28 mars 2024
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Histoire des Verts

📚 Légende ASSE : Le plus grand match de l'histoire des Verts ?

S’il ne devait rester qu’un seul match dans l’histoire de l’AS Saint-Etienne, ce serait sûrement cet ASSE-Dynamo Kiev. La rencontre de tous les superlatifs, celle qui a fait entrer les Verts dans une autre dimension.

LES VERTS ONT RENDEZ-VOUS AVEC L’HISTOIRE

L’AS Saint-Etienne affronte le Dynamo Kiev en quart de finale retour de la Coupe d’Europe des clubs Champions, l’ancêtre de la Ligue des Champions. Vainqueur de la coupe des coupes en 1975, les russes font figure de favoris de la compétition. Les Verts ont deux buts à remonter, encaissés au match aller et qui s’est terminé par une défaite 2-0.

La défaite est sévère mais elle aurait dû être plus lourde sans les interventions héroïques d’Yvan Curkovic. Il aura maintenu un semblant d’espoir pour le match retour mais comment y croire alors qu’ils ont été surclassés par un véritable rouleau compresseur ? Sauf que le rouleau compresseur aurait dû les achever et finalement, les Stéphanois, qui n’ont que deux buts de retard à combler, en ont vu d’autres. Tant pis pour les joueurs de Kiev. Geoffroy-Guichard sera leur enfer.

En effet, pour ce match, l’union sacrée est déclarée. Des dissensions avaient vu le jour lors de cette première manche notamment entre certains joueurs cadres et il faut toute l’habileté de Robert Herbin pour empêcher son équipe de sombrer. Mais aujourd’hui, tout est oublié ou au moins mis de côté. L’exploit est à ce prix.

En ville, on ne parle que de ce match. Dans un premier temps, à défaut des joueurs, les spectateurs commencent à y croire et cet engouement, perceptible dès que l’un d’eux met le pied dehors, porte toute l’équipe vers son destin.

En championnat, le week-end précédent à Nice, Dominique Rocheteau s’est blessé sur un contact avec un défenseur adverse. Son mollet le fait souffrir mais il est déclaré apte pour la rencontre. Robert Herbin a décidé de titulariser Christian Sarramagna, à la place de Patrick Revelli. Il a fait une entrée satisfaisante contre Nice et son sens du débordement pourrait être utile. Lors de la causerie d’avant match, l’entraîneur stéphanois n’a pas besoin d’un long discours pour motiver ses troupes. Il insiste seulement sur l’engagement et le pressing pour gêner les Russes et il leur demande de faire attention aux contre-attaques. Le ballon d’Or 1975, Oleg Blokhine est tellement fort. Mais l’entraîneur français a un plan. L’attaquant vedette du Dynamo Kiev aura son chien de garde en la personne du défenseur Gérard Janvion qui le prendra en marquage individuel.

De son côté, le président Roger Rocher a fait distribuer 20 000 porte-voix pour que la pression du public soit encore plus forte. Le chaudron sera plein ce soir avec des spectateurs qui ont carrément pris place sur le toit du stade. Impensable aujourd’hui.

UNE PREMIERE HEURE DE JEU STERILE

C’est parti, l’arbitre italien, M. Gonella, libère  les 22 acteurs et d’entrée de jeu, comme prévu, les Stéphanois se ruent à l’attaque, pressant les Russes le plus haut possible. Ils se jettent sur tous les ballons et disputent âprement tous les duels.

Tout se passe dans la moitié de terrain des hommes de Lobanovski mais ces derniers font bloc, intelligemment, sans laisser d’espace et inlassablement, ils écartent tout danger. Hervé Revelli y va bien de son coup de tête. Gérard Farison et Jean-Michel Larqué décochent des frappes lourdes qui font passer des frissons dans le dos du public.

Mais au bout du compte, le Dynamo Kiev ne s’affole pas et même finit mieux la mi-temps. Il obtient deux belles occasions détournées par Curkovic et Janvion qui aurait d’ailleurs dû être réprimandé par l’arbitre suite à une faute grossière sur Blokhine. Heureusement, il n’en est rien.

0-0 à la mi-temps, tout est encore possible mais il ne reste que 45 minutes à jouer.

Robert Herbin y croit toujours. Il leur demande d’attaquer encore. Cela va bien finir par rentrer. Il change cependant son fusil d’épaule. Il remplace Christian Sarramagna par Patrick Revelli. Le défenseur Trochkine l’a quelque peu asticoté. Certaines versions affirment qu’il a eu une entorse de la cheville.

D’autres, moins glorieuses, révèlent qu’il ne supporte pas ce genre de traitement, qu’il lui fait perdre tous ses moyens. Une anecdote raconte par exemple qu’il a été mangé psychologiquement par Raymond Domenech, le maître en la matière, lors des derbies. Et c’est vrai que pendant les 45 premières minutes, il a été particulièrement transparent.

Mais dans ce début de seconde période, le Dynamo Kiev est sûr de sa force et il repousse facilement les assauts des Verts beaucoup moins tranchants. 60 minutes sont passées et on sent malgré ce public qui pousse encore et encore que les Russes sont près du but.

TOUT SEMBLAIT PERDU…

Arrive cette fabuleuse 63e minute. A la suite d’un corner stéphanois, Blokhine récupère le ballon côté droit et s’échappe dans une contre-attaque fulgurante. Il est capable de courir les 100 mètres en 10’’7 et il s’entraîne même en Ukraine avec le champion olympique 1972 du 100 et du 200 m, Valery Borzov.

