Dans le football, les blessures sont très nombreuses, surtout lorsqu’il s’agit de l’aspect musculaire. Pourtant, avec les moyens techniques disponibles aujourd’hui, il est possible de limiter au maximum ses risques pour passer une saison plus sereine.

Nombreux sont les footballeurs à subir des lésions musculaires, comme nous vous l’avions évoqué il y a quelque temps. En cause, de nombreux facteurs tels qu’un coup trop violent, un shoot ou encore un déséquilibre de force musculaire. Ce dernier facteur est d’ailleurs l’un des plus importants, et il, mais souvent une évidence un déficit de force entre les muscles ischios-jambiers et quadriceps (ce dernier est souvent beaucoup plus fort que son antagoniste).

L’étude de (Croisier et al.), nous indique que  » Chez des athlètes souffrant de déchirures ischio-jambières récidivantes et donnant lieu à des plaintes persistantes lors du retour sur le terrrain, nous avions identifié des déséquilibres musculaires isocinétiques dans 70 % des cas « . Ainsi, certains modes de contraction, comme l’isocinétisme, pourront permettre de détecter d’éventuels déficits.

Il apparait donc très important de pouvoir traiter ce problème persistant et qui peut être très handicapant pour le footballeur. En effet, même en cas de retour, le sportif peut rechuter soit au niveau du même groupe musculaire, soit sur son antagoniste. Cela peut se produire si le travail n’a pas été fait de manière assez rigoureuse, et par conséquent la perte de masse musculaire s’est faite de manière importante. De plus, cela peut avoir lieu sur un groupe musculaire différent si celui-ci a été également moins sollicité…

La même étude nous apprend par ailleurs que  » les joueurs présentant un déséquilibre de force identifié par isocinétisme en début de saison et non traité spécifiquement se caractérisent au cours de la saison suivante par un risque lésionnel ischio-jambier multiplié par 4 en comparaison avec les joueurs équilibrés sur le plan musculaire « .

L’isocinétisme, un moyen important pour faire face à ces contraintes !

Apparu dans les années 1970, l’isocinétisme désigne littéralement  » mouvement constant « . il s’agit d’une machine qui permet d’évaluer le niveau de force développée par une personne, mais aussi de mettre en place des protocoles pour augmenter sa force (elle est aujourd’hui beaucoup utilisé à des fins de rééducation). On peut par exemple se servir d’un Biodex qui est de plus en plus présent dans les clubs de football professionnel.

Cet outil est très utile, car il permet d’évaluer le niveau de force de différentes articulations. Dans le football, c’est surtout au niveau du genou que l’on fait ces tests pour comparer la force bilatérale (entre les deux jambes) et unilatérale (pour une jambe). Ainsi, un feedback visuel va permettre de tracer des courbes de la force développée au cours du mouvement, à des vitesses différentes. Cela permet de déterminer le pic de force, l’évolution de la courbe, son involution…

De nombreuses données sont ensuite traités et analysé par un professionnel. Ce qui est également intéressant, c’est de porter notre regard sur deux ratios. 

  • Le ratio conventionnel (Force concentrique des ischios jambiers/ Force concentrique des quadriceps, pour une même vitesse, sur une même jambe)
  • Le ratio fonctionnel (Force excentrique des ischios-jambiers/Force concentrique des quadriceps à une vitesse élevée).

L’analyse de ces deux aspects et complexe. En effet, plus la vitesse du dynamomètre isocinétique augmente, plus la différence force produite va diminuer et plus la différence de force produite entre ces deux muscles seront différents.

Des ratios pour définir de seuils de risque

En 2016, (Masson et al.) ont réalisé une étude dans le club des Girondins de Bordeaux. Leur objectif était de déterminer les seuils de référence des ratios isocinétiques pour des vitesses différentes.

A une vitesse de 60 °/s, ils ont déterminé que le ratio devait être supérieur à 0.51. Pour 240°/s, 0.65 et pour le ratio fonctionnel (=mixte), > à 0.83. Concrètement, si on prend le ratio défini à la vitesse de 60°/s, cela indique que la force des ischios-jambiers représente 51 % de la force des quadriceps. Mais, lorsque l’on utilise une méthode excentrique (le muscle résiste à la charge), la différence de force sera moins importante, car on développe plus de liaisons des protéines d’actine et de myosine, avec une résistance passive.

Dans cette étude, les ratios bilatéraux ont été calculés à partir de la force développée en concentrique par les muscles ischios-jambiers en concentrique et excentrique. Les chercheurs ont estimé que pour les différentes mesures, le déficit ne devait pas excéder plus de 15 %. Il est tout de même important de noter que ces valeurs ne sont pas à prendre comme une référence absolue.

Aujourd’hui des études travaillent encore sur ce domaine, et des valeurs légèrement différentes peuvent être trouvés suivant différents protocoles médicaux qui peuvent être mis en place. C’est ensuite au staff des équipes de faire leur travail en se plongeant constamment dans un travail de lecture et de recherche pour permettre aux joueurs de s’améliorer.

Et que faire de ces données ?

Vous l’aurez donc compris, les joueurs peuvent donc avoir un suivi très assidu et personnalisé grâce à ces machines. En effet, les kinésithérapeutes, préparateurs physiques… sont capables d’analyser ces valeurs pour personnaliser les protocoles des joueurs suivant ce que l’on demande (augmenter la puissance, améliorer son endurance…)

Attention cependant, un ratio qui peut se situer parfaitement dans les normes peut aussi cacher certains déficits. Effectivement, il se peut que la force musculaire développé par le quadriceps et les ischios jambiers soient trop faibles. Chez un footballeur, des valeurs 2,2- 2,5 N.m/kg seront trop faibles. Des valeurs de  3,5-4 N.m/kg correspondent aux données des sports de vitesse et d’explosivité. Chez les footballeurs, on vise donc environ 3 N.m/kg (Croisier et al.). Il suffit que les deux muscles soient en déficit, soit mauvais, et le résultat du ratio sera donc impacté.

De plus, un ratio trop faible peut indiquer :

  • Un déficit de l’ischio-jambier (souvent les cas)
  • Une force trop importante des quadriceps
  • Une force trop importante des quadriceps et trop faible des ischios jambiers

Grâce à ces analyses, le staff peut mettre en place des protocoles qui sont de plus en plus personnalisés pour limiter le risque de se blesser. Mais aussi et surtout dans l’optique d’avoir une condition physique optimale.

 

01 Matz SELS (rcsa) – 10 Wahbi KHAZRI (asse) during the Ligue 1 Uber Eats match between saint-Etienne and Strasbourg at Stade Geoffroy-Guichard on February 20, 2022 in Saint-Etienne, France. (Photo by Dave Winter/FEP/Icon Sport) – Photo by Icon sport