Aurélien Remoué, emblématique de la formation stéphanoise, s'est livré en exclusivité sur ses 12 années passées au club. De sa relation avec Razik Nedder, son quotidien au centre de formation de l'ASSE, les joueurs qui l'ont marqué... Entretien.
Salut Aurélien, comment vas-tu ? Quelle est ton actualité ? L'aventure au club du RFC Seraing s'est terminée ?
"Je vais bien, je suis de retour avec mes proches. J'ai vécu quelques mois en Belgique mais l'aventure s'est arrêtée. Je leur ai demandé une résiliation à l'amiable et ils ont accepté sans poser de soucis, je devais me rapprocher des miens. Nous attendons un heureux événement. Je sais que c'est compliqué de trouver un projet en cours de saison mais il fallait que je me rapproche des miens. Il faut laisser le temps, faire les choses et voir ce qui se présente."
Un retour à l'ASSE est-il envisageable ? Parle nous de ton aventure stéphanoise de 12 années ?
"On ne se ferme aucune porte (sic). Nous nous sommes quittés en très bons termes avec le club. Je dis et pense que du bien de l'ASSE. J'y ai tout appris ici, j'y ai découvert ma passion. Je suis passé par toutes les catégories. Des plus jeunes jusqu'au groupe réserve où j'ai été l'adjoint de Razik (Nedder). J'ai même fait des reprises avec le groupe professionnel (comme préparateur physique). Aussi, j'ai été veilleur de nuit (surveillant au centre de formation), j'ai lavé le linge... bref j'ai tout fait dans ce club (sic). Quand le président il parle de famille, je me sens concerné. On y passe beaucoup de temps et d'énergie mais je m'y sentais comme à la maison à l'ASSE."
Parle nous de ta relation avec Razik Nedder, actuel coach de la réserve ? Le vois tu aller plus haut ?
"Tu sais Razik, c'est comme mon frère. Je le considère comme mon grand frère, il m'a aidé depuis que je suis à l'ASSE. Aussi, il m'a conseillé dans mes choix professionnels mais aussi personnels. Il a toujours été de bons conseils et là pour moi. La Gambardella c'était vraiment un top moment. Même si j'étais pas sur le banc avec lui, j'ai vécu ça avec et c'était magnifique.
Quand je suis arrivé au club, j'avais les U12 et lui avait les U13. Au final, on s'est retrouvé les deux avec la réserve (coach principal et coach adjoint) donc c'est magnifique ! Pour moi, il est fait pour aller au haut niveau. C'est pas parce que c'est mon ami que je dis ça. Sa connaissance du football, sa relation avec les jeunes, son autorité qui lui permet de faire passer des messages... j'ai vraiment kiffé travailler avec lui."
Toi qui connais bien les jeunes du centre de formation de l'ASSE, sur qui tu mettrais une pièce pour les années à venir, même si ce sont toujours des paris difficiles ?
"Je ne prend pas de risque : Mathis Amougou ! En terme de talent, de potentiel, de maturité, de travail. Franchement j'y pensais il y a peu en plus. S'il y a deux joueurs qui m'ont marqué c'est Mathis Amougou et Lucas Gourna. Tu sens qu'ils font partie du projet de l'AS Saint-Etienne. Ils sont parfaits pour le contexte. Pour Mathis Amougou, je me mouille sans problème (sic)."
Tu as fréquenté d'autres supers joueurs à la formation : Saliba, Fofana. Es tu toujours en lien avec eux ?
"Oui, j'ai davantage eu de moments avec Wesley (Fofana) qu'avec Wilo (Saliba). Wilo, il a rapidement franchi les étapes et c'est vrai qu'on l'a peu eu en réserve, il a directement fait U19 à la Ligue 1. Wesley, nous l'avons eu un peu plus longtemps avec la réserve. J'ai donc plus de lien avec Wesley. Ca n'empêche pas que j'ai Wilo parfois au téléphone et je suis ravi de ce qu'il fait."
Que pensais-tu de Batlles ?
"Je m'entendais bien avec lui. Nous avons travaillé trois ans ensemble au centre de formation. C'est quelqu'un de très rigoureux dans ce qu'il fait. J’ai eu la chance de travailler avec un coach comme Lolo, évidement que j’étais déçu de ne pas vivre une aventure en pro notamment quand ça s’est ouvert mais ce sont des décisions qu’on ne maîtrise pas et peut-être qu’elles ne viennent même pas de lui. Ce que je peux dire c’est que cette expérience à ses côtés a été riche dans mon parcours d’entraîneur adjoint et de préparateur physique. Il a une méthode calme, posée et rigoureuse, différente de Razik où l’intensité et les animations priment par exemple."
