Entraîneur des gardiens de l’ASSE durant de très longues années, Jean Dees est resté un grand supporter du club. Entretien exclusif avec ce Stéphanois au cœur vert.

Jeannot, l’ASSE t’a accompagné durant une partie de ta carrière et de ta vie. Que retiens-tu de ton aventure chez les Verts ?

Je n’ai malheureusement pas eu la chance d’arriver au terme de ce qui m’était peut-être promis. Cette fracture de la jambe en 1974, alors que j’étais deuxième gardien quand Curko arrive, m’a certainement empêché d’atteindre le très haut niveau. J’ai toujours pensé qu’au jeu, que ce soit au casino, aux cartes ou au football, il fallait un peu de chance.

Mais, même si je n’ai pas pu aller jusqu’où je le souhaitais, j’ai tout de même vécu de très bons moments à l’ASSE. Je me souviens notamment, en 1994, lorsque j’ai perdu mon épouse, quand on a fait appel à moi alors que j’avais quitté le monde professionnel.

Elie Baup venait de remplacer Jacques Santini et avait besoin d’un préparateur des gardiens. Quand on m’a fait cette proposition, je n’ai pas hésité une seule seconde. J’ai remis les crampons, les gants et je suis reparti à l’aventure avec les Verts jusqu’en 2010.

Jody VIVIANI / Jean DEES – ( entraineur des gardiens ) – 09.11.2008 – Saint Etienne / Rennes – 13eme journee de Ligue 1 – Photo

Tu as alors décidé de quitter définitivement le club pour t’engager dans le monde amateur.

Ce n’est pas forcément un choix, c’est surtout que j’ai été un peu poussé vers la sortie. Quand j’ai vu que les décisions traînaient, à l’âge qui était le mien, j’ai compris qu’il fallait tout arrêter et personne ne m’a vraiment retenu. Et, comme je parcourais tous les terrains du coin, je m’étais vite aperçu que le poste de gardien de but n’avait pas réellement évolué.

De ce que je voyais, c’était encore le petit gros que l’on mettait dans les buts. Donc j’ai décidé de m’investir et d’apporter mes idées. Avec l’expérience qui était la mienne dans ce poste si particulier, je savais que je pouvais être utile, aussi bien d’un point de vue technique que mental. L’école que j’ai créée et qui accueille aujourd’hui 56 gamins, issus de 23 clubs de la plaine, va fêter l’année prochaine son dixième anniversaire. Je prends énormément de plaisir avec eux, ils m’ont redonné goût au football.

Jeremie JANOT – Jean DEES – – 03.04.2010 – Saint Etienne / Le Mans – 31eme journee de Ligue 1 – Stade Geoffroy Guichard

Tu es né et as grandi à Saint-Etienne. Porter ce maillot quand on est Stéphanois, c’est quelque chose d’exceptionnel ?

Évidemment. Quand on est un gamin de Sainté, de Terrenoire dans mon cas, c’est une immense fierté de porter le maillot vert. Je suis arrivé à l’ASSE en 1968 et l’amour du club ne m’a jamais quitté. C’est d’ailleurs pour cela que cela fait si mal quand on vit une descente. J’en ai personnellement vécu une de l’intérieur en 1996, c’est terrible de vivre cela. Pour moi, Saint-Etienne, c’est un club qui devrait toujours jouer entre la première et la cinquième place en Ligue 1.

Jean DEES – ENTRAINEUR DES GARDIENS – 20.12.2008 – Saint Etienne / Auxerre – 19e journee de Ligue 1

Tu parlais des mauvais moments avec les descentes. Mais, à l’inverse, peut-on dire que ce soir de mai 2004, quand Damien Bridonneau offre le titre de Ligue 2 aux Verts, est ton meilleur souvenir à l’ASSE ?

