Depuis plusieurs saisons, le centre de formation de l'ASSE se classe parmi les meilleurs de l'hexagone. Comment le club a t-il su restructurer et rendre meilleur l'un de ses poumons. Explications.

La saison 2016-2017 sonne comme le commencement d'un nouveau projet au sein du centre de formation.

En effet, sur France Bleu en juin 2017 lors du départ de Bernard David (après 5 ans comme directeur du centre de formation), le média confirme qu'une grosse refonte est en cours à l'ASSE : "Il y a encore peu de temps il présentait un projet de direction pour le centre de formation en association avec l'ancien joueur Julien Sablé. Projet choisi par la direction du club". La suite logique arrive donc dans le Forez : Julien Sablé reprend la direction du centre de formation. Le club se veut ambitieux suite à cette nomination et explique que : "Le nouveau Directeur du formation incarne les valeurs et l'identité du club qui sont au coeur de son projet sportif, innovant et ambitieux. Il a pour mission de conforter la politique de formation du club."

La naissance du projet "La Mine Verte"

Un projet en 3 axes

Au cours d'une interview accordée à Onzéo en 2017, Julien Sablé explique la naissance du projet : "En fait on a présenté un projet de formation le 22 mars. Avec Bernard David on voulait allier la jeunesse et l'expérience. Le projet s'appelle "La Mine Verte". Pourquoi la mine ? Car il y a des valeurs derrière ce mot. 3 axes : le projet de vie, le projet scolaire et le projet sportif. On est là pour former des joueurs de football, mais l'attitude et le comportement sont indispensables surtout quand on représente l'ASSE. Les gens rêvent du club, on doit avoir un comportement irréprochable. Je suis et serai intransigeant dessus."

En amont, le travail a été fait d'établir un benchmark de ce qu'était un centre de formation avec la collaboration de tous les éducateurs du centre de 2017. Aussi, un gros travail a été fait afin de lister et de comprendre ce qu'il se faisait dans les différents centres d'Europe (les staffs, la scolarité, les hébergements, le recrutement...) afin de connaitre les marges de progression mais aussi les éléments forts du projet stéphanois. En plus, ce travail a permis d'établir les axes de travaux pour développer et optimiser le centre de formation stéphanois.

Sous staffé à l'époque !

Parmi les constats établis, l'un d'entre eux montrait que le club était "sous-staffé". En d'autres termes, l'entraîneur de l'ASSE du centre de formation de l'époque gérait l'intégralité des tâches. Il était coach, préparateur physique, analyste vidéo... Les educateurs géraient la préparation physique avec l'aide des documents fournis par le club aux entraîneurs des différents catégories. Une manière de gérer l'aspect athlétique. Le premier axe de développement a donc été de renforcer les staffs. L'intégration d'un préparateur physique diplômé du football afin d'accompagner les éducateurs dans une double casquette de préparateur et d'adjoint. Le premier changement a été ainsi pour les équipes de jeunes. Pour l'équipe réserve, trois personnes composaient le staff avec un entraîneur, un adjoint et un préparateur physique.

En comparaison en 2018, les clubs concurrents et européens de l'époque (Lyon, Rennes, Monaco...) avaient, déjà à cette époque des staffs comme installés en réserve à l'ASSE, dans leurs catégories de jeunes.

Aujourd'hui, les staffs sont donc encore plus conséquents et les mentalités à ce sujet ont beaucoup évolué. Une donne qui a bien été comprise par les directions des clubs de football. Aussi, parmi les axes forts, le club a constaté que le recrutement était qualitatif. Malgré quelque fois des moyens inférieurs souvent à la concurrence. Un travail mené depuis de nombreuses années par Gérard Fernandez. En compagnie de son équipe, il réalise un énorme travail de détection.

General view during the presentation of Gaetan Charbonnier as a new player of AS Saint-Etienne on December 22, 2022 in Saint-Etienne, France. (Photo by Romain Biard/Icon Sport)

Réduire le multitâche pour gagner en performance

Au niveau de la scolarité, cette dernière était gérée par les éducateurs. Un responsable de la scolarité a été ajouté également. Les éducateurs ont donc vu leurs rôles être recentré sur leur mission principale d'éducateur de centre de formation.

Sur le modèle socio-éducatif, il y avait également les éducateurs qui jouaient un rôle de façon ponctuel dans le gardiennage des internes. Un fait que nous avait confirmé Aurélien Remoué lors de notre entretien du mois dernier.

Concrètement, le premier objectif a été de recentrer chaque membre du centre de formation sur sa fonction principale. Pour cela, le club a dû offrir des moyens financiers pour réduire les multiples casquettes des employés du centre de formation de l'ASSE.