Et que penses-tu de la venue de Dall'Oglio à l'ASSE ?
"Honnêtement je ne le connais pas du tout personnellement. Je sais qu'il est bien lié avec Benjamin Guy, le préparateur physique, qui m'en avait parlé. Il m'a dit qu'il avait adoré travaillé avec lui. Mis à part ça, je ne le connais pas plus que ça donc je n'ai pas envie de dire des bêtises."
Au centre de formation, avec qui as tu garder des liens ? Des personnes marquantes de ton aventure ?
"Nous avons connu plusieurs directeurs de centre de formation mais j'ai adoré travailler avec Laurent Huard. Sans dénigrer les autres, je le trouve ultra impliqué. En effet, il est présent à tous les matchs, tous les entrainements de toutes les catégories. Laurent Huard, c'est une bonne personne et quelqu'un de passionné ! C'est un régal de parler football avec lui.
Après, les entraîneurs il y a Sylvain Gibert qui nous a rejoint avec la réserve (entraineur u16). Sylvain c'est celui qui a fait l'intérim avec Laurent Huard chez les pros. J'étais content pour lui et en même temps déçu car s'il y a bien quelqu'un qui mérite d'être adjoint chez les pros... Il aime le club, c'est un grand supporter et c'est un acharné de travail. Pour moi, il manque dans le staff pro un adjoint qui fait le lien comme Julien Sable à l'époque. Il faut quelqu'un qui fasse le tampon entre le centre de formation et les pros. C'est vraiment le rôle qu'il aurait pu avoir et ça aurait été mérité.
Après au centre, il y a vraiment une belle équipe avec Razik (Nedder), Sylvain (Gibert), Kévin (De Jesus) mais aussi Romain (Maree) à la vidéo, un jeune ultra compétent. Je pense aussi à Hamdane (Karouni) qui fait un travail de dingue. Il y a plein de mecs comme ça qui sont dans l'ombre mais qui font un travail de fou !"
Les bons liens avec les recruteurs facilitent le travail commun ?
"C'est sur. Il y a Kaisse (Hannachi) dans le Sud avec Gaetan (Laclef). Hamdane (Karouni), c'est plus la région parisienne. Dès qu'ils viennent, on se rassemble, on fait des repas parce que c'est des mecs qui font un travail de fou pour nous ramener des supers joueurs. Nous avons une relation de confiance et d'amitié, c'est top."
"Les recruteurs, ils ont des axes quand ils recrutent. Par exemple, chez Enzo Mayilla, ils ont décelé un point fort et un potentiel et tu te dis ensuite qu'avec les entraînements, les garçons ils vont exploser. Ils sont capables de se projeter car en plus, ils voient les gamins sur un terrain réduit. Les recruteurs, ils passent beaucoup de temps au club. Ils savent les gamins qui vont performer dans le contexte du club."
Julien Sablé aussi j'imagine ?
"Julien est une personne qui m’a aussi beaucoup marqué au centre de formation de l'ASSE. D’abord par le fait qu’il a une belle carrière derrière lui et que malgré ça, il est arrivé au centre de formation avec énormément d’humilité,. Il a toujours été dans l’échange et dans la réflexion, jamais dans le « faire pour faire » mais constamment dans la réflexion et dans une démarche que je qualifierai de « scientifique ».
C’est avec lui que j’ai fais mes débuts au centre de formation, il était coach de la réserve de l'ASSE avec Bernard David et moi préparateur physique pour l’ensemble des catégories du centre de formation. J’ai vécu des moments forts, à la fois dans la difficulté car j’apprenais mon métier et c’est une personne très exigeante, qui a la volonté de toujours faire mieux et de nous pousser dans nos retranchements. C’est une personne authentique et très attachante avec des valeurs. C’est en partie aussi grâce à lui que j’ai pu avoir ce parcours atypique. Lorsqu’il a pris la direction du centre de formation, il a donné un nouveau souffle avec son projet la mine verte dont il est à l’origine. Il a instauré une méthodologie de travail, avec la création de staff par catégorie; ce qui a été une vraie avancée pour le centre de formation.
