À l’occasion des 90 ans de l’AS Saint-Etienne, le site Peuple-vert vous propose le portrait des 50 meilleurs joueurs de l’ASSE parmi les 775 qui, depuis 1933, ont un jour porté le maillot vert. Place à Gérard Janvion.
De la place 50 à 21, les joueurs classés seront présentés par ordre alphabétique.
GÉRARD JANVION
(394 matches, 14 buts de 1972 à 1983)
LE MEILLEUR ATTAQUANT DE MARTINIQUE REPOSITIONNE ARRIÈRE DROIT
Pierre Garonnaire, l’infatigable recruteur, a fait un tour dans les Antilles en 1972 pour ramener quatre joueurs dont on dit le plus grand bien : Gérard Pinson, Lugien, Guy Modeste, le père d’Anthony et… Gérard Janvion.
Lorsqu’il débarque à Saint-Etienne en juin de cette année, Janvion est un attaquant dont on dit le plus grand bien. Il s’est déjà illustré avec la sélection de Martinique dans un tournoi à Roubaix quelques mois plus tôt où il est désigné meilleur joueur de la compétition. De quoi attirer l’attention de plusieurs équipes dont Lille et Valenciennes, mais c’est à l’ASSE qu’il signera.
Dès son premier match amical contre l’équipe suédoise d’Atvidabergs, il débute en même temps qu’un certain Ivan Curkovic (3-2) Et il marque le premier but. Il est rapidement comparé à la légende Salif Keita qui vient de quitter le club.
La succession est malheureusement trop lourde à porter et comme il tarde à confirmer, il subit rapidement les remontrances de ces partenaires, notamment de Jean-Michel Larqué, intraitable avec son dilettantisme.
Heureusement, Aimé Jacquet, dont c’est la dernière année en Vert, est là pour l’encourager. Ces performances ne sont pas à la hauteur des espoirs suscités, à tel point qu’il envisage même, le moral en berne, de retourner en Martinique.
Le salut vient de la réserve entraînée par Robert Philippe qui, contre son homologue de l’OL, décide d’utiliser les qualités de vitesse et de jeu de tête de Janvion pour le tester en tant que stoppeur. Il est au marquage de Bernard Lacombe, futur avant-centre de talent et l’essai semble concluant.
Intéressé, Robert Herbin lui offre sa chance comme arrière droit contre Nancy, le 16 avril 1974. Les Verts ne perdent pas (1-1) et l’attaquant, que Janvion devait marquer, a été complètement muselé. Pourtant, le Martiniquais finit la saison aux avant-postes, n°10 en demi-finale de la coupe de France contre Reims (1-0) et avant-centre en finale contre Monaco (2-1) en remplacement d’Hervé Revelli blessé.
LE HÉROS DE L’ÉPOPÉE EUROPÉENNE
Mais c’est bien en tant qu’arrière droit qu’il va se révéler à la France du football à l’occasion de la plus belle des compétitions, la coupe d’Europe des clubs champions.
Même s’il a peu joué cette saison-là (13 matches), Gérard Janvion fait partie du groupe qui réalise le doublé coupe-championnat en 1974 et qui découvre la coupe d’Europe.
Or, après un premier tour maîtrisé face au Sporting Lisbonne (2-0, 1-1), les Verts ont été laminés par l’Hajduk Split en Yougoslavie, au match aller des huitièmes de finale (4-1). Même s’il n’a pas marqué, un attaquant a mis les Verts au supplice. Ivica Surjak qui a mystifié son adversaire direct, Alain Merchadier, incapable de le contrer.
Les probabilités de l’ASSE de se qualifier au match retour sont quasi nulles, mais si elle veut avoir ne serait-ce qu’une seule chance à jouer, elle doit éliminer le danger Surjak. Robert Herbin va tenter le pari gagnant de lui mettre sur sa route, Gérard Janvion, qui n’a plus joué depuis le 27 août 1974 et une défaite à Lille (2-0).
L’ASSE réalise l’exploit de battre les Yougoslaves après prolongations (5-1) dans un match que le Martiniquais a terminé sur les rotules. Surjak a été inexistant, impuissant face à son garde du corps qui n’a pas hésité à employer tous les moyens, même les plus illicites, pour l’empêcher de s’exprimer.
Il a définitivement gagné ses galons d’arrière droit, préposé au marquage des stars de l’équipe adverse.
On se souvient de la double confrontation la saison suivante en quart de finale de la coupe d’Europe contre le Dynamo Kiev (0-2, 3-0).
Janvion avait la mission de s’occuper du ballon d’or européen, Oleg Blokhine, principale menace soviétique. Et même, si l’attaquant a réussi à lui échapper une seule fois dans cette action d’anthologie qui a finalement amené le premier but stéphanois du match retour, c’est le Français qui est sorti vainqueur de ce duel. Les Verts peuvent alors continuer leur épopée jusqu’en finale et ses maudits poteaux carrés.
Gérard Janvion est également le héros d’un autre match légendaire. Le huitième de finale aller de la coupe de l’UEFA contre Hambourg, en Allemagne, le 26 novembre 1980 (5-0). Cette fois, il est positionné à un poste inhabituel de milieu gauche pour annihiler la connexion entre l’arrière droit Manfred Kaltz et l’avant-centre Horst Hrubesch. Une paire qui avait été si meurtrière une semaine auparavant avec l’équipe d’Allemagne contre la France (1-4). Le plan a été une réussite totale et les Verts ont infligé l’une des pires défaites de l’histoire d’Hambourg en coupe d’Europe à domicile.
DEUX PARTICIPATIONS EN COUPE DU MONDE
Ses performances ont séduit les sélectionneurs de l’équipe de France. Stefan Kovacs le convoque la première fois le 12 octobre 1975, en même temps qu’un autre néophyte stéphanois, Dominique Bathenay, contre la RDA (1-2).
Son successeur, Michel Hidalgo, en fait un des piliers de sa défense. Il est titulaire contre la Bulgarie, le 16 novembre 1977 (3-1), le match qui envoie les Bleus en coupe du monde. En 1978, en Argentine en 1978, il joue deux rencontres contre l’Italie (1-2) et la Hongrie (3-1).
Il est également sur la pelouse contre les Pays-Bas, le 18 novembre 1980 (2-0) qui lui offre une deuxième coupe du monde, en Espagne en 1982. Il participe à cinq matchs dont la mythique demi-finale contre la RFA à Séville, le 8 juillet 1982 (3-3). Il cumule quarante sélections, toutes avec les Verts.
Il reste à Saint-Etienne jusqu’en 1983 malgré l’affaire de la caisse noire dans laquelle il est impliqué. Mais alors qu’il aurait aimé terminer sa carrière dans le Forez, l’arrivée d’un nouveau président, André Laurent, qui a besoin de se débarrasser des gros salaires, le contraint à accepter son transfert au Paris SG. Il n'y restera que deux saisons.
Par son talent et son parcours particulier qui l’a amené du poste d’attaquant à celui d’arrière, il est devenu l’un des meilleurs spécialistes d’Europe. Par son rôle si déterminant dans l’épopée de l’ASSE, Gérard Janvion a tout à fait sa place parmi les cinquante meilleurs joueurs de l’histoire de l’ASSE.
By Albert Pilia