Sébastien Sangnier, un acteur majeur du projet

Alors que les noms de Julien Sable et de Bernard David reviennent régulièrement dans ce projet, un autre homme a été essentiel. Il s'agit de Sébastien Sangnier, ex-préparateur physique du groupe professionnel. Il a notamment été une pièce maitresse de la méthodologie du projet. Aussi, il a notamment su créer des méthodes de travail avec ballon qui ont été novatrices au sein des pensionnaires de l'Etrat.

Au-delà de l'aspect théorique, le projet "La mine verte" c'était de faire de la place aux jeunes au sein du groupe professionnel. En effet, les jeunes joueurs ont eu accès de façon plus régulière aux entraînements avec les pros. Le système de prêt avait pour ambition de se développer (envoyer les jeunes à des étapes intermédiaires entre le niveau de la réserve et le monde professionnel). Claude Puel a été dans la lignée du projet. De plus, les présences de Julien Sablé et Sébastien Sangnier ont fait le lien entre les deux parties.

Évidemment, Philippe Guillemet, successeur de Julien Sablé à la direction du centre de formation, a œuvré pour la continuité de ce projet lors de son mandat.

Qu'est ce qui en fait un projet propre à l'ASSE ?

Identifier les axes majeurs

Le projet de jeu a été choisi de manière collégiale par les éducateurs. Pour être plus précis, l'idée était de définir comment le club voulait former ses joueurs. Tous les éducateurs devaient déjà avoir un rapport à l'ASSE. Il fallait des staffs qui aiment le club et qui aient l'ADN de ce club.

Le but était d'avoir des équipes très engagées avec une forte intensité à la récupération du ballon. Il a été choisi d'avoir des joueurs avec beaucoup de persévérance et d'abnégation. D'ailleurs, il y a des joueurs qui ont réussi à Saint-Etienne qui n'auraient pas réussi ailleurs. De ce fait, il y a eu des thèmes de jeu travaillés durant l'année qui ont permis d'imprégner aux joueurs l'identité voulue.

Sur l'aspect avec ballon, la priorité était d'avoir des joueurs qui sont formés à jouer sous pression. D'ailleurs, il y avait des routines personnalisées pré-établies avec les joueurs pour se perfectionner de façon individuelle en autonomie.

Infuser les joueurs de l'ASSE

Après cette mise en place, le club a sorti plusieurs joueurs. Lucas Gourna, Mahdi Camara, Arnaud Nordin, William Saliba, Wesley Fofana, Saidou Sow... La priorité avec ses garçons, c'était de les infuser de l'ASSE. Issus d'une autre région de la France, ils devaient s'imprégner de l'ASSE. De nombreuses actions ont été réalisées dans ce sens (actions associatives, visite de la mine, stage militaire...).

D'ailleurs, un constat avait été fait sur les joueurs qui évoluent dans le monde pro dans le Forez. En effet, à l'ASSE, on est à l'encontre des chiffres de la fédération. En effet, selon la FFF, les joueurs qui réussissent le mieux sont ceux qui sont issus du bassin. Ce n'est pas le cas à Saint-Etienne. Un constat a d'ailleurs été fait à cette époque qui disait que les meilleurs joueurs du bassin étaient rapidement recrutés par l'ASSE. Une méthode qui tuait la concurrence et offrait peu d'opposition ensuite dans le secteur stéphanois.

Le club continue de surfer sur ce travail avec l'identité Huard

Evidemment, le club s'est densifier dans de nombreux domaines depuis 2018. Laurent Huard, le directeur du centre de formation a mis son empreinte et ses idées. Le projet "La Mine Verte" a ancré de nombreux fondamentaux mais il a fallu évoluer sur quelques points. Par exemple, il y avait peu de surclassement a cette époque. Une donne qui a grandement évoluer depuis quelques saisons.

Aussi, on formait une équipe (notamment sur la génération 2000-2001) au détriment quelque fois d'une certaine individualisation. Les joueurs n'étaient pas assez confrontés à la difficulté (pas de surclassement, pas de changement de poste...). Une notion qui aurait pu parfaire leur processus de formation. Un axe qui a également été remédié depuis.

Comme tous les projets, il présentait certaines limites. Néanmoins, il a été le commencement du renouveau du centre de formation stéphanois. Les idées du projet La Mine Verte ont permis d'ancrer les fondamentaux. Ainsi, cela a permis de recentrer la formation au sein d'un club dont l'histoire a été faite au travers de celle-ci. Une manière d'entrevoir un futur un peu plus glorieux ?

Crédit photo : asse.fr