont pleinement profité de la mise en place du 3/5/2

En effet, Krasso a pu évoluer avec un autre attaquant, principalement Wadji, lui laissant beaucoup de liberté pour dézoner et organiser le jeu stéphanois. Ce choix lui a permis d’apporter du danger par la passe ou les dribbles. Nkounkou, positionnée en tant que piston gauche, a pu pleinement profiter de ses qualités de vitesse et de puissance sur son côté. Déchargé (un peu trop ?) des taches défensives, il a pu se concentrer sur ses attaques, prenant confiance en ses qualités pour marquer des buts importants.

Des points à améliorer pour la saison prochaine

Vingt et un : c’est le nombre de journées que l’ASSE a passé en position de relégable. En passant plus de la moitié de la saison dans la zone rouge, le club stéphanois devra tirer un bilan négatif de cette année quelque soit son classement final. L’analyse de cette saison ne doit pas être faussée si l’ASSE termine dans le top 10.

Un coaching frileux

Une des choses que l’on peut reprocher à Batlles, c’est un manque de réaction au cours des matchs. En effet, beaucoup de ses changements s’effectuent tard dans le match. Dylan Chambost a dû se contenter de rentrer dans les cinq dernières minutes de plusieurs matchs avant d’avoir un peu plus de temps de jeu. Difficile de montrer ses qualités avec si peu de temps de jeu.

Contre Rodez, alors que l’ASSE était en difficulté offensivement, Batlles a fait rentrer le seul attaquant qu’il possédait sur le banc : Lhery à la 90ᵉ minute. Compliqué de changer le cours d’un match en réagissant si tard. La gestion du cas Lhery contre Rodez interroge sur la considération que l’entraîneur stéphanois porte aux jeunes joueurs du centre de formation. Lhery et Gauthier s’entraînent depuis de nombreuses semaines avec le groupe professionnel, sans avoir aucune chance de se montrer en Ligue 2.

La saison prochaine, il serait préférable que l’entraîneur stéphanois puisse s’appuyer sur ses jeunes joueurs capables d’intégrer le groupe des 18 le week-end, plutôt que de recruter des joueurs hors de forme et sans apport sportif (Pavlovic, Pintor…).

Un équilibre défensif à trouver

Après une première partie de saison où le coach semblait tâtonner dans ses choix tactiques et de joueurs, il a instauré le 3/5/2. Un système qui marche parfaitement offensivement, mais l’équipe stéphanoise a toujours autant de mal à garder sa cage inviolée. Aujourd’hui, l’ASSE est la 18ᵉ défense de ligue 2 avec 53 buts encaissés en 35 matchs (1,51 but/match).

Sur la phase retour : 22 buts concédés en 16 matchs (1,38 but/match). Depuis le changement de système contre Annecy : 17 buts concédés en 14 matchs (1,21 but/match). À titre de comparaison avec l’ESTAC, la saison où il termine champion, son équipe finit 3ᵉ défense avec 36 buts encaissés (0,95but/match).

Pour aller plus loin dans l’analyse, faisons la comparaison avec un autre entraîneur spécialiste de la Ligue 2 et prônant un jeu offensif : Jean-Marc Furlan. Avec le club de Troyes il réalise trois accessions en Ligue 1.

• En 2004/2005 : 15ᵉ défense avec 48 buts encaissés (1,26 but/match).
• En 2011/2012 : 2ᵉ meilleure défense, 35 buts concédés (0,92 but/match).
• En 2014/2015 : Meilleure défense du championnat, 24 buts concédés (0,63 but/match).

Aussi, il réalise la montée avec Brest en 2018/2019 : 35 buts concédés (0,92 but/match) et avec Auxerre en 2021/2022 : 39 buts encaissés (1,03 but/match).

D’ailleurs, Furlan déclare en mai 2023 « moi mon kiffe, c’est de marquer un but de plus que l’adversaire. Mais après attention, ça ne m’empêche pas non plus d’avoir envie de bien défendre ».

À la perte de balle, on ne sent pas toujours l’envie collective de récupérer rapidement le ballon, ou au moins freiner la progression adverse. De trop nombreuses fois, les défenseurs stéphanois se sont retrouvés en infériorité numérique et donc en difficulté. Laurent Batlles devra trouver rapidement un équilibre d’équipe pour jouer la montée la saison prochaine. Prôner un jeu offensif tout en trouvant un juste milieu avec l’imperméabilité défensive !

L’année 2 pour convaincre tout le monde ?

Laurent Batlles est arrivé à l’ASSE pour un projet reconstruction et remontée sur deux ans. Il a connu une première partie de saison compliquée qui a dû l’endurcir et le faire progresser en tant qu’entraîneur. S’il doit améliorer son équilibre défensif, il serait dommageable de ne pas le voir aller au bout de son projet. Peut-être doit-il renforcer son staff pour se sentir moins seul dans les moments difficiles. Entrainer Saint-Etienne, apporte plus de pression qu’à Troyes, sûrement avait-il sous-estimé l’environnement stéphanois ? Une chose est sûre, seul l’accession en Ligue 1 au terme de la saison prochaine pourra transformer son aventure verte en succès.

Crédi photo : asse.fr