Peu de gens savent tout le travail qu’il a fait mais sans lui et son travail on n’en serait sûrement pas là aujourd’hui. Il a apporté énormément au club et je me répète mais de l’extérieur peu de gens le savent et c’est bien dommage. Lorsqu’il est passé chez les pros il a gardé un œil très attentif sur le centre de formation car c’était son bébé. Son expérience a été délicate chez les pros ça m’a attristé pour lui car il méritait d’être récompensé dans son club de cœur; mais je suis heureux de voir que, aujourd’hui, il s’épanouit dans son rôle à Nice."
Une anecdote marquante ?
"Il y en aurait beaucoup. Quand tu es adjoint, tu as une relation particulière avec les joueurs. Ils arrivent plus facilement à te dire des choses qu'avec le coach et c'est riche de faire le tampon entre les joueurs et le coach quelquefois. C'est agréable de débloquer des situations ou de les empêcher quelle se bloque. Nous sommes sans cesse dans l'échange. On arrive le matin à 8h et on rentre le soir à 18h et tu n'as pas vu la journée passer. Les gens ils comprennent pas, ils disent mais tu n'as que deux heures d'entraînement. Mais, il y a tout ce qu'il y a autour. Le joueur à partir du moment où il arrive au centre de formation, c'est la priorité jusqu'à ce qu'il parte."
Un mot sur Darling Bladi qui pointe son nez chez les pros ?
"Je ne le voyais pas arriver aussi vite. Par contre physiquement, c'est un athlète comme j'en ai rarement vu. Il a une super hygiène de vie. Aussi, il a une bonne musculature et il est capable de vraiment répéter les efforts à haute intensité. En plus, il a une grosse endurance. Habituellement, les joueurs sont soit rapides soit endurants, lui il arrive à allier les deux. C'est impressionnant ! Physiquement, il a toutes les qualités pour réussir. Après, il a quelques lacunes c'est sur. D'ailleurs, Laurent huard, lui a dit : "Darling, je veux te voir un quart d'heure avant les autres à l'entraînement, tu te mets face à une planche et tu travailles tes gammes", c'est des détails qui peuvent changer les choses. En plus, c'est un bon garçon attachant, bien élevé avec qui ça a été un plaisir de travailler."
Et Ayman Aiki, il a connu une trajectoire particulière...
"Pour moi, Ayman c'est un garçon qui a besoin d'un bon accompagnement. Il est monté trop vite avec les pros. C'est pour moi là qu'il manque un adjoint qui fait le tampon en pro. Il continue à être encadré comme il l'était au centre et qu'il soit toujours considéré comme des jeunes. Ses jeunes joueurs sont trop vite considérés comme des professionnels que tu peux consommer : que t'utilises quand ça va et que tu oublies quand ça va plus. C'est pour moi ce qui est arrivé avec Ayman (Aiki). J'ai énormément discuté avec lui mais il y a des détails qui sont difficiles pour un joueur dont un coach ne se rend pas compte comme la gestion d'un vestiaire (vestiaire pro ou vestiaire centre de formation). Quand tu n'es plus sollicité et que tu sens que sur le terrain tu es moins performant, c'est là où il faut discuter avec ses joueurs et essayer de retourner la dynamique. D'ailleurs, Ayman disait que de rejouer en réserve lui avait fait du bien."
Qui est ton pari pour les années à venir au centre de formation de l'ASSE ?
"Le petit Sahraoui, j'aime beaucoup, c'est un top joueur ! Travailleur, super agréable. C'est des gamins a qui tu souhaites qu'ils y arrivent. Après une surprise : Axel Dodote (portrait ici) que j'aime beaucoup. C'est un joueur à potentiel mais pour moi il me fait penser à Wesley Fofana. En plus, c'est un joueur de caractère, même dans sa gestuelle il me fait penser à Wesley. Quand je lui avais dit, il m'avait répondu que Razik lui avait dit pareil. Sans même se consulter, on pensait la même chose. Après j'aime beaucoup Cheikh (Fall), il a un potentiel de fou. L'adaptation sociale a été bluffante. Déjà en terme de climat, quand tu arrives du Sénégal, c'est pas pareil à Saint-Etienne (sic). Socialement, il a été très vite ultra apprécié de ses coéquipiers et même avec nous les coachs, il est toujours très respectueux, travailleur. Il est bluffant depuis son arrivée à l'ASSE !"
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