Les débuts catastrophiques de la direction Gazidis. Une habitude à l’ASSE ? La défaite de l’ASSE à Nice (0-8), la troisième la plus lourde de l’histoire du club a été vécue comme un cataclysme et semble sanctionner les débuts du triumvirat Gazidis-Fahmy-Rosenfeld que l’on pourrait qualifier de ratés. En nous plongeant dans l’histoire du club, comment les nouvelles directions ont entamé leur mandat à l’AS Saint-Etienne. Ont-elles été plus efficaces ou au contraire ont-elles connu autant de difficultés ? C’est ce que nous allons voir au travers de cet article.

Pierre Guichard, le président maudit

Pierre Guichard, fils de Geoffroy-Guichard, est le fondateur de l’AS Saint-Etienne en 1933. Dès le départ, il met des moyens financiers conséquents à la disposition de son club avec comme objectif de le faire monter en première division le plus rapidement possible. Malgré
l’argent investi, le recrutement de joueurs talentueux (Ignace Tax, Ivan Beck…) qui a valu le surnom de « l’équipe des millionnaires » à la formation du généreux mécène, il lui faudra attendre cinq longues années avant d’accéder à la première division. Il est d’ailleurs
considéré comme un président maudit car malgré son implication, il n’a jamais rien gagné avec son club.

Pierre Guichard démissionne une première fois en 1943. Les dirigeants suivants n’ont pas marqué l’histoire du club ou pire, ont failli le mener à une faillite en 1950. C’est la mairie qui sauve l’ASSE grâce à une subvention et un prêt et exige le retour du patron de Casino. Il se retire une nouvelle fois en 1952 en cédant la place à Pierre Faurand.

Pierre Faurand, à deux doigts de la descente

Pierre Faurand est le président des premiers trophées, la coupe Drago en 1955 et le premier titre de champion de France en 1957. Ce qui lui vaut d’avoir aujourd’hui son nom sur l’une des tribunes du stade Geoffroy-Guichard. Ce qui est complètement mérité. Sait-on cependant que lorsqu’il arrive en 1952, les Verts ont failli descendre en D2 ?

En effet, lors de la saison 1952-53, à la fin des matches allers, la formation entraînée par Jean Snella occupe la 18ᵉ et dernière place avec seulement quatre victoires. De nombreux observateurs se demandent si le nouveau président est vraiment taillé pour ce poste. Heureusement, les dirigeants engagent en décembre 1952 un joueur qui va tout changer : le gardien Claude Abbes. Avec lui, l’ASSE réalise une deuxième partie de saison remarquable qui leur permet de remonter au classement (11e) avec en prime une demi-finale de coupe de France, seulement défait par Lille, le futur vainqueur (0-1).

Roger Rocher, un tour en D2 pour l’ASSE

Pierre Guichard est de retour à la présidence de l’ASSE en 1959 en remplacement de Pierre Faurand, malade. Il reste à peine deux saisons, le temps de préparer sa succession en la personne de… Roger Rocher en 1961. Il n’est nul besoin de présenter ce dirigeant charismatique qui a donné ses lettres de noblesse au club. Et pourtant, c’est le moins qu’on puisse dire, il connaît, lui aussi des débuts très difficiles.

Lors de sa première saison complète en tant que président, en 1961-62, après une défaite à Lyon (0-4), il limoge son entraîneur, Henri Guerin, ce qui n’enrayera pas la spirale infernale les menant jusqu’en D2. Sa saison est sauvée par la victoire en coupe de France, mais si les
réseaux sociaux avaient existé à cette époque, il est fort à parier qu’il aurait été descendu en flamme sur la place publique, ce qui lui aurait ôté toute envie de continuer l’aventure.

D’ailleurs, il a beaucoup pensé à démissionner, mais il a obtenu le soutien de Pierre Guichard qui le considérait encore comme l’homme de la situation : Avec raison quand on connait la suite de son parcours !

André Laurent, un président sans palmarès à l’ASSE

Roger Rocher sera néanmoins contraint de démissionner en 1982 sur fond de l’Affaire de la Caisse noire. Après moult péripéties, un jeune industriel, André Laurent, prend le risque de s’installer dans le fauteuil de son illustre prédécesseur en 1983. Lui aussi commence par se
prendre les pieds dans le tapis.

Après une défaite humiliante à Bordeaux (0-7), il renvoie son coach, Jean Djorkaeff (le père de Youri). Cette décision est sans effet, car après des barrages traumatisants, les Verts descendent une nouvelle fois en D2 en 1984 soit un an seulement après l’arrivée du nouveau
président. Il parvient à faire remonter son équipe en 1986. Henryk Kasperczak sur le banc parvient a tirer le meilleur parti de la jeune garde (Jean-Luc Ribar, Jean-François Daniel, Gilles Peycelon… épaulés par Jean Castaneda et Roger Milla). Malgré le retour de Robert
Herbin, le recrutement de Lubomir Moravcik, il sera un autre dirigeant sans palmarès alors qu’il a dirigé ce club pendant dix ans jusqu’en 1993.

 

Alain Bompard, aux portes du National

Évoquons pudiquement l’intermède Yves Guichard, qui a dû faire retourner dans sa tombe son propre père, et sur les présidents suivants qui ont entraîné la troisième descente en D2 en 1996. En 1997, Alain Bompard a racheté l’ASSE alors en très mauvaise posture financière. Ses premiers mois au club sont également dramatiques.

À l’issue de la saison 1997-98, Patrick Guillou et ses camarades ne sont restés en deuxième division que grâce à la défaite de ses adversaires les plus proches lors de la dernière journée du championnat. L’issue est heureuse et pas franchement méritée. Néanmoins, l’arrivée de
Robert Nouzaret rendra le sourire au Peuple Vert avec l’accession en D1 et un titre de champion de France de D2 dès sa première saison en tant qu’entraîneur en 1999.

La fin de l’aventure d’Alain Bompard sera moins réjouissante avec l’affaire des faux passeports qui a entaché son bilan. Encore une fois en D2 en 2001, il est forcé de vendre l’ASSE à Bernard Caïazzo en 2003 rejoint peu après par Roland Romeyer.

Le duo Caïazzo-Romeyer dans l’histoire de l’ASSE

Certes, Bernard Caïazzo et Roland Romeyer peuvent se targuer d’avoir ramené l’ASSE en ligue 1 en 2004 avec le troisième titre de champion de D2 à la clé. On peut toutefois considérer ce résultat un résulat de direction précédente qui avait placé Frédéric Antonetti en tant qu’entraîneur de l’ASSE depuis 2001. D’ailleurs, le Corse a tiré sa révérence dès juin 2004 à cause d’un désaccord avec ses dirigeants.

Elie Baup est appelé à la rescousse et son entame de championnat est plus que délicate. Après des résultats négatifs et des buts pris dans les arrêts de jeu (Ajaccio, Lyon, Marseille), l’ASSE pointe à la 17e place ex aequo après douze journées. Une seule victoire, cinq défaites et deux petits points d’avance sur le 20ᵉ et dernier. Heureusement, les Feindouno, Janot, Sablé, Zokora, Piquionne et les autres redresseront la situation pour terminer à une très belle sixième qui les qualifie pour l’Intertoto.

En résumé, tous les dirigeants qui laissent une trace dans l’histoire des Verts ont commencé dans la difficulté avec pour certains des résultats dramatiques. Nous ne pouvons que souhaiter la même conclusion pour la direction canadienne qui dispose des moyens financiers pour redresser la barre. À elle de jouer désormais pour effacer ces débuts très inquiétants.

Par Albert Pilia