Il prend de vitesse  Janvion qui a tenté de le retenir par le maillot. Il passe le dernier défenseur, Christian Lopez et il file vers le but, un deuxième attaquant, Onitschenko, à sa gauche. Mais Curkovic qui arrive à sa rencontre ne fait pas un geste, il ne lui offre aucun angle et il attend de voir ce que va entreprendre le ballon d’Or 1975.

Ce dernier est peut-être déstabilisé. Dans tous les cas, il hésite suffisamment pour permettre le retour de Lopez qui n’avait pas abdiqué. Et là, au lieu de tirer, de faire la passe à son équipier, le prodige russe tente un nouveau crochet sur le défenseur, revenu à toutes enjambées, pour s’offrir une meilleure position de tir. Ce dernier ne mord pas dans la feinte, il détourne le ballon et l’expédie n’importe où, le plus loin possible écartant miraculeusement le danger.

Miraculeusement ? Peut-être pas ! Lors de la finale de la Coupe de France 1975 contre Lens, il était déjà intervenu in extremis pour empêcher les Lensois d’ouvrir la marque en se jetant pour tacler parce qu’un Stéphanois ne renonce jamais. Il travaille dur à l’image de ce public qui vit dans des conditions difficiles.

Le ballon revient dans les pieds d’Oswaldo Piazza qui n’en demandait pas tant. Il s’élance dans une chevauchée dont il a le secret et il transmet le cuir à Patrick Revelli. L’ailier stéphanois veut remettre pour son frère mais sa passe en cloche est trop longue. Le défenseur russe a le temps de dégager. Pourquoi laisse-t-il rebondir le ballon qui file jusqu’aux 6 mètres ?

C’est plus qu’il n’en faut pour le duo Hervé Revelli, Piazza qui fondent comme un bolide sur l’objet tant convoité et l’aîné des Revelli propulse la balle dans le petit filet opposé. Incroyable ! L’ASSE aurait dû être menée 1-0 et c’est elle qui fait la moitié de son retard.

À partir de cet instant, la seconde période change radicalement de physionomie. A la 69e minute, Saint-Etienne obtient un très bon coup franc. Le gardien russe Rudakov place son mur n’importe comment sur sa droite et il se met derrière laissant tout son côté gauche dégarni. Jean-Michel Larqué n’a dès lors pas besoin de brosser son ballon pour marquer le second but.

Le public gronde de bonheur, c’est le délire dans le stade et les deux équipes sont désormais à égalité sur l’ensemble des deux matches. À la 80e minute, Larqué doit céder sa place. Blessé, victime d’une béquille, il n’a plus de force. Il est remplacé par Jacques Santini mais le score n’évoluera plus jusqu’à la fin du match. il faut en passer par la prolongation.

LE RESTE APPARTIENT A LA LEGENDE

Trente minutes sont nécessaires pour départager les deux formations. Les joueurs stéphanois sont au bord de la rupture, terrassés par la fatigue et les crampes. Dominique Rocheteau n’en peut plus et il demande à sortir mais les deux changements réglementaires ont déjà été effectués et Robert Herbin préfère lui dire que les crampes ne sont qu’une vue de l’esprit et qu’il va rester sur le terrain pour marquer le troisième but. Si vraiment, il n’en peut plus qu’il reste à l’affût.

Un ballon va peut-être traîner. La première mi-temps est difficile et le Dynamo Kiev semble plus frais. Janvion, puis Piazza tombent comme des mouches, victimes de crampes. Comment vont-ils finir ?

Tout est envisageable jusqu’à cette 112e minute inoubliable. Lopez effectue une touche sur le côté droit sans s’apercevoir que Piazza est encore couché, perclus de crampes. Le ballon parvient à Santini qui le donne entre deux défenseurs à Patrick Revelli, qui a été oublié.

Il commence son numéro en débordant son défenseur venu à sa rencontre. Il semble pousser trop loin la balle qui paraît s’échapper en sortie de but. Dans un dernier coup de reins, il arrive à redresser sa course pour centrer vers Rocheteau qui, libre de tout marquage, deux joueurs russes ayant suivi naïvement Hervé Revelli qui avait fait un appel au premier poteau, fusille Rudakov.

Oublié sa douleur au mollet, Rocheteau court et saute comme un cabri, mitraillé par les photographes qui ont le droit de pénétrer sur la pelouse à chaque but marqué. Le banc s’est levé comme un seul homme, explosant de joie. Tout sauf un : Robert Herbin qui, le visage impassible, pense toujours qu’il reste encore dix minutes à jouer et il se demande comment ses joueurs vont faire pour tenir le résultat. Le journaliste Jacques Vendroux, qui a assisté à la scène, impressionné par cette attitude, l’a surnommé le Sphynx. Un surnom qui lui est resté.

Les Soviétiques n’ont pas le temps de revenir. D’ailleurs, ils n’y croient plus, assommés par cette succession d’événements contraires. Pour la troisième fois de son histoire en coupe d’Europe, l’ASSE a encore accompli un miracle et elle obtient le droit de disputer sa deuxième demi-finale consécutive.

L’équipe de l’AS Saint-Etienne qui a réalisé cet exploit :

Curkovic - Janvion, Piazza, Lopez, Farison- Synaeghel, Bathenay, Larqué puis Santini(80e) - Rocheteau, H. Revelli, Sarramagna puis P. Revelli (46e).

Entraîneur : Robert Herbin

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Article rédigé par Albert Pilia

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