Alors que DAZN menace de quitter la diffusion de la Ligue 1 dès la fin de saison, la LFP tente une manœuvre décisive pour sauver les meubles : l’ex-patron de M6, Nicolas de Tavernost, va prendre la tête de LFP Media, selon une information exclusive du journal L'Équipe.

C’est une bombe à retardement qui menace d’exploser dans les prochaines semaines : DAZN pourrait cesser de diffuser la Ligue 1 dès la fin de la saison 2024-2025. Le diffuseur, devenu principal partenaire audiovisuel de la LFP depuis l’été dernier (8 matches sur 9 par journée pour un total annuel de 375 millions d’euros), subit des pertes abyssales sur cet exercice.

DAZN sur le départ après une saison catastrophique

Le médiateur judiciaire chargé de la conciliation entre la LFP et DAZN a révélé mercredi dernier devant les présidents de club que la plateforme enregistrait entre 200 et 250 millions d’euros de pertes cette saison. Un gouffre qui s’explique par une rentabilité en berne : 325 millions d’euros versés à la Ligue, auxquels s’ajoutent environ 35 millions de frais annexes (journalistes, production, déplacements, marketing…). Côté revenus, c’est la douche froide : seulement 500 000 abonnés recensés, et une estimation de recettes autour de 120 millions d’euros, bien loin de l’équilibre.

Cette hémorragie financière a poussé DAZN à saisir la justice pour réclamer 573 millions d’euros à la LFP, évoquant un "manquement observé" et une "tromperie sur la marchandise". En clair, le diffuseur estime que le produit Ligue 1 ne correspond pas aux promesses faites lors des négociations. Et désormais, il met la pression : sans révision drastique du contrat, il pourrait plier bagage dès cet été.

Nicolas de Tavernost nommé à la tête de LFP Media

C’est dans ce climat tendu que la LFP joue une carte stratégique en s’appuyant sur une figure majeure du paysage audiovisuel français : Nicolas de Tavernost. Selon une information exclusive publiée par L’Équipe, l’ancien président du groupe M6 a accepté de devenir directeur général de LFP Media, la filiale commerciale de la Ligue de football professionnel.

À 74 ans, celui qui fut aussi conseiller pour le pôle médias de CMA-CGM (BFMTV, RMC, La Tribune...) va donc prendre la suite de Benjamin Morel, parti fin février. Il devrait officialiser sa prise de fonction d’ici deux semaines, peut-être même plus tôt, une fois sa mission achevée auprès de Rodolphe Saadé.

La décision, bien que pas encore contractualisée, est d’ores et déjà actée. Mercredi dernier, Nicolas de Tavernost s’est présenté devant le bureau de la LFP, échangeant avec les présidents de club — un cercle qu’il connaît bien, lui qui a longtemps été à la tête des Girondins de Bordeaux via M6. Soutenu par CVC, le fonds d’investissement qui a injecté 1,5 milliard d’euros dans LFP Media, il est vu comme l’homme fort capable de redresser l’image commerciale du foot français.

Une Ligue sous pression, sans marge de manœuvre

Mais la mission s’annonce délicate. La LFP est juridiquement verrouillée par une clause d’exclusivité qui l’empêche de discuter avec d’autres diffuseurs tant que l’accord avec DAZN n’est pas rompu ou renégocié. Or, DAZN campe sur ses positions. Selon les informations du médiateur, la plateforme n’envisage aucun compromis incluant un versement d’indemnités pour la saison prochaine.

Lors de la réunion avec les clubs, certains présidents ont pourtant proposé un scénario : permettre le retrait de DAZN si celui-ci accepte de régler la saison actuelle et de verser un dédommagement de 200 millions d’euros pour la suite. Une piste rapidement écartée, le médiateur ayant indiqué que DAZN ne paiera pas un euro de plus.

Les discussions vont se poursuivre jusqu’à la fin de semaine, toujours sous médiation judiciaire. Une prolongation n’est pas exclue, mais le temps presse. Si aucune solution n’émerge rapidement, la Ligue 1 pourrait se retrouver sans diffuseur principal pour la saison 2025-2026, ce qui aurait des conséquences catastrophiques pour les finances des clubs professionnels.

L’arrivée de Nicolas de Tavernost intervient donc à un moment charnière. Homme d’expérience, à la fois respecté et pugnace, il pourrait être le dernier rempart contre un effondrement du modèle économique actuel. Son principal défi : restaurer la confiance des investisseurs et proposer une nouvelle stratégie de commercialisation des droits TV, au moment où la Ligue 1 cherche à retrouver de l’attractivité.