À l’occasion des 90 ans de l’AS Saint-Etienne, le site Peuple-vert vous propose le portrait des 50 meilleurs joueurs de l’ASSE parmi les 775 qui, depuis 1933, ont un jour porté le maillot Vert. De la place 50 à 21, les joueurs classés seront présentés par ordre alphabétique. Place à Richard Tylinski (312 matches, 2 buts de 1954 à 1968). Un défenseur intraitable.

Un défenseur capital dans les premiers titres de l'ASSE

Richard Tylinski est originaire de Noyant-d’Allier où il y a vu le jour le 18 septembre 1937. C’est la cellule de recrutement que vient de constituer Pierre Garonnaire qui le remarque avec son frère dans leur club de La Combelle. Celui-là même qui avait vu éclore Koczur Ferry et René Domingo, déjà présents dans le Forez depuis 1949. Si les relations entre La Combelle et Saint-Etienne sont aussi étroites, c'est parce que ce sont deux régions minières qui se ressemblent. Les joueurs de football qui sortent du lot dans cette vallée de l’Auvergne ont toutes les chances de réussir dans le Forez grâce à leur mentalité qui se rapprochent forcément de celle des Stéphanois.

Le joueur qui a tapé dans l’œil des recruteurs est sans nul doute Richard Tylinski dont la technique et le niveau semblent les plus intéressants. Ils sont moins enthousiastes quant aux réelles possibilités de l’aîné, Michel. Mais pour faciliter l’intégration de chacun d’entre eux, les dirigeants stéphanois décident de les engager ensemble en 1953.

Si Richard joue son premier match avec les Verts le 12 décembre 1954 à Nîmes (défaite 1-0), il faut attendre la saison 1956-57, pour assister à sa véritable éclosion en tant qu’arrière central de l’équipe. En effet, il vient de remporter le championnat de France amateur avec la réserve stéphanoise l’année précédente. Jean Snella avait promis à tous les titulaires de cette équipe de les faire passer professionnels en cas de victoire finale. Il a bien entendu respecté sa promesse. Goujon, Peyroche, Ferrier intègrent l’élite dans la foulée. À partir de ce moment-là, Richard Tylinski devient indéboulonnable devant Claude Abbes, le dernier rempart. Avec son frère Michel et François Wicart, ils forment une défense sur laquelle peuvent s’appuyer Rachid Mekloufi, Kees Rijvers et Eugène N’Jo Lea pour conquérir leur premier titre de champion de France en 1957.

Tylinski, la découverte de la Coupe d'Europe et de l'Équipe de France

La jeunesse a pris le pouvoir et elle s’invite dans la cour des grands en compagnie du Real Madrid, du Milan AC, de Manchester United, de l’Ajax Amsterdam ou encore des Glasgow Rangers. Ces derniers ayant été désignés par tirage au sort comme les adversaires des Stéphanois pour le premier tour de la Coupe d’Europe en septembre 1957. Les Verts ont déjà eu un avant-goût de ces joutes européennes en participant à la coupe latine en juin 1957. Ils ont joué contre le Benfica Lisbonne et l’AC Milan devant 100 000 spectateurs au stade Santiago Bernabeu de Madrid. Si Richard a seulement joué contre les Portugais et n’a pas été aligné face aux Italiens, il a pu apprécier l’intensité et la ferveur qui animent ces confrontations.

Richard Tylinski est titulaire contre les Glasgow Rangers où les Verts ont failli réaliser l’exploit. Ils sont battus 3-1 en Écosse, mais l’infortuné défenseur, capitaine en l’absence de René Domingo, s’est blessé au genou en seconde période. Les remplacements n’étant pas autorisés, il s’est transformé en ailier gauche, obligeant son équipe à jouer quasiment à dix toute la fin du match. Saint-Etienne ne peut refaire la totalité de son retard au match retour à Geoffroy Guichard. Elle doit se contenter d’une victoire 2-1, certes de prestige, mais insuffisante pour se qualifier au tour suivant. L’insouciance et la générosité de la jeune troupe de Jean Snella qui ont fait leur force dans le championnat national, n’ont pu contrebalancer leur inexpérience à ce niveau de la compétition.

Les prestations de Richard ont tapé dans l’œil du sélectionneur. Il est appelé en équipe de France pour jouer en compagnie de René Domingo et Claude Abbes le match amical contre l’Angleterre à Wembley, le 27 novembre 1957. Il devient ainsi, selon nos recherches, le premier Stéphanois issu du centre de formation à être convoqué en bleu, un précurseur qui a donc ouvert la voie pour les générations futures.

Tylinski, une fidélité à l'ASSE jusqu'en 1966

Une voie royale semble tracée pour le nouvel international. Champion de France amateur puis champion de France professionnel, sélectionné avec les juniors, les espoirs, avec l’équipe de France B et enfin avec les A. Pourtant tout est trop beau pour durer. Les nuages commencent à s’amonceler au-dessus de la tête des Tylinski.

Le 21 décembre 1958, à la suite d’un choc avec le camerounais de Sochaux Edimo, Michel Tylinski a la jambe broyée et sa carrière brisée. Orphelin de son frère, Richard Tylinski n’a pas supporté le départ de Jean Snella en 1959 ni les vives critiques qui se sont abattus sur ses performances, entraînant une irrémédiable perte de confiance.

Malgré ses deux dernières sélections en 1960, une victoire en Coupe de France en 1962, la descente en seconde division avec l’ASSE cette même année semble mettre un terme à ses ambitions. Il faut le retour de Jean Snella, son mentor en 1963, pour le remettre en selle. L’entraîneur dont on connaît l’exigence ne lui pardonne rien et peu à peu, il retrouve ses sensations. Il redevient, au bout de ses efforts, le défenseur intraitable qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être.

Titularisé à 31 reprises sur les 34, il participe activement à la conquête du deuxième titre de champion de France l’ASSE en 1964. Un véritable retour en grâce pour un joueur qui aura été capital dans les premiers succès des Verts.
Il continue deux saisons dans le Forez. Il totalisera 312 matches en Vert et deux buts inscrits. Le premier, le 15 décembre 1957 à Angers (2-2). Le dernier contre l’OM en 16ᵉ de finale de la coupe de France, le 14 février 1960 qui donne la victoire aux siens (3-2) au bout du bout de la prolongation (119ᵉ minute).

Une fin de carrière à Avignon

Il part terminer sa carrière à Avignon où il reste trois ans. Par la suite, il fait partager son expérience à différents clubs amateurs dont Brassac avec laquelle il a le privilège d’affronter en 1970 la réserve stéphanoise. Celle-ci est alors composée entre autres de Christian Sarramagna, Patrick Revelli, Jacques Santini, Alain Marchadier et Pierre Repellini ses illustres successeurs : un clin d’œil du destin et un juste retour des choses pour celui qui mérite amplement de figurer parmi les cinquante meilleurs joueurs de l’histoire de l’AS Saint-Etienne.

 

Par Albert Pilia