Oui, c’est celui-ci ! Ce que nous avons vécu avec les trois Corses (Frédéric Antonetti, Jean-Marie De Zerbi et Christian Villanova) et ce groupe de jeunes, c’est extraordinaire. Je me souviens encore du défilé dans les rues de Saint-Etienne. Vivre tout cela, c’était quelque chose de sensationnel. Puis, je pense aussi à toutes les anecdotes que j’ai pu vivre durant toutes ces années, comme cette fois où Jérémie (Janot) a passé une nuit avec son gamin, dans une toile de tente, du côté des Magic Fans. Le voir dormir sur le terrain de football, c’était une folie. Mais, c’était le personnage de Jérémie (rires).

Jeremie JANOT / Jean DEES – 16.01.2010 – Grenoble / Saint Etienne – 20e journee Ligue 1 – Stade des Alpes
Photo : Jean Paul Thomas / Thomas Pictures / Icon Sport

Parlons justement des gardiens que tu as eus sous ton aile. Lesquels t’ont le plus marqué ?

Il y a Jérémie, bien évidemment. J’ai travaillé pendant 17 ans avec lui, j’ai pris énormément de plaisir à ses côtés. Mais, celui que j’avais dans la peau, c’est Grégory Coupet. Il est devenu le parrain de mon école de football, je suis d’ailleurs toujours en relation avec lui. Malheureusement, nous n’avons pas eu trop le temps de le découvrir à l’ASSE. Il nous a sauvés la mise quand il est parti faire les beaux jours des quenelles (sic). En tout cas, je suis resté très proche de Grégory, c’est un garçon exceptionnel.

Gregory COUPET / Jean DEES – 18.04.2010 – Saint Etienne / PSG – 33E journee de Ligue 1

Tu es resté un grand supporter des Verts. Que penses-tu de la période actuelle ?

Je prends toujours du plaisir à regarder les matches. Cependant, comme tous les supporters du club, j’ai eu beaucoup de peine ces derniers mois. Nous avons très mal commencé la saison dernière, heureusement que la fin de championnat nous a permis de remettre les choses en place. Espérons qu’elle nous serve pour repartir de l’avant la saison prochaine, même s’il y a sûrement des choses à changer pour permettre au club d’avancer.

Un changement de présidence peut-il être la solution ?

C’est possible. Après, il ne faut pas oublier que cela ne résout pas tout. Il suffit de voir où en sont certains clubs après un changement de direction pour comprendre que ce n’est toujours pas la solution idéale.

Roland ROMEYER and Bernard CAIAZZO president of Saint Etienne during the Ligue 1 match between As Saint Etienne and Montpellier Herault at Stade Geoffroy-Guichard on August 21, 2016 in Saint-Etienne,

Comment vois-tu la saison prochaine ?

Les dix derniers matches de la saison dernière ont été très positifs, Laurent Batlles a fait ce qu’il fallait pour remettre les choses dans l’ordre et ramené de la sérénité. Nous devons nous appuyer sur tout ce qui a été fait sur la deuxième partie de saison pour tenter d’enchaîner. Saint-Étienne n’est pas un club comme les autres. Quand tu entres à Geoffroy-Guichard, tu vois les gens crier, sauter et s’enflammer pour leur équipe. Ce public de connaisseurs attend de voir une équipe qui joue au football et qui a des résultats. J’espère que ce sera le cas dans les prochains mois.

Un mot sur Gauthier Larsonneur. Que penses-tu du nouveau portier des Verts depuis cet hiver ?

C’est un bon gardien. Après, il ne faut pas oublier que le gardien de but joue derrière une défense et qu’il est aussi tributaire de ce qu’il se fait devant, mais je trouve que Gauthier apporte pas mal de choses positives depuis son arrivée.

30 Gautier LARSONNEUR (asse) during the Ligue 2 BKT match between Caen and Saint-Etienne at Stade Michel D’Ornano on May 26, 2023 in Caen, France. (Photo by Christophe Saidi/FEP/Icon Sport)

Au final, que représente l’ASSE dans ton cœur ?

C’est une partie de moi. Malgré tout ce qu’il s’est passé, des bons et des mauvais moments, je suis très extrêmement fier d’être Stéphanois et d’avoir porté les couleurs de ce club. Cet engouement et cette passion, personne ne pourra jamais nous les enlever.